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Point de vue
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Merci la France
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Cet article est publié en collaboration avec Metro (www.metrofrance.com)
Une génération de joueurs formée loin du Maroc mais très attachée au pays a provoqué l'enthousiasme de tout un peuple en se qualifiant pour la finale. (Photo AFP)
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Depuis quelques jours, chaque fois que je croise un Marocain, il s'avance vers moi, un large sourire aux lèvres, me donne l'accolade et m'apostrophe chaleureusement: "Merci la France!"
De notre envoyé spécial en Tunisie
Depuis quelques jours, chaque fois que je croise un Marocain, il s'avance vers moi, un large sourire aux lèvres, me donne l'accolade et m'apostrophe chaleureusement: "Merci la France!" Le football entretient les rapports humains, mais à ce point ce n'est pas fréquent. Comprenez mon étonnement.
Une explication clarifie très rapidement ce brusque engouement. "Merci, me font-ils comprendre, d'avoir formé notre nouvelle génération de joueurs dans vos centres de formation, réputés parmi les meilleurs du monde." Pour partie, la sélection marocaine, finaliste de la Coupe d'Afrique des nations, est composée de jeunes garçons soit issus de la deuxième génération, soit arrivés très tôt dans notre pays.
Du Maroc, ils ne connaissent pratiquement rien, ne parlent pas la langue; ils lui demeurent attachés par tradition familiale, par respect pour leurs parents et grands-parents. Ils possèdent une double culture, mais leur savoir dans le domaine du football, ils le doivent aux clubs français ou à ceux d'autres pays d'Europe qui ont mis à leur disposition un cadre pour exprimer et développer leurs talents de joueurs.
Sans complexe et sans inhibition
Badou Zaki, l'ancien grand gardien et désormais entraîneur de l'équipe du Maroc, a joué de ce savoir acquis en dehors du pays dont ils portent désormais le maillot avec fierté. Il a profité des qualités mentales de ces jeunes hommes qui ne doutent de rien. Affronter le Cameroun, le Nigeria, le Sénégal ou l'Afrique du Sud ne leur pose aucun problème. Ni complexe, ni inhibition. C'est ainsi que l'équipe a été portée par un esprit de conquête jusqu'à la finale.
Ce qui vaut pour le Maroc vaut tout autant pour l'Algérie. Il y a là comme une sorte de délocalisation des talents. Une bonne manière de restituer au continent africain, dans un domaine particulier, il est vrai, un peu de ce qu'on lui a pris. Un devoir de réciprocité, un juste retour des choses. Comme le disent les Marocains : "Beaucoup de ceux qui sont venus faire leurs études chez vous ne sont jamais rentrés chez nous. Ils sont médecins, informaticiens, scientifiques." Le football est une vitrine. Il ouvre peut-être une ère nouvelle.
En attendant, ce "Merci la France" tout de sincérité, si rarement entendu à l'étranger, flatte un peu notre ego patriotique. Merci les Marocains.
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Gérard Dreyfus 13/02/2004
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