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France

La «sécu pour tous»

Le dispositif de sécurité sociale pour tous mis en place en France depuis un an a permis aux plus pauvres de bénéficier de soins gratuits. Et parmi eux, nombre d'étrangers.
Il est Pakistanais, établi en France depuis trois ans, et il ne disposait jusqu'à aujourd'hui d'aucune assurance maladie pour couvrir ses soins, et ses consultations médicales, alors son employeur l'a envoyé au centre de sécurité sociale pour demander la couverture maladie universelle (CMU). Elle est Turque, mère au foyer, sa famille est inscrite à la CMU mais son fils de 25 ans, étudiant, ne l'est pas. Aidée de sa fille pour la traduction, elle écoute l'employé de la Sécurité sociale qui fait l'inventaire des pièces à fournir pour que le fils puisse s'assurer gratuitement: attestations de bourse et d'hébergement, cartes d'identité et d'étudiant.

Dans le bureau du centre Saint-Fargeau (dans le 20e arrondissement de Paris), les candidats défilent. Un an après son entrée en vigueur, la CMU draine encore beaucoup du monde. Parmi les bénéficiaires, il y a d'abord les Rmistes (titulaires du revenu minimum d'insertion) qui en bénéficient. Mais il y a aussi tous ceux qui étaient en situation de rupture de droit. «Les règles étaient tellement compliquées qu'ils ne se déplaçaient même pas, explique M. Lavie, le directeur du centre. Maintenant, c'est nous qui gérons directement leur cas.»

Aujourd'hui, ce n'est plus à l'usager de justifier ses droits ou de déchiffrer le langage codé du régime de la sécurité sociale, mais c'est à la caisse d'assurance maladie de lui faire valoir ses droits. Conséquence pour les ressortissants étrangers: il n'est plus nécessaire de se rendre à la Préfecture. Dès lors que l'on réside en France «de manière stable et régulière» et que l'on a des revenus inférieurs à 3600 francs par mois, il suffit de se présenter à un guichet de sécurité sociale pour demander la CMU.

Une émigration médicale ?

La médiatisation de la CMU sous l'appellation de «santé gratuite pour tous» a été relayée par un bouche à oreille efficace. L'information a conduit vers les centres de sécurité sociale une population d'origine immigrée établie en France ou nouvellement arrivée. C'est le cas de cette jeune Malienne enceinte qui a choisi la France pour la qualité des soins, ou encore de cet homme marié marocain venu pour la couverture sociale d'une parente fraîchement débarquée, et puis il y a les étudiants, libanais, américain. En l'absence de convention entre leurs pays et la France, la CMU leur offre une couverture médicale gratuite. Il y a enfin les réfugiés hébergés chez leur famille déjà établie. Dans certaines associations, des conseillers détachés par la Sécurité sociale délivrent directement la CMU à cette population en difficulté.

«Avec cette couverture maladie universelle, le système français est ce qui se fait de mieux parmi les pays européens, il offre les soins les plus adoptés», estime Hamidah Cheppih, conseillère au centre Lefebvre dans le 15e arrondissement de la capitale. De l'hôpital à la consultation médicale et la pharmacie, l'assuré ne débourse pas un centime. Le panier de soins est relativement généreux : cela va de la consultation chez un généraliste à la paire de lunette en passant par la cure thermale.

Une générosité qui fait craindre à certains la mise en place d'une émigration médicale. «On ne peut écarter ce phénomène qui a toujours existé même si en principe la loi l'exclut en imposant une condition de régularité et de stabilité de séjour de trois mois, commente Bernadette Moreau, chef du projet CMU à la CNAM. Un visa de tourisme de trois mois n'ouvre pas droit à la CMU même si on étudie la possibilité de donner une aide médicale en cas d'hospitalisation durant ces séjours».

Si la France n'a pas encore atteint le niveau de la Grande-Bretagne où existe une prise en charge immédiate à l'hôpital, reste que la CMU a considérablement simplifié la démarche pour la population émigrée. Dès lors que la procédure de demande de séjour est enclenchée, les droits sont ouverts. Les 900 réfugiés kurdes débarqués en France le 17 février dernier auront eu droit à la CMU une fois reçue leur convocation à la Préfecture pour déposer leur demande d'asile. Quatre jours à peine après leur arrivée.



par Caroline  DONATI

Article publié le 08/03/2001

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