par Marc Verney
Article publié le 09/09/2007 Dernière mise à jour le 09/09/2007 à 20:06 TU
Rugby global contre rugby local ? Les enjeux économiques modifient-ils le jeu ?
(Photo: Marc Verney/RFI)
Le rugby est resté longtemps un sport pratiqué par quelques nations des deux hémisphères. Aujourd’hui, on joue au ballon ovale sur tous les continents. L’instauration de la Coupe du monde en 1987 et la professionnalisation de 1995 ont fait exploser l’audience de ce sport. Le rugby est-il en train de suivre la voie du football ?
Pour Marcel Martin, le président du club français Biarritz Olympique et du syndicat des clubs professionnels de rugby, « quand on aime un sport, on est ravi que celui-ci devienne mondial ». Pour lui, le principal problème viendrait de l’arrivée dans les clubs français de nombreux joueurs étrangers, sans qu’il y ait parallèlement « des moyens pour la formation de rugbymen hexagonaux susceptibles de sélections en équipe de France afin qu’elle reste représentative de son pays ». De son côté, Benoît Pensivy, rédacteur en chef de Rugby Hebdo, voit, lui, « un fossé se creuser entre un rugby d’élite et les pratiquants amateurs du rugby », ce qui pourrait menacer à terme l’âme de ce sport.
Le journaliste Claude Cabanes estime que le sport et le rugby en particulier est un puissant facteur « d’unification de la race humaine ». Il n’aime pas, cependant « les "pilotes" qui sont actuellement dans "l’avion" de la mondialisation ». L’ancien rédacteur en chef du quotidien communiste L’Humanité refuse la dérive du rugby vers ce qu’il appelle « l’obscénité de l’argent ». Pour Benoît Pensivy cependant, « l’argent a toujours été présent dans le rugby. L’important, c’est ce qui se passe sur la pelouse. Un joueur qui rentre aujourd’hui sur un terrain est aussi courageux que son homologue d’il y a vingt ou trente ans. Tant que les valeurs du rugby se passent par le terrain, il n’y pas de raison qu’elles disparaissent. »
Le rugby est-il vraiment mondial ?
Intervenant dans le débat, l’ancien rugbyman et grand spécialiste du rugby Pierre Villepreux ne croit pas que l’on puisse de toutes manières revenir en arrière même s’il est « encore possible de préserver les valeurs de l’ovalie ». Villepreux, qui se demande d’ailleurs si l’on est en droit de parler mondialisation dans le secteur du rugby : « Si on ajoute l’ensemble du nombre des pratiquants des petits pays on n’arrive pas au niveau d’une seule des grandes nations de ce sport ». Une remarque du rédacteur en chef de Rugby Hebdo qui souligne à ce sujet que le nombre de joueurs de rugby licenciés dans le monde « n’augmente pas », y compris en Nouvelle-Zélande, la nation emblématique du monde ovale.
Archie Ferguson, de la Fédération écossaise de rugby reste prudent : « Si la globalisation se colle trop au professionnalisme, nous avançons vers un problème car cela signifie la mise en place d'une culture dominante, le diktat des sponsors et de l'audience, la victoire à tout prix, il faut s'en méfier ». De son côté, le président du Biarritz Olympique, Marcel Martin, défend le mouvement actuel. Et affirme que l’argent récolté durant la Coupe du monde « sert au développement du rugby. Dès que la compétition a commencé à gagner de l’argent, le premier geste de l’International Rugby Board (NDR : l’organe dirigeant du rugby) a été de mettre des moyens à la disposition des petites fédérations… afin d’éviter l’erreur de 1995, où un pays qualifié, la Côte d’Ivoire, n’a jamais pu jouer un match sur son sol ». Benoît Pensivy souligne cependant « l’égoïsme » des nations historiques du rugby : « Au sein de l’IRB, les grandes nations traditionnelles, qui disposent de 16 votes sur 21 ne laissent que des miettes aux autres pays ».
En guise de conclusion à ce premier forum, Marcel Martin pense que deux spécificités sont à même de « préserver » les valeurs du rugby : « L’obligation d’avancer collectivement en se passant la balle en arrière… », mais aussi le fait, qu’à la différence de tous les autres sports de balle, « il faut aller déposer soi-même l’ovale dans l’en-but pour marquer ». Des valeurs parfaitement appliquées par les Argentins lors du match d’ouverture contre la France, attirant ce commentaire de l’ancien international français Fabien Galthié dans le journal Le Parisien du 9 septembre : « Une bande de nomades (qui) construit d’abord son jeu autour d’invisibles liens appelés solidarité, fierté et amour du maillot ».
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