Kenya
L'amertume des victimes d'attentats
Le 7 août 1998 un camion bourré d'explosifs éclatait devant l'ambassade des Etats-Unis à Nairobi, faisant 213 morts. L'attentat était attribué à un groupe terroriste, suspecté d'être organisé par Oussama ben Laden
De notre correspondant en Afrique de l'Est
Un fonds de 43 millions de dollars a bien été débloqué par le gouvernement américain pour payer les factures d'hôpital des blessés et financer les indispensables opérations chirurgicales pour les cas les plus lourds. Mais rien, en revanche, n'a été prévu pour l'indemnisation des victimes ou de leur famille. Alors, 2800 kenyans, ont choisi, voici plus d'un an, de porter leur dossier devant la justice américaine, inspirés par des avocats de New York, dans l'espoir d'obtenir des compensations.
En effet, lorsqu'ils viennent assister à un atelier consacré aux douleurs dans le dos, les blessés de l'attentat contre l'ambassade américaine de Nairobi savent qu'ils n'obtiendront, au mieux, que des conseils. «Sachez que vous aurez mal toute votre vie», avertit froidement le médecin employé par l'Amref, une ONG basée au Kenya et dont le programme «d'assistance» est financé par le gouvernement américain. David Wangi, qui a perdu l'usage d'une main dans l'attentat, et dont la colonne vertébrale a été très touchée, prend consciencieusement des notes. Le programme s'arrêtera bientôt, faute de fonds, et rien n'a été prévu pour la suite. Comment vivre à Nairobi lorsque on est incapable de travailler?
Mais en dépit de son ressentiment, depuis les attentats du 11 septembre à New York et Washington, l'heure est plus à la commisération qu'aux récriminations: «Je suis terriblement amer de voir qu'un attentat se produit encore, et que nos souffrances n'auront servi à rien. Les responsables américains ont négligé de se pencher sérieusement sur la question des vrais responsables parce que les victimes n'étaient que des kenyans. Maintenant, c'est trop tard, de nouveaux innocents ont payé de leur vie».
Réactions «arrogantes»
Helen, fauchée pare des éclats de verre alors qu'elle passait dans le rue, murmure d'une voix étouffée: «Quand j'ai vu les images de l'attentat aux Etats-Unis, j'ai hurlé, je ne pouvais plus parler quand j'ai vu que cela recommençait. J'ai de la pitié pour ces gens qui souffrent comme nous avons souffert». Pour l'heure, les réclamations d'ordre financier ont également été mises en sourdine. Douglas Sidialo, qui a perdu ses deux yeux dans l'attentat, préfèrerait ainsi que «des bienfaiteurs payent des billets à quelques uns d'entre nous pour aller réconforter nos frères et s£urs américains qui souffrent».
Les réactions, jugées «arrogantes», voire «racistes» des Américains au lendemain de l'attentat, notamment de l'ambassadeur au Kenya, qui avait qualifié tous les volontaires venus offrir leur aide pour sortir les blessés des décombres de «pillards», ont été mises en parenthèses. Toutes les histoires de ces gueules cassées, se ressemblent, mélanges de petits hasards heureux et malheureux qui ont rencontrés, le 7 août 1998, un destin qui ne les concernait pas.
Souffrance et ressentiment mêlés, les victimes ne peuvent s'empêcher de songer qu'elles ont payé les pots cassés à cause de questions politiques qui ne les concernaient pas. Le pays compte l'une des plus importantes communautés américaines de la région, avec plus de 8000 personnes, et peut être considéré comme proche à la fois de Washington et Tel Aviv. Les policiers d'élite et les agents secrets bénéficient ainsi de l'expérience israélienne dans ces domaines.
Les quatre hommes arrêtés à ce jour et accusés d'avoir été les organisateurs des attentats contre les ambassades de Nairobi et Dar es Salaam en Tanzanie, ont tous été extradés vers les Etats-Unis, où un tribunal de New York les a condamnés à des peines de prison à vie en juillet. Un mois avant l'attentat contre le World Trade Center.
Un fonds de 43 millions de dollars a bien été débloqué par le gouvernement américain pour payer les factures d'hôpital des blessés et financer les indispensables opérations chirurgicales pour les cas les plus lourds. Mais rien, en revanche, n'a été prévu pour l'indemnisation des victimes ou de leur famille. Alors, 2800 kenyans, ont choisi, voici plus d'un an, de porter leur dossier devant la justice américaine, inspirés par des avocats de New York, dans l'espoir d'obtenir des compensations.
En effet, lorsqu'ils viennent assister à un atelier consacré aux douleurs dans le dos, les blessés de l'attentat contre l'ambassade américaine de Nairobi savent qu'ils n'obtiendront, au mieux, que des conseils. «Sachez que vous aurez mal toute votre vie», avertit froidement le médecin employé par l'Amref, une ONG basée au Kenya et dont le programme «d'assistance» est financé par le gouvernement américain. David Wangi, qui a perdu l'usage d'une main dans l'attentat, et dont la colonne vertébrale a été très touchée, prend consciencieusement des notes. Le programme s'arrêtera bientôt, faute de fonds, et rien n'a été prévu pour la suite. Comment vivre à Nairobi lorsque on est incapable de travailler?
Mais en dépit de son ressentiment, depuis les attentats du 11 septembre à New York et Washington, l'heure est plus à la commisération qu'aux récriminations: «Je suis terriblement amer de voir qu'un attentat se produit encore, et que nos souffrances n'auront servi à rien. Les responsables américains ont négligé de se pencher sérieusement sur la question des vrais responsables parce que les victimes n'étaient que des kenyans. Maintenant, c'est trop tard, de nouveaux innocents ont payé de leur vie».
Réactions «arrogantes»
Helen, fauchée pare des éclats de verre alors qu'elle passait dans le rue, murmure d'une voix étouffée: «Quand j'ai vu les images de l'attentat aux Etats-Unis, j'ai hurlé, je ne pouvais plus parler quand j'ai vu que cela recommençait. J'ai de la pitié pour ces gens qui souffrent comme nous avons souffert». Pour l'heure, les réclamations d'ordre financier ont également été mises en sourdine. Douglas Sidialo, qui a perdu ses deux yeux dans l'attentat, préfèrerait ainsi que «des bienfaiteurs payent des billets à quelques uns d'entre nous pour aller réconforter nos frères et s£urs américains qui souffrent».
Les réactions, jugées «arrogantes», voire «racistes» des Américains au lendemain de l'attentat, notamment de l'ambassadeur au Kenya, qui avait qualifié tous les volontaires venus offrir leur aide pour sortir les blessés des décombres de «pillards», ont été mises en parenthèses. Toutes les histoires de ces gueules cassées, se ressemblent, mélanges de petits hasards heureux et malheureux qui ont rencontrés, le 7 août 1998, un destin qui ne les concernait pas.
Souffrance et ressentiment mêlés, les victimes ne peuvent s'empêcher de songer qu'elles ont payé les pots cassés à cause de questions politiques qui ne les concernaient pas. Le pays compte l'une des plus importantes communautés américaines de la région, avec plus de 8000 personnes, et peut être considéré comme proche à la fois de Washington et Tel Aviv. Les policiers d'élite et les agents secrets bénéficient ainsi de l'expérience israélienne dans ces domaines.
Les quatre hommes arrêtés à ce jour et accusés d'avoir été les organisateurs des attentats contre les ambassades de Nairobi et Dar es Salaam en Tanzanie, ont tous été extradés vers les Etats-Unis, où un tribunal de New York les a condamnés à des peines de prison à vie en juillet. Un mois avant l'attentat contre le World Trade Center.
par A Nairobi, Jean-Philippe REMY
Article publié le 15/09/2001