Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Indonésie

L’Indonésie élit son président

Article publié le 08/07/2009 Dernière mise à jour le 08/07/2009 à 09:27 TU

Les 176 millions d’électeurs indonésiens – troisième plus grande démocratie au monde après l’Inde et les Etats-Unis – ont fini de voter pour élire leur président. Le sortant Susilo Bambang Yudhoyono, surnommé SBY, est le grand favori du scrutin, à tel point qu’il était donné réélu dès le premier tour.

De notre correspondante à JakartaSolenn Honorine

176 millions d'Indonésiens sont appelés à élire leur président.( Photo: Crack Palinggi / Reuters )

176 millions d'Indonésiens sont appelés à élire leur président.
( Photo: Crack Palinggi / Reuters )

Mardi 7 juillet, alors que les deux autres candidats organisaient des séances de photo pour la presse, le président en exercice a préféré téléphoner aux gouverneurs des 33 provinces de l’archipel pour être sûr que le scrutin de ce mercredi se passerait dans de bonnes conditions. La veille, le chef de la police de Jakarta avait annoncé le déploiement de 16 500 officiers à travers la capitale pour veiller au bon déroulement du vote.

Avec une très confortable avance de plus de 30 points dans les sondages les plus crédibles, le président sortant a donc pris des mesures pour lutter contre de virulentes critiques sur la mauvaise organisation du scrutin. La semaine dernière, ses adversaires ont multiplié les appels à la vigilance, dénonçant l’incurie de la commission en charge d’examiner le scrutin. Lors des législatives d’avril, des millions d’Indonésiens n’avaient pas pu glisser leur bulletin dans l’urne car ils n’étaient pas inscrits sur les listes électorales. Depuis, les listes ont enregistré cinq millions d’électeurs en plus, mais elles restent encore truffées d’erreur, prévient l’opposition.

Cependant, le scrutin semble joué d’avance, ce qui limite les risques de protestations des résultats lors de la deuxième élection présidentielle au suffrage universel direct depuis la chute de la dictature de Suharto. Yudhoyono bénéficie d’un large soutien dans la population, grâce notamment à la baisse des prix du pétrole et de la nourriture, ainsi que des mesures d’aide financière aux plus pauvres, extrêmement populaires. « Il y a plein de preuves montrant qu’il est un bon président : la corruption a diminué, on est en sécurité, l’éducation va bien… Je lui fais confiance à 100% », explique Joko, l’un des 200 000 supporters venus applaudir SBY lors de son dernier meeting de campagne à Jakarta.

Une opposition bien faible

Yudhoyono fait également face à une opposition bien faible. La présidence de Megawati Sukarnoputri, qu’il avait largement battue au second tour en 2004, avait été marquée par l’instabilité : des conflits séparatistes ou interreligieux menaçaient l’unité de l’archipel, des attaques terroristes frappaient tous les ans, et le pays souffrait toujours des conséquences de la crise asiatique de 1998. Le troisième candidat, Jusuf Kalla, était le vice-président de SBY et ne pouvait donc ni bénéficier du bon bilan du gouvernement sortant, ni critiquer ouvertement une administration qu’il a soutenue pendant cinq ans.

Les Indonésiens vont donc très probablement embrasser le slogan de Yudhoyono : « Continuons ainsi ! ». Sa réélection serait vue de manière très positive pour la stabilité du pays : la monnaie indonésienne s’est appréciée ces dernières semaines, la Bourse de Jakarta s’est envolée sur l’année passée, et l’Indonésie apparaît comme la démocratie la plus vibrante d’une région en proie à diverses crises, politiques en Thaïlande et Malaisie, économiques également. « Il y a dix ans, je faisais partie de ceux qui pensaient que l’Indonésie pouvait devenir un Etat raté », explique Jusuf Wanandi, directeur du « think tank » CSIS. « Je n’aurais jamais cru que nous pouvions progresser autant que nous l’avons fait ».

Le nouveau président devra s’attaquer à des réformes structurelles

Pour autant, le premier mandat de Yudhoyono n’a pas satisfait toutes les promesses de 2004. Le taux de croissance, qui a dépassé les 6% sur les deux dernières années et devrait atteindre 4,3% malgré la crise, n’est pas suffisant pour faire baisser le chômage et réduire la pauvreté de manière significative. Le nouveau président devra s’attaquer à des réformes structurelles nécessaires pour faire vraiment décoller le pays, mais délicates politiquement : réforme de la bureaucratie pour faire baisser la corruption, constructions d’infrastructures qui souffrent toujours d’une décennie de sous-investissement, dépoussiérage du cadre légal qui handicape le monde des affaires. Si SBY est réélu, il sera dans une position de force par rapport à son premier mandat, car en avril son parti a triplé son score électoral et est devenu le plus puissant dans le Parlement. « L’Indonésie a besoin d’une transformation audacieuse » pour atteindre une croissance à deux chiffres, explique l’économiste Purbaya Sadewa.