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France Afrique

Bongo, Déby et Sassou déboutés

Le tribunal correctionnel de Paris a débouté les présidents du Congo, du Tchad et du Gabon de leur procès pour «outrage envers un chef d'Etat étranger», intenté à l'éditeur et à l'auteur du livre «Noir silence», un brûlot contre la politique africaine de la France.
«C'est une décision historique, une grande victoire pour la liberté d'expression», affirme, tout sourire François-Xavier Verschave à l'issue du jugement. L'auteur de Noir silence poursuit : «c'est une très grande victoire contre la machine judiciaire milliardaire. Nous souhaitions gagner, surtout pour ceux qui se battent dans leur propre pays, en Afrique. Un des bastions de la censure pour offense au chef de l'Etat vient de tomber. C'est une décision courageuse qui fait reculer la raison d'état».

Devant la 17e chambre du tribunal correctionnel, où de nombreux partisans et sympathisants de l'association Survie, que dirige François-Xavier Verschave, l'émotion est palpable et la joie partagée. «C'est un soulagement, une victoire du droit et une victoire pour les peuples africains», déclare un militant congolais de l'association citoyenne «Rupture solidarité», qui raconte avoir applaudi à l'annonce du jugement. «On espère que cela pourra servir de leçon et que c'est un pas vers l'impunité».

Ingérence dans les affaires africaines

De l'autre côté de la Seine, place du Châtelet, une trentaine de militants de Survie sont venus manifester leur soutien à l'auteur de «Noir Silence», bravant la pluie. Accrochés sur les poteaux, face à la fontaine de cette place en plein c£ur de Paris, des pancartes représentant la couverture du livre par lequel le scandale est arrivé.

Les présidents Idriss Déby (Tchad), Omar Bongo (Gabon) et Denis Sassou N'guesso (Congo Brazzaville), défendus par Me Jacques Vergès, demandaient la censure de plusieurs passages du livre. «Noir silence», qui fait suite à «Françafrique», dénonçait l'ingérence française dans les affaires africaines et les manipulations de grandes sociétés privées dans la diplomatie du continent.

Le président congolais est notamment accusé dans cet ouvrage de «crimes contre l'humanité» . Le dirigeant tchadien y est qualifié de «criminel invétéré» tandis que son homologue gabonais y est accusé de diriger «une démocrature» (contraction de démocratie et de dictature).

Les juges ont finalement considéré que les poursuites sur la base d' «offense à chefs d'états étrangers» (selon l'article 36 de la loi de 1881 relative à la liberté de la presse), étaient incompatibles avec le principe de la liberté d'expression défendu par la convention européenne des droits de l'homme. Quant à l'éditeur, il se félicite. Le livre «va pouvoir continuer de susciter le débat, d'éclairer les citoyens français et africains sur l'arrière-plan des affaires en cours et leur interconnexion».




par Sylvie  Berruet

Article publié le 25/04/2001