Maroc
Les droits de l'homme s'affichent à Casa
Pour la première fois de son histoire, la Fédération internationale des droits de l'Homme a décidé l'an dernier de tenir son congrès annuel dans un pays du monde arabe, une région pourtant réputée pour ses nombreuses violations des libertés. Patrick Baudoin, président de la FIDH, a demandé la levée de l'interdiction de trois hebdomadaires marocaines et appelé l'Europe à cesser «leur passivité complice» à propos de la situation des droits de l'homme en Tunisie.
De notre correspondante à Rabat
Si la FIDH a arrêté son choix sur le Maroc, c'est pour bien montrer qu'elle est extrêmement sensible aux efforts entrepris à la fin du règne du roi Hassan II pour promouvoir un état de droit et pour conforter le jeune roi Mohamed VI dans sa volonté annoncée de transformer en été le «printemps marocain» voulu par son père. Or, depuis novembre dernier, loin de s'acheminer vers l'été, ce printemps semble s'être tout à coup transformé en automne et s'acheminer vers l'hiver avec, coup sur coup, l'expulsion non motivée du correspondant de l'Agence France-presse, l'interdiction définitive des trois seuls hebdomadaires réellement indépendants du royaume et l'interdiction de toute manifestation accompagnée de dispersions violentes de ceux qui passent outre cette interdiction.
Cette «régression», comme l'a qualifiée la FIDH, n'a pas empêché la Fédération de tenir son 34ème congrès à Casablanca mais elle en a sensiblement modifié la signification. Et de satisfecit au régime marocain, ce congrès s'est transformé en manifestation de soutien au combat des ONG et de certains journalistes marocains pour le respect de la liberté d'expression et des droits de l'Homme.
Le jeune souverain, lors de la cérémonie d'ouverture, a certes fait lire une lettre dans laquelle il a réaffirmé son «intérêt particulier pour les droits de l'Homme» et sa volonté de «remédier aux violations qui ont entaché l'histoire des Marocains». Mais l'atmosphère n'y était pas. Le vieux militant de gauche Abraham Serfaty a refusé de venir au moment où le Maroc «connaît une grave régression» pour ne pas, a-t-il dit, se «trouver face» au Premier Ministre, et ce dernier, Abderrahmane Youssoufi, n'a fait qu'une brève apparition devant les congressistes sans prendre la parole.
«6 650 nuits dans le sinistre bagne de Tazmamart»
Celle-ci a donc été très vite donnée à neuf «témoins» de violations passées ou récentes des droits de l'homme. Neuf témoignages qui ont été autant de temps forts. Abderrahim Berrada, l'un des avocats de la famille Ben Barka, a ainsi exhorté le nouveau roi à «demander pardon» pour les atrocités commises pendant les années de plomb à entrer dans l'Histoire comme «M6 le juste ». Ahmed Marzouki, qui vient d'écrire «Tazmamart, cellule 10»« après avoir passé 6 550 nuits dans ce sinistre bagne à demandé à ce que les anciens tortionnaires soient au moins «désignés et privés de leurs droits civiques» à défaut d'être jugés, et Bachir Ben Barka a rappelé qu'il y avait toujours, «entre l'avenir et le passé, le cadavre de (son) père qu'il faudra bien un jour enterrer à travers la vérité». Et puis il y a eu aussi Abderrahmane Benhameur, le vieux et respecté militant, président de l'Association marocaine des Droits Humains, qui a rappelé que ses concitoyens étaient toujours privés du droit «d'élaborer un projet de constitution démocratique».
Mais le moment émotionnellement le plus fort a sans doute été celui où Aboubakr Jamaï, le directeur de deux des trois hebdomadaires interdits, est monté à la tribune annoncer sous les applaudissements des congressistes qu'il commençait immédiatement une grève de la faim qui ne s'arrêtera que lorsque les autorités cesseront, en violation des lois du Maroc, de l'empêcher de lancer un nouveau journal.
Me Patrick Baudoin, le président de la FIDH, a certes lancé un appel solennel au Premier ministre Abderrahmane Youssoufi lui demandant de lever immédiatement ces interdictions des trois hebdomadaires. Mais beaucoup craignent qu'il ne soit pas entendu.
Si la FIDH a arrêté son choix sur le Maroc, c'est pour bien montrer qu'elle est extrêmement sensible aux efforts entrepris à la fin du règne du roi Hassan II pour promouvoir un état de droit et pour conforter le jeune roi Mohamed VI dans sa volonté annoncée de transformer en été le «printemps marocain» voulu par son père. Or, depuis novembre dernier, loin de s'acheminer vers l'été, ce printemps semble s'être tout à coup transformé en automne et s'acheminer vers l'hiver avec, coup sur coup, l'expulsion non motivée du correspondant de l'Agence France-presse, l'interdiction définitive des trois seuls hebdomadaires réellement indépendants du royaume et l'interdiction de toute manifestation accompagnée de dispersions violentes de ceux qui passent outre cette interdiction.
Cette «régression», comme l'a qualifiée la FIDH, n'a pas empêché la Fédération de tenir son 34ème congrès à Casablanca mais elle en a sensiblement modifié la signification. Et de satisfecit au régime marocain, ce congrès s'est transformé en manifestation de soutien au combat des ONG et de certains journalistes marocains pour le respect de la liberté d'expression et des droits de l'Homme.
Le jeune souverain, lors de la cérémonie d'ouverture, a certes fait lire une lettre dans laquelle il a réaffirmé son «intérêt particulier pour les droits de l'Homme» et sa volonté de «remédier aux violations qui ont entaché l'histoire des Marocains». Mais l'atmosphère n'y était pas. Le vieux militant de gauche Abraham Serfaty a refusé de venir au moment où le Maroc «connaît une grave régression» pour ne pas, a-t-il dit, se «trouver face» au Premier Ministre, et ce dernier, Abderrahmane Youssoufi, n'a fait qu'une brève apparition devant les congressistes sans prendre la parole.
«6 650 nuits dans le sinistre bagne de Tazmamart»
Celle-ci a donc été très vite donnée à neuf «témoins» de violations passées ou récentes des droits de l'homme. Neuf témoignages qui ont été autant de temps forts. Abderrahim Berrada, l'un des avocats de la famille Ben Barka, a ainsi exhorté le nouveau roi à «demander pardon» pour les atrocités commises pendant les années de plomb à entrer dans l'Histoire comme «M6 le juste ». Ahmed Marzouki, qui vient d'écrire «Tazmamart, cellule 10»« après avoir passé 6 550 nuits dans ce sinistre bagne à demandé à ce que les anciens tortionnaires soient au moins «désignés et privés de leurs droits civiques» à défaut d'être jugés, et Bachir Ben Barka a rappelé qu'il y avait toujours, «entre l'avenir et le passé, le cadavre de (son) père qu'il faudra bien un jour enterrer à travers la vérité». Et puis il y a eu aussi Abderrahmane Benhameur, le vieux et respecté militant, président de l'Association marocaine des Droits Humains, qui a rappelé que ses concitoyens étaient toujours privés du droit «d'élaborer un projet de constitution démocratique».
Mais le moment émotionnellement le plus fort a sans doute été celui où Aboubakr Jamaï, le directeur de deux des trois hebdomadaires interdits, est monté à la tribune annoncer sous les applaudissements des congressistes qu'il commençait immédiatement une grève de la faim qui ne s'arrêtera que lorsque les autorités cesseront, en violation des lois du Maroc, de l'empêcher de lancer un nouveau journal.
Me Patrick Baudoin, le président de la FIDH, a certes lancé un appel solennel au Premier ministre Abderrahmane Youssoufi lui demandant de lever immédiatement ces interdictions des trois hebdomadaires. Mais beaucoup craignent qu'il ne soit pas entendu.
par A Rabat, Mounia DAOUDI
Article publié le 12/01/2001