Article publié le 03/05/2009 Dernière mise à jour le 03/05/2009 à 14:12 TU
Manifestation à Washington devant les bureaux de Barack Obama pour la fermeture de la prison de Guantanamo, le 13 janvier.
(Photo : Reuters)
Barack Obama avait promis durant sa campagne de fermer tous les tribunaux militaires d'exception. Le soir de son investiture, il avait alors « gelé » ces tribunaux très controversés. Mais revirement de situation, l'administration américaine va de nouveau faire appel à ces cours spéciales pour juger les détenus de la prison de Guantanamo. En revanche, les suspects vont bénéficier d'une plus grande protection.
Avec notre correspondant à Washington, Jean-Louis Pourtet
Les commissions militaires de Guantanamo, dénoncées par Barack Obama pendant sa campagne et dont il avait suspendu les activités peu après son arrivée à la Maison Blanche, pourraient reprendre du service pour juger certains des deux cent quarante et un détenus de la prison américaine à Cuba.
La nouvelle annoncée par le New York Times a été confirmée par le ministère de la Justice. Celui-ci a précisé toutefois que si les tribunaux étaient réinstallés les procédures judiciaires seraient modifiées et les prisonniers seraient jugés à peu près comme dans une cour civile.
Cette éventualité toutefois ne satisfait pas les organisations de défense des droits de l’homme. L’une d’elles reproche au président Obama de revenir sur sa promesse de refaire des Etats-Unis un Etat de droit.
Les tribunaux d’exception mis en place sous George Bush avaient été critiqués pour leur manque de justice et d’efficacité. Deux procès seulement avaient été menés à leur terme en huit ans.
Les républicains pour leur part ricanent. Ayant toujours été partisans des commissions militaires, ils sont ravis de voir que la nouvelle administration semble ne pas avoir d’autre choix que de continuer à les utiliser, même « retapées », selon l’expression du ministre de la Justice, Eric Holder
Obama revient-il sur une promesse de campage ? |
Le 20 janvier, quelques heures après son investiture, Barack Obama rentrait à peine des traditionnels bals organisés pour les festivités et sa toute première décision avait été de suspendre pour quatre mois toutes les procédures en cours devant les tribunaux militaires et de passer en revue la situation des 241 prisonniers détenus à Guantanamo. A l'époque, tous les commentateurs avaient estimé - un peu vite peut-être - qu'on pouvait déjà tirer un trait sur ces juridictions d'exception mises en place par George Bush pour juger les terroristes présumés. Pendant la campagne, le candidat Obama avait été on ne peut plus clair : il avait qualifié ce système d'« énorme échec » et s'était engagé à y mettre un terme. Un peu plus de 100 jours après son arrivée à la Maison Blanche, Barack Obama est beaucoup moins catégorique... La réflexion a évolué : les responsables de la nouvelle administration continuent à dire que l'idéal, ce serait de pouvoir juger les détenus de Guantanamo dans les tribunaux fédéraux (civils), sur le sol américain.Mais l'équipe d'Obama n'exclut pas de réactiver, pour certains cas, les tribunaux militaires d'exception, tout en promettant de les améliorer pour mieux garantir les droits de la défense. « Les tribunaux militaires sont toujours une option » a indiqué le secrétaire à la Défense Robert Gates. « Cela pourrait être difficile de juger certains détenus de haute valeur dans une cour ordinaire » explique de son côté le ministre de la Justice Eric Holder. Ce changement de position peut s'expliquer par le fait qu'une partie de l'administration semble s'être rangée aux arguments de l'équipe précédente pour qui la guerre contre le terrorisme ne peut pas être menée avec des moyens classiques.En l'occurence, la justice ordinaire présente des failles : certaines des charges qui pèsent contre ces détenus ont été obtenues par des moyens pour le moins controversés : soit sous la torture (interrogatoires musclés), soit par une déposition sur la foi d'un tiers cité dans des rapports de services secrets classés secret défense. Dans ces deux cas, on se heurte à de nombreux obstacles dans une juridication civile, alors qu'un tribunal militaire d'exception permet de garder une certaine opacité. Un bilan bien maigre Le bilan de ces tribunaux militaires n'est guère brillant. En huit ans d'existence, il n'y a eu que deux condamnations : entre les reports à répétition et les contestations par les avocats de la défense, ces juridictions n'ont pas vraiment fait leur preuve.L'éventualité de réactiver les tribunaux militaires a provoqué la consternation chez les défenseurs des droits de l'homme aux Etats-Unis qui accusent déjà Barack Obama de renier ses promesses. Ce serait une énorme erreur, disent-il, en expliquant qu'en ayant recours à une justice d'exception, on utilise les armes des terroristes. RFI |
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