Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

France / Brésil / AF 447

A la recherche du moindre indice

par  RFI

Article publié le 07/06/2009 Dernière mise à jour le 07/06/2009 à 14:37 TU

Un hélicoptère de l'armée brésilienne récupère des débris dans l'océan Atlantique.(Photo : Reuters)

Un hélicoptère de l'armée brésilienne récupère des débris dans l'océan Atlantique.
(Photo : Reuters)

Six jours après la catastrophe de l'Airbus A330 d'Air France, les équipes de secours brésiliennes poursuivent leurs recherches. Des bâtiments et des avions sillonnent une zone à plus de 1 000 km des côtes. Samedi, ces équipes ont retrouvé deux corps masculins mais aussi de nombreux débris du vol AF 447, comme des sièges, plusieurs bagages ou encore un morceau d'aile. Ces débris seront ramenés dans la journée dans la ville de Recife pour des analyses plus approfondies.

Pour le moment, ces débris se trouvent entre les mains de la police scientifique brésilienne. Dans les heures qui viennent, ils vont être acheminés vers la ville de Recife. Là, une équipe française, notamment composée d'experts d'Airbus Industries devraient commencer à les étudier.

Mais ces fragments, comme ce morceau d'aile, vont-ils permettre de comprendre ce qui s'est réellement passé au-dessus de l'Atlantique ? Ce n’est pas certain et à cette heure, personne n'est encore en mesure d'expliquer l'enchaînement des faits.

Des indications incohérentes de vitesse

De ce que l’on sait, l'A330-200 semble avoir subi une succession rapide d'incidents techniques. Le Bureau d'enquête et d'analyse a établi que l'appareil avait envoyé 24 messages de pannes automatiques entre 4h00 et 4h10 du matin, ce lundi premier juin.

L'un d'eux montrait des indications incohérentes de vitesse, c'est la seule certitude des enquêteurs. Ces capteurs placés à l'arrière de l'appareil ont été défaillants, peut-être à cause du givre. Ce n'est pas la première fois que cela arrive : Airbus avait décelé ce type de problèmes dès 1996 et aurait alors prévenu ses clients.

La compagnie Air France, elle, a révélé qu'elle n'avait pris la décision de remplacer ces capteurs qu'au mois d'avril 2009. Signalons que jamais par le passé un défaut de ces capteurs n'a entraîné un tel drame et aucun lien ne peut être fait avec la disparition du vol d'Air France.

Seules les « boîtes noires » pourront véritablement livrer le secret de ce drame. Leur localisation est aujourd'hui la priorité des autorités françaises et brésiliennes.

Entretien avec Eric Derivry, porte-parole du syndicat national des pilotes de lignes (SNPL)

RFI : Six jours après la catastrophe, toujours aucune trace des boîtes noires, les enregistreurs de vols. A-t-on une chance de les retrouver ?

Eric Derivry : D’abord, la découverte cette fois enfin confirmée, d’éléments appartenant à l’avion et malheureusement de corps pourrait permettre de faciliter les opérations de localisation de l’épave de l’avion, ou en tout cas de restreindre le périmètre de recherches sous-marines. Car évidemment le point-clé, dans cette enquête, reste la découverte puis si c’est possible, l’exploitation des enregistreurs.

Les chances de les retrouver sont objectivement minces. Vous le savez, à cet endroit, la profondeur de l’océan est considérable - on parle de 2 500 mètres – et très accidenté, on a ainsi évoqué les « Alpes sous-marines ». Les balises qui émettent sur ces enregistreurs, dits boîtes noires ont une portée de l’ordre de 1 500 mètres. D’où l’intérêt de localiser une zone la plus restreinte possible, avec le plus de précision, pour augmenter les chances de retrouver ces fameux enregistreurs.

RFI : Ces enregistreurs se trouvent bien à l’arrière de l’avion ?

Eric Derivry : Oui, ces enregistreurs se trouvent physiquement à l’arrière de l’avion. Il y a deux enregistreurs : un enregistreur dit CVR, enregistreur de conversation dans le cockpit : entre le cockpit et l’extérieur et entre le cockpit et le personnel de cabine. Le deuxième enregistreur est dit « de données » ; il enregistre plusieurs centaines d’informations, avec des fréquences de l’ordre du quart de seconde pour les plus importantes d’entre elles.

On est dans un scénario aujourd’hui où on a très peu d’informations. On a deux éléments : la position de l’avion et cette zone de front inter-tropical ainsi que cette accumulation de messages dans un laps de temps très, très court. Il convient d’avoir d’autres informations pour tirer tous les enseignements de cette catastrophe et en déterminer les causes.

RFI : Vous parliez des messages d’alertes (24 au total) ; vous en savez plus, qu’est-ce que cela veut dire ?

Eric Derivry : Les avions modernes et de ce type sont équipés effectivement de systèmes qui permettent à l’avion d’envoyer automatiquement aux servicex de maintenance, un certain nombre de messages.

L’objectif n’est pas un suivi en temps réel, un suivi opérationnel des problématiques techniques que peut rencontrer l’avion mais l’objectif, c’est d’anticiper des éventuelles opérations de maintenance à l’arrivée à l’avion et ainsi gagner du temps, et faire en sorte que les avions soient dans le meilleur état technique possible.

Sur ces 24 messages, on voit apparaître au moins une certitude. C’est la seule qu’on ait aujourd’hui : c’est qu’il y avait sur les indications de vitesse fournies aux deux pilotes, des écarts et/ou des informations erronées. Cela, c’est la certitude qu’on a, sans pouvoir déterminer les causes et les raisons de ces écarts de vitesse et de ces informations erronées.

RFI : Justement, une polémique est en train d’éclater autour de ces capteurs de vitesse. Air France fait savoir que depuis un mois ces sondes connaissaient des dysfonctionnements et que la compagnie commençait à les changer. Quel est le rôle de ces sondes ?

Eric Derivry : Vous utilisez le mot : polémique. Je crois que justement, il faut éviter dans ce genre de situation aussi dramatique de débuter la polémique. Il faut garder du calme, du sérieux, du professionnalisme dans ce genre de cas ; l’objectif étant bien évidemment de faire toute la vérité sur cet accident, comme sur tous les autres accidents, pour améliorer encore la sécurité du transport aérien.

On ne peut pas dire aujourd’hui que c’était lié aux pitots (ces fameux capteurs) à ces fameuses sondes qui sont là pour mesurer la vitesse de l’avion.

Effectivement, il y a eu un certain nombre de cas sur la flotte mondiale de dysfonctionnements de toute cette chaîne qui permet aux pilotes d’avoir des informations sur la vitesse, mais aujourd’hui, on ne peut pas dire avec certitude que c’est la seule cause c’est-à-dire que ces écarts sur ces sources de vitesse venaient de ces sondes.

Entretien réalisé par Alexandra Cagnard