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Attentats : la riposte

Les armes de l'offensive américaine

Alors que les frappes sur l'Afghanistan se poursuivent, l'offensive américaine est en train de prendre une nouvelle forme. Des hélicoptères et des avions d'attaques, opérant à basse altitude seraient entrés en scène.
Huit jours après le début des frappes sur l'Afghanistan, on relève une nette intensification des pilonnages : ainsi, pour la première fois, les techniciens n'ont pas pu rétablir l'électricité, après que la centrale de Kaboul, la capitale, ait été bombardée dans la nuit du lundi 15 au mardi 16 octobre. De source taliban, toujours, on affirme avoir comptabilisé pour la seule journée de lundi 130 sorties de l'US Air Force au dessus de leur fief de Kandahar, la grande ville au sud-est du pays. Et les appareils de l'US Army semblent se rapprocher du sol.

Les premiers hélicoptères ?

Si l'on en croit le responsable de l'information de Kaboul, des hélicoptères auraient participé à des raids dans la nuit du 15 au 16 octobre, sur la ville de Kandahar, un des fiefs taliban. Si cette information est confirmée, cela veut dire que la défense anti-aérienne commence à être moins dangereuse pour les appareils américains : ils peuvent se risquer en tout cas à des raids-surprise, et nocturnes, avec retrait rapide, en volant au dessous du seuil fatidique des quatre à cinq mille mètres, un espace aérien qui leur était jusque là interdit. Cela signifie aussi qu'après avoir visé surtout la destruction d'installations et d'armements, les militaires américains commencent à s'attaquer à des objectifs «humains». Et que ces hélicoptères, dont la portée est limitée, opèrent depuis des bases proches de la frontière afghane, au Pakistan et en Ouzbekistan.

AC 130, l'Hercules d'attaque

Autre indice de ce qu'on entre dans une phase différente du conflit : l'utilisation - pour la première fois aussi - d'un avion AC 130 : c'est la version d'attaque du quadrimoteur Hercules de transport lourd bien connu, chargé d'ordinaire des parachutages, des convoyages humanitaires, ou de l'action psychologique, mais dont il existe une version style «forteresse volante» : des armes automatiques crachent, depuis ses flancs, des projectiles de tous calibres. C'est une sorte « d'arroseur », dont les artilleurs, - qui voient directement leurs cibles, y compris de nuit, grâce à une optique infra-rouge - peuvent frapper avec grande précision, en environnement urbain, poursuivre des cibles au sol, faire la distinction avec des forces amies ou des civils - ce qui n'est pas le cas des frappes à longue distance. Cet appareil avait commencé sa carrière au Vietnam.

Les «bombes anti-bunker» GB 28

Les vague de frappes qui s'étaient succédées, dans la nuit de mercredi à jeudi la semaine dernière, très intenses, très rapprochées, plus lourdes et bruyantes que les précédentes - selon les témoignages - ne visaient plus seulement les batteries anti-aériennes et les aéroports, mais aussi des camps et garnisons talibans autour de Kaboul et de Kandahar. Des responsables militaires américains ont d'ailleurs indiqué que des «raids-surprise», très ciblés, allaient se multiplier.

Ces raids à haute altitude vont continuer, car la DCA des Taliban, en dépit de certaines déclarations optimistes, reste dangereuse au dessous de 3 000 mètres. Le Pentagone craint notamment les deux cent missiles portables de type «Stinger» - reliquat des stocks que la CIA américaine avait confié à la guérilla afghane, pour lutter contre l'armée soviétique.

Pour la première fois, la fameuse bombe lourde «anti-bunker», la « GB 28 », a également été utilisée contre un objectif en Afghanistan. Elle est de la classe des «penetrators», capable de percer le béton jusqu'à une épaisseur de 6 mètres, ou de s'enfoncer jusqu'à 30 mètres sous terre. Une arme expérimentée, lors de «Tempête du Désert» en 1991, pour tenter d'atteindre les responsables irakiens dans leurs centres de commandement.

Mais ce projectile, bien que très efficace, ne peut aller jusqu'au fond des grottes, et soulever des montagnes - celles où semblent abrités les responsables du groupe Ben Laden ou du régime Taliban. Raison de plus pour préparer la «phase 2», qui sera semi-terrestre, avec l'entrée en lice des hélicoptères d'assaut que les gros porteurs C-17 Globemaster ont acheminé, ces derniers jours, sur la base arrière de Khanabad, en Ouzbekistan. Ils ouvriraient la voie à une intervention du cinquième Groupe des Forces spéciales, également en cours de déploiement dans la région, seules à même d'entrer dans les grottes.

Les missiles de croisière Tomahawk

Les missiles Tomahawk, tirés depuis le début des frappes, avaient déjà été une arme privilégiée durant la guerre du Golfe, puis au Kosovo, ou lors de raids de représailles au Soudan. Ils ont une portée jusqu'à plus de 2000 km, dans certaines versions, volent à très basse altitude, et atteingent la cible avec une précision de quelques dizaines de mètres, grâce à des systèmes de navigation autonomes. Une trentaine d'objectifs stratégiques en Afghanistan ( contre un millier en Irak ou en Serbie), «méritent» ce type de projectiles. Le président Bush lui-même s'était interrogé, il y a deux semaines, sur l'opportunité de «lancer des missiles à 2 millions de dollars, pour qu'ils traversent une tente, avant de finir dans le cul d'un chameau».

Les bombardiers B-52, B1, B2

Ces missiles de croisière peuvent être tirés à partir d'un sous-marin, d'un croiseur ou destroyer, ou par des bombardiers lourds : les B-52, la fameuse «stratoforteresse» vedette du film Dr. Folamour , en service depuis 1954, qui décollent depuis l'atoll de Diego Garcia, au coeur de l'Océan Indien ; les B1, des appareils supersoniques à aile variable, qui pèsent plus de deux cent tonnes, et peuvent embarquer une vingtaine de Tomahawk; ou encore les quelques B2, baptisés «Esprit», dont la forme et la «peau» les rendent pratiquement indétectables par les radars, mais qui valent plus de deux milliards et demi d'euros l'unité.



par Philippe  Leymarie

Article publié le 16/10/2001