Agriculture
Le label ne suffit pas à protéger les éleveurs
En matière de sécurité alimentaire, il n'y a rien de plus rassurant qu'un produit qui vient d'un élevage soumis à des conditions très surveillées d'alimentation et de soins , une garantie que donne un label. Mais les producteurs savent aujourd'hui que cela ne suffit pas à les protéger . Ils subissent par ricochet le contrecoup d'une perte de confiance des consommateurs.
Le boeuf fermier de race Aubrac porte un Label rouge: cela veut dire qu'il doit être élevé à une altitude minimum de 800 mètres, qu'il a un âge maximum de 108 mois et que sa nourriture est faite exclusivement d'herbe en été, de foin ou de fourrage en hiver. Les seuls compléments autorisés sont les céréales; les médicaments et le maïs sont à exclure. C'est ce que l'on appelle un cahier des charges et il est très sévère: il concerne un zonage très particulier entre le Cantal, l'Aveyron et la Lozère et quelques 600 éleveurs-sélectionneurs regroupés dans l'Upra Aubrac, Union pour la promotion et la sélection de la race. Le produit fini bénéficie d'une très forte image de marque liée au terroir et les consommateurs se remettent à manger cette viande. Si ces éleveurs sont malgré tout en difficulté, c'est à cause des consommateurs italiens.
Les promoteurs de la race Aubrac ne font pas que du b£uf. Ils produisent des veaux, des broutards de 12 à 14 mois, traditionnellement vendus et engraissés en Italie. Cela représente même 80% de leur activité. «Les Italiens sont les plus gros consommateurs de viande d'Europe. Avec la crise de la vache folle, cette consommation est tombée de 70%. Les engraisseurs ont leurs ateliers remplis d'une viande qu'ils ne vendent pas, ils ne commandent donc plus de broutards. Les bêtes restent dans nos étables, il faut les nourrir et cela entraîne un surcoût d'exploitation, d'autant que nous sommes en pleine période de vêlage, il faut de la place pour les nouveaux venus. Nous perdons actuellement 2000 à 2500F par mâle. Nous sommes obligés de vendre les bêtes à 9F le kilo, c'est 50% de perte» affirme Daniel Miquel, éleveur à Laguiole en Aveyron. Le label de qualité ne peut rien tant que le consommateur italien n'aura pas repris ses habitudes alimentaires. Et l'heure n'est pas à la confiance.
Doutes sur la brebis
La dernière recommandation de l'Afssa relance même l'inquiétude. L'Agence française de sécurité sanitaire des aliments suggère d'étendre les mesures de restriction de consommation aux ovins et aux caprins. Selon ce «principe de précaution», il ne faudrait plus consommer la cervelle, le crâne, les yeux et la moelle épinière des animaux de plus de six mois. Gilles Fregeat, de Rodez en Aveyron, directeur de l'Upra Lacaune qui rassemble 500 sélectionneurs de brebis et près de 4000 utilisateurs de reproducteurs craint par dessus tout l'effet psychologique que cela aura sur le consommateur. Il explique: «Nous commercialisons nos agneaux à quatre mois, la mesure proposée n'a aucune conséquence directe pour nous. Mais elle va mettre un doute dans l'esprit du consommateur: il va se méfier et s'il refuse nos produits, ça peut être fatal pour notre région. C'est une région défavorisée, sur les Causses, que voulez-vous faire d'autre que de l'élevage ovin?».
La brebis Lacaune représente 20% du cheptel ovin français avec ses 80000 laitières et 50000 brebis viande. Elle génère toute l'industrie du roquefort et autres fromages, de la peau pour la maroquinerie de luxe, de la laine exportée vers le Japon, pour les futons. Une désaffection du consommateur pourrait être préjudiciable à toutes ces filières. Mais le consommateur a besoin de temps pour redonner sa confiance, un temps dont disposent de moins en moins les producteurs.
Les promoteurs de la race Aubrac ne font pas que du b£uf. Ils produisent des veaux, des broutards de 12 à 14 mois, traditionnellement vendus et engraissés en Italie. Cela représente même 80% de leur activité. «Les Italiens sont les plus gros consommateurs de viande d'Europe. Avec la crise de la vache folle, cette consommation est tombée de 70%. Les engraisseurs ont leurs ateliers remplis d'une viande qu'ils ne vendent pas, ils ne commandent donc plus de broutards. Les bêtes restent dans nos étables, il faut les nourrir et cela entraîne un surcoût d'exploitation, d'autant que nous sommes en pleine période de vêlage, il faut de la place pour les nouveaux venus. Nous perdons actuellement 2000 à 2500F par mâle. Nous sommes obligés de vendre les bêtes à 9F le kilo, c'est 50% de perte» affirme Daniel Miquel, éleveur à Laguiole en Aveyron. Le label de qualité ne peut rien tant que le consommateur italien n'aura pas repris ses habitudes alimentaires. Et l'heure n'est pas à la confiance.
Doutes sur la brebis
La dernière recommandation de l'Afssa relance même l'inquiétude. L'Agence française de sécurité sanitaire des aliments suggère d'étendre les mesures de restriction de consommation aux ovins et aux caprins. Selon ce «principe de précaution», il ne faudrait plus consommer la cervelle, le crâne, les yeux et la moelle épinière des animaux de plus de six mois. Gilles Fregeat, de Rodez en Aveyron, directeur de l'Upra Lacaune qui rassemble 500 sélectionneurs de brebis et près de 4000 utilisateurs de reproducteurs craint par dessus tout l'effet psychologique que cela aura sur le consommateur. Il explique: «Nous commercialisons nos agneaux à quatre mois, la mesure proposée n'a aucune conséquence directe pour nous. Mais elle va mettre un doute dans l'esprit du consommateur: il va se méfier et s'il refuse nos produits, ça peut être fatal pour notre région. C'est une région défavorisée, sur les Causses, que voulez-vous faire d'autre que de l'élevage ovin?».
La brebis Lacaune représente 20% du cheptel ovin français avec ses 80000 laitières et 50000 brebis viande. Elle génère toute l'industrie du roquefort et autres fromages, de la peau pour la maroquinerie de luxe, de la laine exportée vers le Japon, pour les futons. Une désaffection du consommateur pourrait être préjudiciable à toutes ces filières. Mais le consommateur a besoin de temps pour redonner sa confiance, un temps dont disposent de moins en moins les producteurs.
par Caroline Koch
Article publié le 21/02/2001