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Expositions

Un voyage initiatique chez les Etrusques

Mystérieux, orientaux, et en tout domaine précurseurs des Romains. Les Etrusques se dévoilent quelque peu au palais Grassi de Venise, à l'occasion d'un exposition unique et historique. Pour la première fois y sont réunies des £uvres parfois inattendues, le plus souvent liées à la vie quotidienne, mais qui révèlent toujours la nature du pouvoir réel et des rapports de force d'une peuple qui a occupé le devant de la scène en Méditerranée occidentale dix siècles durant : du IXe siècle avant JC au 1er après JC.
Par le biais d'une trentaine de salles, qui sont en même temps des périodes, on parcourt tout naturellement les différentes étapes du pouvoir étrusque. De sa formation, lorsque ce peuple n'était qu'une société tribale, à son apogée, lorsque l'aristocratie étrusque a connu toute son opulence, avant de devenir une oligarchie ne songeant plus qu'à bien vivre. Ivre d'elle-même, elle va jusqu'à abandonner le pouvoir politique à la dernière des classes -les esclaves- pour ne se consacrer plus qu'aux différents plaisirs. Ce qui marque aussi le début du lent déclin d'un peuple de plus en plus obsédé par la mort et le culte des ancêtres. Le minuscule peuple latin commence alors à l'imiter, avant de prendre peu à peu sa place et d'intégrer tout ce qui a fait la grandeur des Etrusques. Leur «empire» allait de la Tyrrhénée à l'Adriatique, en passant par la Toscane et une partie du Latium, avant d'atteindre Bologne, Mantoue et le fleuve Pô vers le nord ; le Latium et la Campanie vers le sud.

Arrêtés dans leur progression par les Vénètes à l'est et les Ligures à lµouest, les Etrusques ont bâti leur pouvoir -et nourri leur esprit colonisateur- grâce à des techniques agricoles nouvelles, mais aussi la métallurgie, le fer et le bronze, qui ont véritablement fait leur fortune. Pourtant, ils doivent beaucoup aux Grecs. «On peut établir une comparaison avec la croissance du Japon qui s'est opérée par un mécanisme analogue, croit Mario Torelli, de l'Université de Pérouse : les Japonais d'aujourd'hui se sont aussi plus ou moins appropriés, comme les Etrusques, une culture différente -la culture occidentale- en l'adaptant à leurs goûts et à leurs propres besoins, et en la transformant en un instrument de pouvoir difficilement imitable».

Des pirates et des trafiquants de la Méditerranée

Pour plonger vite le visiteur dans la société étrusque, avant de l'engager dans une sorte de voyage initiatique dans l'Etrurie, le palais Grassi, situé sur le Grand Canal de la cité des doges, a été presque transformé en un palais étrusque. Son atrium -une sorte de corte vitrée située au rez-de-chaussée- est devenu un puits de lumière qui permet de s'attarder, ou de se reposer, avant d'entreprendre la montée des escaliers, passer par «l'étage noble» et parcourir l'histoire étrusque de tous les jours. Une histoire faite de banquets et de lits, de travail et de production artistique, de culture et de guerre, de conquêtes et de défaites, de plaisirs et de morts.

Urnes et chars funéraires, mais aussi bigues de promenade et vases clairement d'origine grecque témoignent aussi d'un autre aspect de la réussite des Etrusques: ceux-ci étaient d'abord des pirates et des trafiquants de la mer. Bref des thalassocrates, comme tant d'autres après eux, surtout en Méditerranée. On rappellera seulement la bataille navale qui les a opposé, en 540 avant JC aux côtés des Carthaginois, aux Phocéens qui ne voulaient pas perdre la ville de Massilia qu'ils venaient de fonder.

Hérodote a écrit que les Etrusques venaient de Lidye, une petite contrée située sur la côté égéenne de l'Asie mineure. Et, après lui, de nombreux autres historiens les qualifient de «peuple d'Orient». Pour d'autres ils étaient des vrais «autochtones». Mais, au-delà de cette vaine querelle, ils gardent toujours le secret de leur langue, même si celui de leur écriture, elle aussi d'origine grecque, commence à être percé.

Pour d'autres, il y a certes l'Etrurie du fer, qui a joué un rôle déterminant dans la naissance de la civilisation etrusque; mais il convient d'abord de rappeler que ce sont les Etrusques -bien avant les Romains- qui ont fait connaître aux Gaulois le plaisir -et les dangers- du vin. N'étaient-ils plus voluptueux que les Grecs ou les Romains réunis ?



par Elio  Comarin

Article publié le 24/01/2001