Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Sierra Leone

Taylor et Compaoré accusés d'aider les rebelles

La commission des Nations Unies chargée d'enquêter sur les liens entre le trafic de diamants et le conflit sierra-leonais accuse le Liberia de soutenir activement les rebelles du Front révolutionnaire uni (RUF). Selon son rapport, non encore officiellement publié, le président Taylor est au c£ur du commerce d'armes et de diamants qui alimente le conflit dans ce petit pays d'Afrique de l'ouest. Le Burkina Faso est également cité comme l'une des principales voies d'approvisionnement en matériel militaire.
Charles Taylor est bien le principal soutien des rebelles sierra-léonais du Front révolutionnaire uni (RUF). C'est la conclusion d'une commission indépendante, mise en place par les Nations Unies en août dernier pour faire la lumière sur le trafic de diamants qui nourrit la guerre en Sierra Leone, qui vient d'achever ses travaux. Selon les enquêteurs, le chef de l'Etat libérien joue un rôle direct dans la poursuite des combats. Ils affirment en effet «avoir des preuves écrasantes que le Liberia apporte un soutien actif et à tous les niveaux au RUF» en lui fournissant armes, entraînement, soutien logistique et asile sûr.

Cette information n'est pas un scoop. Charles Taylor a toujours été considéré comme le parrain d'un mouvement dont les méthodes barbares rappellent les pratiques monstrueuses des combattants armés, durant la guerre civile qui a ensanglanté le Liberia de 1989 à 1997. Il est aussi soupçonné, depuis longtemps, de faire sortir les diamants des zones tenues par le RUF. Mais la confirmation de ces informations par un panel d'enquêteurs indépendants estampillés «ONU» est un sérieux camouflet pour l'ex-chef de guerre.

Un camouflet pour le président libérien

Dans une interview au quotidien français Le Monde, mi-novembre 2000, Taylor avait catégoriquement nié ces accusations en les retournant contre la Grande Bretagne, dont plusieurs centaines de soldats soutiennent l'armée gouvernementale sierra-léonaise. «La guerre en Sierra Leone est une guerre pour les diamants, mais pas parce que le Libéria veut des diamants. Cette guerre a lieu parce que les Britanniques veulent des gemmes», avait déclaré le président libérien. Il avait également fait allusion à des «officiels britanniques qui possèdent des mines en Sierra Leone au travers de sociétés à capitaux canadiens».

Outre ses accusations contre le Liberia, la commission apporte des éclaircissements sur l'implication d'autres pays dans le conflit. Le Burkina Faso notamment, dont le président était déjà montré du doigt dans un rapport de l'ONU publié en mars sur le trafic de diamants et de matériel militaire avec les guérilleros de l'Unita, est cité comme la principale voie d'approvisionnement en armes des rebelles du RUF.

Les enquêteurs recommandent donc l'instauration d'un embargo total sur les diamants en provenance du Liberia, jusqu'à ce que Monrovia montre de «manière convaincante» qu'elle n'est plus impliquée dans les trafics qui nourrissent la guerre. Mais ils demandent aussi la mise en place d'un «système de certification global» de provenance des gemmes. Et ils souhaitent, en attendant, l'extension du système déjà en place pour les pierres de Sierra Leone à tous les pays de l'Afrique de l'ouest, pour s'assurer qu'elles ne proviennent pas de zones rebelles. La Côte d'Ivoire et la Guinée, en particulier, sont fermement appelées à le faire dans les six mois sous peine de se voir imposer à leur tour un embargo.

Enfin, les enquêteurs des Nations Unies demandent au Conseil de sécurité de «trouver tous les moyens de restreindre les exportations d'armes, particulièrement en provenance d'Europe de l'Est», vers les zones de conflits. Plusieurs pays de cette partie du monde sont cités, dont l'Ukraine qui apparaissait déjà comme lieu de départ de cargaisons d'armes à destination de l'Unita dans le rapport des Nations Unies sur l'Angola. L'Ukraine fait d'ailleurs partie des Etats qui rechignent à la présentation officielle du rapport de la commission d'enquête sur la Sierra Leone devant le Conseil de sécurité. Celle-ci devait avoir lieu le 20 novembre, mais elle a été repoussée à une date indéterminée.



par Christophe  Champin

Article publié le 21/12/2000