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Turquie / Arménie

La «feuille de route» de l'espoir

par Sébastien Iulianella

Article publié le 23/04/2009 Dernière mise à jour le 23/04/2009 à 19:20 TU

La Turquie et l’Arménie sont tombées d’accord dans la nuit de mercredi à jeudi 23 avril sur un « cadre général » afin de normaliser leurs relations bilatérales au point mort depuis 1991. Cette « feuille de route » pourrait représenter un véritable espoir de reprise du dialogue entre Ankara et Erevan.

Dans le processus de normalisation des relations entre les deux pays, le ministre turc des Affaires étrangères Ali Babacan (g) avait rencontré le président arménien Serge Sarkissian (d) à Erevan, le 16 avril 2009.(Photo : AFP)

Dans le processus de normalisation des relations entre les deux pays, le ministre turc des Affaires étrangères Ali Babacan (g) avait rencontré le président arménien Serge Sarkissian (d) à Erevan, le 16 avril 2009.
(Photo : AFP)

C’est avec la médiation de la Suisse que la Turquie et l’Arménie sont parvenues à se mettre d’accord sur une « feuille de route » en vue d’une normalisation de leurs relations diplomatiques bilatérales. Selon le ministère turc des Affaires étrangères ces discussions ont abouti à « des progrès concrets et à une compréhension mutuelle. La Turquie et l’Arménie sont tombées d’accord sur un cadre global pour la normalisation de leurs relations bilatérales d’une manière propre à satisfaire les deux parties. Une feuille de route a été déterminée dans ce contexte ».

Le ministère turc n’a pas fourni de détails sur les termes exacts de cet accord. Il estime cependant que les avancées obtenues « créent une perspective positive pour le processus en cours ». Il n’est donc pour le moment pas encore question de déclarations de détail et aucun calendrier n’est à l’ordre du jour.

Un espoir à modérer

Ce texte ne précise pas non plus de quelle façon doit être réglé le contentieux entre les deux Etats au sujet de la reconnaissance des massacres d’Arméniens par l’Empire Ottoman entre 1915 et 1917. La Fédération révolutionnaire arménienne (Dachnaktsoutioun), un parti d’opposition arménien, a d’ailleurs dénoncé ce rapprochement en menaçant de quitter le gouvernement si Erevan poursuivait les négociations avec Ankara sans que cette dernière ne reconnaisse officiellement le génocide arménien. Pour l’Arménie ce génocide, reconnu en tant que tel par le Parlement européen et la France, a fait plus d’un million et demi de morts.

En raison de ces divergences sur ces massacres la Turquie et l’Arménie n’entretiennent plus aucune relation diplomatique depuis l’indépendance arménienne en 1991. Ankara a fermé sa frontière avec l’Arménie depuis 1993 en soutien à l’Azerbaïdjan turcophone qui est en conflit avec Erevan pour le contrôle du Haut-Karabakh, une enclave peuplée d’Arméniens en territoire azerbaïdjanais.

Si à l’annonce de cette feuille de route le ministère azerbaidjanais des Affaires étrangères a reconnu que « c’est le droit souverain de chaque nation de définir ses relations avec d’autres nations », le bémol à cet accord plein d’espoir vient tout de même de l’Azerbaïdjan, ennemi reconnu de l’Arménie. Bakou estime qu’une quelconque normalisation des relations turco-arméniennes doit impérativement passer par un retrait des troupes arméniennes de la région du Haut-Karabakh. Ce point d’accrochage pourrait ainsi constituer un facteur d’échec pour le processus.

Washington et Paris saluent l’accord

La réaction américaine à cette avancée dans les relations entre l’Arménie et la Turquie ne s’est pas fait attendre. Dès mercredi soir le département d’Etat américain a salué ces discussions bipartites par la voix de son porte-parole Robert Wood : « Les Etats-Unis saluent la déclaration faite par l’Arménie et la Turquie sur une normalisation de leurs relations bilatérales. Il nous tarde de travailler avec les deux gouvernements et donc de promouvoir la paix, la sécurité et la stabilité dans la région toute entière. »

Même son de cloche à Paris. Le quai d’Orsay a « chaleureusement salué » l’accord en rappelant que la France y voit l’ouverture d’une « séquence positive pour le règlement des conflits qui persistent dans la région, notamment celui du Haut-Karabakh. »

Paris souhaite que ce processus de négociation débouche sur un partenariat renforcé entre la Turquie et l’UE. Hors de question de parler d’entrée d’Ankara dans l’Union, Nicolas Sarkozy étant hostile à l’adhésion turque. Le ministère français des Affaires étrangères note toutefois que « les bonnes relations de voisinages constituent un élément du processus en cours entre l’Union européenne et la Turquie ».