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Géorgie/Russie

Il y a un an, la guerre russo-géorgienne

par Piotr Moszynski

Article publié le 06/08/2009 Dernière mise à jour le 07/08/2009 à 07:09 TU

Le 7 août 2008, éclatait la guerre entre la Géorgie et la Russie pour le contrôle de la province géorgienne sécessionniste de l’Ossétie du Sud. Guerre lourde de conséquences pour la Géorgie et pour la région du Caucase, mais aussi pour les relations internationales en général.

Carte RFI

Carte RFI

Pendant une décennie après la chute de l’Union soviétique, la Russie n’arrivait pas à empêcher le départ de plusieurs pays de sa zone d’influence, mais contrôlait la situation dans le Caucase du Sud, en y garantissant, à sa façon, un minimum de stabilité. Avec sa « révolution des roses » et l’arrivée au pouvoir de Mikheïl Saakachvili en janvier 2004, la Géorgie s’est affranchie de la tutelle russe, mais elle était trop faible pour reconquérir ses propres régions séparatistes – l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud.

La donne a changé au début du nouveau siècle. L’élargissement de l’Otan et de l’Union européenne à l’Est et la recherche de nouvelles sources d’énergie ont mis la Géorgie et tout le Caucase au centre de l’intérêt des Etats-Unis, et de l’Occident en général. La région a pu y voir une alternative à la Russie. Les conflits en Abkhazie et en Ossétie du Sud ont ainsi perdu leur caractère local. Ils sont devenus des éléments du jeu géopolitique entre la Russie et l’Occident. C’est entre autres de leur solution que dépend, d’un côté, une possible reconstruction de la domination russe dans toute cette région stratégique, et de l’autre, la pérennité et le développement des investissements politiques et économiques occidentaux de ces dernières années. Accessoirement, ces conflits sont aussi devenus des enjeux dans les marchandages politiques entre la Russie et l’Occident au sujet de l’avenir du Kosovo et des Balkans. Ainsi, il n’est pas exagéré de dire que tout conflit dans la région – y compris armé – devient automatiquement un affrontement plus ou moins direct entre Moscou et les capitales occidentales.

L’apogée

Des troupes russes dans le village de Kvemo-Achebeti, près de Tskhinvali, en Ossétie du Sud, le 18 août 2008.(Photo : Reuters)

Des troupes russes dans le village de Kvemo-Achebeti, près de Tskhinvali, en Ossétie du Sud, le 18 août 2008.
(Photo : Reuters)

Après plusieurs mois d’incidents de plus en plus graves dans les régions frontalières entre la Géorgie et ses deux provinces sécessionnistes pro-russes, l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud, accompagnés d’une montée en puissance des forces russes dans la première et aux frontières de la deuxième, le conflit a connu son apogée dans la nuit du 7 au 8 août 2008. Selon la version de la Géorgie, ses forces essuyaient des tirs de plus en plus intenses du côté ossète et abkhaze, tout en faisant preuve de retenue dans leurs ripostes.

Tbilissi a proposé, pour la première fois, d’ouvrir de pourparlers directs avec « les autorités de facto » en Ossétie du Sud, mais celles-ci ont refusé en réclamant la participation des Russes et des Ossètes du Nord (faisant partie de la Fédération de Russie), ce qui aurait créé un rapport de forces très défavorable aux Géorgiens. Enfin, toujours selon la version de Tbilissi, ses services de renseignement ont intercepté plusieurs communications radio et téléphoniques annonçant l’entrée imminente d’importantes forces russes dans le tunnel de Roki, la seule voie d’accès de l’Ossétie du Nord vers celle du Sud.

Selon la version de la Russie, son armée a juste riposté à une attaque géorgienne afin de protéger ses forces de maintien de la paix et ses citoyens en Abkhazie et en Ossétie du Sud. Il faut rappeler que la Russie a distribué auparavant des passeports à de nombreux habitants de ces deux provinces, ce qui a facilité l’utilisation de l’argument de « protection de ses citoyens ».

Trois ordres et une riposte

Le 7 août 2008 à 23h35, le président Saakachvili a transmis trois ordres aux forces armées géorgiennes : « 1) protéger les civils dans la région de Tskhinvali en Ossétie du Sud ; 2) neutraliser les positions de tirs contre les civils, les forces géorgiennes de maintien de la paix et les policiers ; 3) arrêter le mouvement des unités régulières de la Fédération de Russie par le tunnel de Roki dans la région de Tskhinvali en Ossétie du Sud ». L’artillerie géorgienne a ouvert le feu à 23h50 et l’offensive terrestre a commencé à 0h15 le 8 août. Les Russes ont officiellement informé Tbilissi de l’ouverture de leur opération militaire à 2h37.

Dépourvue de l’appui américain espéré – il faut dire, un peu naïvement – l’armée géorgienne doit assez rapidement battre en retraite devant les attaques de forces russes suréquipées et surtout dominant complètement les airs, ce qui leur permet de bombarder presque sans encombre de nombreux objectifs non seulement sur le théâtre direct des opérations en Abkhazie et en Ossétie du Sud, mais aussi sur le reste du territoire géorgien, même aux abords de Tbilissi. Rapidement, elles occupent presque un tiers du pays.

L’engagement de l’UE

C’est l’engagement politique rapide et efficace de la présidence française de l’Union européenne qui a sans doute sauvé la Géorgie d’une invasion de tout son territoire par l’armée russe. Le 12 août à 12h40, le président russe Dmitri Medvedev annonce son ordre d’arrêter l’opération militaire en Géorgie. En réalité, les attaques, les combats et les incidents ont continué encore bien après, et la mise en œuvre des accords négociés entre les Géorgiens et les Russes avec la participation directe de Nicolas Sarkozy laisse toujours beaucoup à désirer. Mais l’essentiel a été fait : la guerre a été arrêtée. Selon les sources officielles à Tbilissi, elle a fait, du côté géorgien, 412 morts (dont 228 civils, 170 militaires et 14 policiers) et 1747 blessés, dont 973 civils.