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Madagascar

L'année grise dans les universités

De grosses perturbations sociales ont affecté l'ensemble des universités malgaches, faisant planer le spectre d'une année blanche. Aujourd'hui, l'horizon se dégage dans le ciel universitaire, les examens vont se tenir dans les prochaines semaines. Mais la crise n'est toujours pas entièrement résolue.
De notre correspondant à Madagascar

C'est un véritable feuilleton qui s'est déroulé cette année dans les universités malgaches. Des épisodes à n'en plus finir, un dénouement qui tarde à venir. Dans l'ordre d'apparition : le SECES (syndicat d'enseignants-chercheurs), majoritaire, représenté dans les 6 universités malgaches. Pour lui donner la réplique, le ministère de l'enseignement supérieur. Et puis, des milliers de «figurants», les étudiants. En arrière-plan, un contexte de mécontentement social latent.

Dès la rentrée, en octobre 2000, les enseignants-chercheurs réclament une amélioration de leur statut. Pour faire entendre ses revendications, le SECES se met en grève. Le ministère ouvre des discussions, qui aboutissent, début janvier à la signature d'un protocole d'accord. «Bancal», estiment les grévistes, qui décident néanmoins de commencer l'année universitaire.

En toile de fond de cette année 2001, il y a aussi les échéances politiques. En mars, l'élection des sénateurs ; en juin, celle des gouverneurs. Et à l'horizon, se profile le scrutin présidentiel, prévu théoriquement à la fin de l'année. Quand la politique s'immisce à l'universitéà Sur la scène politique, le SECES est plutôt du côté de l'opposition. Ce qui explique sans doute, les rapports conflictuels avec le ministère de tutelle. Des tensions qui vont se cristalliser autour des postes de recteur de chaque université.

Dialogue de sourds à l'approche des élections


Le mandat de ces recteurs arrive à échéance en mars. Les autorités décident de reporter les élections. Le Secrétaire général du ministère de l'Enseignement supérieur, Rakotomanantsoa Rabenantoandro se justifie alors : «Si on va vers des élections actuellement, on risque de ne pas terminer l'année, compte tenu de toutes les effervescences inhérentes à un tel scrutin.» Et le ministère, de nommer arbitrairement des recteurs par intérim. Dans le même temps, le gouvernement réorganise, par décret, la procédure d'élection, afin d'avoir un droit de regard dans le futur scrutin.

Ce coup de théâtre en appelle un autre : les enseignants-chercheurs déclenchent, en mai, une grève générale, pour dénoncer ce que le président national du SECES, Jean-Théodore Ranjivason appelle «une atteinte grave à la liberté et à l'autonomie des universités».

Dès lors, c'est un dialogue de sourds, qui se radicalise au fil des semaines. Le gouvernement campe sur ses positions. Les grévistes descendent dans les rues. Certains étudiants prennent position pour ou contre le mouvement de contestation. A Fianarantsoa, les manifestants se heurtent aux forces de l'ordre. Le spectre d'une année blanche se fait alors de plus en plus menaçant. Evidemment, aucun des acteurs de ce conflit ne souhaite endosser une telle responsabilité.

Au bout du compte, les enseignants-grévistes mettent fin au suspense, en annonçant une reprise des cours pour début août. On approche du dénouement, avec l'organisation des examens, prévus dans les prochaines semaines. Cela ressemble à la fin d'un épisode. Mais ce n'est sans doute pas la fin du feuilleton. Le SECES vient d'annoncer son intention de geler les notes des prochains examens. Ne pas rendre public les résultats des épreuves, tant que les revendications syndicales n'auront pas été satisfaites. Revendications syndicales, revendications politiques... De nouveaux acteurs pourraient faire leur apparition : les candidats pour les prochaines élections présidentielles.



par Olivier  Péguy

Article publié le 29/08/2001