Cuba
Le moustique, cet ennemi de la Revolución
A Cuba, le début d’une épidémie de dengue met les pouvoirs publics en alerte. Le régime castriste mobilise tous ses relais pour éradiquer le moustique qui provoque des accès de fièvre. Reportage à la Havane.
De notre correspondante à la Havane
Dans la chaleur moite d’une fin de journée de décembre, un petit homme muni d’un mégaphone, arpente les rues d’un quartier populaire de la Havane. «Attention, attention! Appel à la population. Ce soir réunion d’information sur l’épidémie de fièvre dengue. Rendez-vous au parc, à 20 heures». Lui, c’est le délégué du pouvoir populaire. Il a été élu (ou plutôt désigné par le Parti comme étant le meilleur candidat à élire) pour représenter son quartier au sein de l’Assemblée nationale populaire, mais surtout, pour faire respecter les décisions politiques prises en haut lieu. Pour une fois, la réunion n’est pas obligatoire, mais beaucoup iront, car depuis plusieurs semaines, l’inquiétude s’amplifie. Tout vient de la rumeur, car aucun chiffre n’a été publié sur le nombre de malades de la dengue, de peur d’affoler les touristes. Mais une chose est certaine, les cas ne cessent de se multiplier.
Il est vingt heures, tout le quartier est réuni autour de Carmen et Maïté les deux médecins de famille de la zone. Ici, tout le monde les connaît, car depuis la révolution castriste, chaque quartier possède son propre dispensaire. Après avoir décrit les symptômes de la maladie, elles expliquent comment enrayer l’épidémie, propagée par le moustique Aedes aegypti: «ne laissez traîner aucun récipient d’eau pour éviter que les moustiques ne se reproduisent». Fuites, bassines laissées à l’abandon dans les cours où se dépose l’eau de pluie, ou encore verres d’eau spirituels dédiés aux esprits protecteurs, sont les premiers sur la liste. «Changez l’eau de vos verres spirituels tous les jours» concluent-elles, «les esprits apprécieront et cela empêchera les larves de moustiques de se développer».
«Ils volent l‘essence et revendent l’insecticide»
Après la médecine de proximité, c’est l’éducation, l’autre fierté de la révolution cubaine, qui s’active pour enrayer l’épidémie. «Vos enfants vous aideront à débusquer les foyers infectieux», assure le délégué politique, «leurs professeurs leur ont appris à être vigilants, car l’épidémie ne pourra être vaincue que si tout le monde s’y met». «Mais le meilleur moyen», enchaîne-t-il, «c’est la fumigation régulière des maisons». Là, des voix s’élèvent. Car si en théorie l’Etat assure gratuitement la fumigation des foyers, la réalité est toute autre. «Ils passent une fois sur deux!», s’exclame une vielle dame. «Bien sûr, ils volent l’essence du fumigateur et revendent l’insecticide!», enchaîne une autre. L’assemblée confirme bruyamment. «Il faut faire appel à l’armée», lance un grand père, «eux au moins respectent les consignes». Le délégué du pouvoir populaire note consciencieusement la proposition. Il est 21h00, la réunion se termine. Mais dans la nuit, ce sont les organisations politiques de tout le pays qui se préparent pour cette nouvelle bataille livrée par la révolution: «Mort aux moustiques».
Le lendemain, ce sont des contingents de volontaires communistes qui se chargent de la fumigation des maisons. Impossible d’y échapper. Fidel Castro a donné des ordres: «toutes les maisons du pays doivent être traitées cette semaine. La dengue doit être vaincue». Branle-bas de combat dans tous le pays: dans les rues comme dans les maisons, toutes les fuites sont répertoriées et réparées. Sur les terrasses, les réservoirs d’eau sont inspectés et traités un par un pour éradiquer les larves de moustique, alors que la fabrication de couvercles s’accélère, pour être distribués gratuitement à la population. Enfin, tout le monde est appelé à nettoyer cours, jardins, hangars et autres entrepôts pour supprimer les foyers de reproduction des moustiques. A Cuba c’est le grand nettoyage. Une nouvelle bataille est en route. Cela ne fait aucun doute, ce n’est pas un petit moustique qui aura raison du grand Fidel.
Dans la chaleur moite d’une fin de journée de décembre, un petit homme muni d’un mégaphone, arpente les rues d’un quartier populaire de la Havane. «Attention, attention! Appel à la population. Ce soir réunion d’information sur l’épidémie de fièvre dengue. Rendez-vous au parc, à 20 heures». Lui, c’est le délégué du pouvoir populaire. Il a été élu (ou plutôt désigné par le Parti comme étant le meilleur candidat à élire) pour représenter son quartier au sein de l’Assemblée nationale populaire, mais surtout, pour faire respecter les décisions politiques prises en haut lieu. Pour une fois, la réunion n’est pas obligatoire, mais beaucoup iront, car depuis plusieurs semaines, l’inquiétude s’amplifie. Tout vient de la rumeur, car aucun chiffre n’a été publié sur le nombre de malades de la dengue, de peur d’affoler les touristes. Mais une chose est certaine, les cas ne cessent de se multiplier.
Il est vingt heures, tout le quartier est réuni autour de Carmen et Maïté les deux médecins de famille de la zone. Ici, tout le monde les connaît, car depuis la révolution castriste, chaque quartier possède son propre dispensaire. Après avoir décrit les symptômes de la maladie, elles expliquent comment enrayer l’épidémie, propagée par le moustique Aedes aegypti: «ne laissez traîner aucun récipient d’eau pour éviter que les moustiques ne se reproduisent». Fuites, bassines laissées à l’abandon dans les cours où se dépose l’eau de pluie, ou encore verres d’eau spirituels dédiés aux esprits protecteurs, sont les premiers sur la liste. «Changez l’eau de vos verres spirituels tous les jours» concluent-elles, «les esprits apprécieront et cela empêchera les larves de moustiques de se développer».
«Ils volent l‘essence et revendent l’insecticide»
Après la médecine de proximité, c’est l’éducation, l’autre fierté de la révolution cubaine, qui s’active pour enrayer l’épidémie. «Vos enfants vous aideront à débusquer les foyers infectieux», assure le délégué politique, «leurs professeurs leur ont appris à être vigilants, car l’épidémie ne pourra être vaincue que si tout le monde s’y met». «Mais le meilleur moyen», enchaîne-t-il, «c’est la fumigation régulière des maisons». Là, des voix s’élèvent. Car si en théorie l’Etat assure gratuitement la fumigation des foyers, la réalité est toute autre. «Ils passent une fois sur deux!», s’exclame une vielle dame. «Bien sûr, ils volent l’essence du fumigateur et revendent l’insecticide!», enchaîne une autre. L’assemblée confirme bruyamment. «Il faut faire appel à l’armée», lance un grand père, «eux au moins respectent les consignes». Le délégué du pouvoir populaire note consciencieusement la proposition. Il est 21h00, la réunion se termine. Mais dans la nuit, ce sont les organisations politiques de tout le pays qui se préparent pour cette nouvelle bataille livrée par la révolution: «Mort aux moustiques».
Le lendemain, ce sont des contingents de volontaires communistes qui se chargent de la fumigation des maisons. Impossible d’y échapper. Fidel Castro a donné des ordres: «toutes les maisons du pays doivent être traitées cette semaine. La dengue doit être vaincue». Branle-bas de combat dans tous le pays: dans les rues comme dans les maisons, toutes les fuites sont répertoriées et réparées. Sur les terrasses, les réservoirs d’eau sont inspectés et traités un par un pour éradiquer les larves de moustique, alors que la fabrication de couvercles s’accélère, pour être distribués gratuitement à la population. Enfin, tout le monde est appelé à nettoyer cours, jardins, hangars et autres entrepôts pour supprimer les foyers de reproduction des moustiques. A Cuba c’est le grand nettoyage. Une nouvelle bataille est en route. Cela ne fait aucun doute, ce n’est pas un petit moustique qui aura raison du grand Fidel.
par Karen DONADEL
Article publié le 24/01/2002
