Arabie Saoudite
Mise en garde aux partisans de Ben Laden
Après des semaines de malaise et de silence, la famille régnante réagit publiquement au mouvement de sympathie en faveur de Ben Laden qui se propage dans le royaume wahhabite.
Dans une déclaration dont le caractère direct et public est sans précédent, le prince Nayef, ministre de l'Intérieur saoudien, a mis en garde les sujets saoudiens qui éprouveraient de la sympathie pour Oussama Ben Laden et son organisation, Al Qaïda. «N'oubliez pas que ceux qui se trouvent dans les grottes et les caches ont porté atteinte à votre pays. Malheureusement, ils sont comptés parmi les musulmans mais l'islam s'en dissocie». Le prince Nayef, qui est le frère du roi Fahd, s'est adressé aux services de sécurité du royaume, leur demandant de se montrer particulièrement vigilants à l'égard de «ceux qui tentent d'attenter à la sécurité au nom de l'islam, alors qu'ils ignorent cette religion ou ont été fourvoyés». Et de poursuivre : «Ces gens sont malades et ne peuvent être acceptés dans la société saoudienne, même s'ils en font partie. Quand un organe du corps est atteint d'une maladie, il peut être amputé». L'avertissement a d'ailleurs, semble-t-il, été précédé par des rafles parmi les anciens volontaires d'Afghanistan : une centaine d'entre eux auraient été arrêtés, à en croire l'un des porte-paroles de l'opposition islamique basée à Londres, Saad Al Faqih.
D'autres arrestations seraient intervenues lors de la dispersions de manifestations hostiles aux bombardements américains contre l'Afghanistan dans la ville de Sakaka, au nord de l'Arabie Saoudite (province de Jawf). D'autres manifestations auraient eu lieu à La Mecque. Mais ce qui a, semble-t-il, décidé le gouvernement saoudien à abandonner son mutisme, c'est la multiplication de fatwas émises par des responsables religieux, condamnant non seulement les frappes américaines, mais la position des gouvernements musulmans qui ne s'opposent pas à ouvertement Washington. C'est, à l'évidence, le cas de l'Arabie Saoudite. Le chef de file de ces chefs religieux est cheikh Hamoud Ben Oqla Al Chouaibi, un septuagénaire de Buraïda, dans le Nejd, la région d'où a surgi le wahhabisme au XVIIIe siècle, berceau de la famille Al Saoud qui a fondé le système actuel.
Le réveil de la contestation islamique
C'est déjà à Buraïda qu'en 1994, un puissant mouvement de contestation islamique d'essence wahhabite avait commencé de se propager, critiquant violemment la décision du roi Fahd d'autoriser la présence de soldats américains sur le sol saoudien. Les autorités avaient alors arrêté les meneurs, de jeunes chefs religieux proches à la fois de Ben Laden, et du grand mufti d'Arabie Saoudite de l'époque. La situation ayant été apaisée, ils avaient été remis en liberté durant l'été 1999.
Mais la crise actuelle a brutalement réveillé l'opposition islamique wahhabite au pouvoir des Saoud. L'écho rencontré par les prêches de Ben Laden et de ses partisans au sein de l'institution religieuse a conduit le ministre des Affaires religieuses à rappeler à l'ordre les chefs religieux, les rappelant à leur devoir d'obéissance à l'égard des dirigeants : «Leur désobéir est un péché grave», a martelé cheikh Saleh Al Cheikh. La situation est à ce point préoccupante que, dans son discours, le ministre de l'Intérieur a cru bon de dire aux officiers des services de sécurité de ne pas sympathiser avec la dissidence religieuse.
S'ajoute à cette crainte le fait que les dirigeants de Ryad ne peuvent ignorer que nombre des pirates de l'air du 11 septembre provenaient de la région de l'Assir de d'Abha, dans le sud-ouest du royaume, à la frontière du Yémen. Compte tenu du poids des partisans de Ben Laden dans les tribus du nord du Yémen, de l'autre côté de la frontière, il y a dans cette protestation de nature tant politique que régional de quoi se faire du souci pour le pouvoir de Ryad.
D'autres arrestations seraient intervenues lors de la dispersions de manifestations hostiles aux bombardements américains contre l'Afghanistan dans la ville de Sakaka, au nord de l'Arabie Saoudite (province de Jawf). D'autres manifestations auraient eu lieu à La Mecque. Mais ce qui a, semble-t-il, décidé le gouvernement saoudien à abandonner son mutisme, c'est la multiplication de fatwas émises par des responsables religieux, condamnant non seulement les frappes américaines, mais la position des gouvernements musulmans qui ne s'opposent pas à ouvertement Washington. C'est, à l'évidence, le cas de l'Arabie Saoudite. Le chef de file de ces chefs religieux est cheikh Hamoud Ben Oqla Al Chouaibi, un septuagénaire de Buraïda, dans le Nejd, la région d'où a surgi le wahhabisme au XVIIIe siècle, berceau de la famille Al Saoud qui a fondé le système actuel.
Le réveil de la contestation islamique
C'est déjà à Buraïda qu'en 1994, un puissant mouvement de contestation islamique d'essence wahhabite avait commencé de se propager, critiquant violemment la décision du roi Fahd d'autoriser la présence de soldats américains sur le sol saoudien. Les autorités avaient alors arrêté les meneurs, de jeunes chefs religieux proches à la fois de Ben Laden, et du grand mufti d'Arabie Saoudite de l'époque. La situation ayant été apaisée, ils avaient été remis en liberté durant l'été 1999.
Mais la crise actuelle a brutalement réveillé l'opposition islamique wahhabite au pouvoir des Saoud. L'écho rencontré par les prêches de Ben Laden et de ses partisans au sein de l'institution religieuse a conduit le ministre des Affaires religieuses à rappeler à l'ordre les chefs religieux, les rappelant à leur devoir d'obéissance à l'égard des dirigeants : «Leur désobéir est un péché grave», a martelé cheikh Saleh Al Cheikh. La situation est à ce point préoccupante que, dans son discours, le ministre de l'Intérieur a cru bon de dire aux officiers des services de sécurité de ne pas sympathiser avec la dissidence religieuse.
S'ajoute à cette crainte le fait que les dirigeants de Ryad ne peuvent ignorer que nombre des pirates de l'air du 11 septembre provenaient de la région de l'Assir de d'Abha, dans le sud-ouest du royaume, à la frontière du Yémen. Compte tenu du poids des partisans de Ben Laden dans les tribus du nord du Yémen, de l'autre côté de la frontière, il y a dans cette protestation de nature tant politique que régional de quoi se faire du souci pour le pouvoir de Ryad.
par Olivier Da Lage
Article publié le 19/10/2001