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Australie

Révolte dans le «goulag du désert»

Des centaines de clandestins détenus en Australie méridionale menacent de suicider collectivement, et par tous les moyens, si ce «camp de la honte» n’est pas fermé.
Plus de 200 demandeurs d’asile politique du centre de Woomera, en Australie méridionale, ont entamé ce mardi leur 14ème jour de grève de la faim, tandis qu’une dizaine de jeunes afghans âgés de douze à dix-sept ans menaçaient de se donner la mort, si on ne procédait pas à leur transfert. Dans ce « camp » situé en plein désert plusieurs demandeurs d’asile du Proche et Moyen-Orient ont déjà tenté de se pendre, d’ingurgiter du désinfectant ou de coudre leurs lèvres pour protester contre leurs conditions de détention et la lenteur des procédures d’examen de leurs dossiers.

Selon un récent témoignage, ces demandeurs d’asile sont souvent des ingénieurs, des informaticiens ou des professeurs d’université «qui doivent subir les insultes des gardes qui leur font sentir qu’il ne sont pas les bienvenus en Australie». Souffrant le plus souvent d’angoisse et dépression, mal nourris et soumis à des températures dépassant les 40 degrés, ces détenus ont entamé une véritable révolte, pour obliger les autorités australiennes à fermer ce «camp de la honte» et infléchir une politique d’immigration parmi les plus strictes de la planète.

Des dizaines de clandestins se sont cousu les lèvres


Pour empêcher les suicides et les automutilations, les miroirs ont été retirés, mais les détenus de Woomera ont déjà trouvé d’autres moyens de protester : certains absorbent du shampooing ou du détergent, d’autres se jettent sur les barbelés qui entourent cet établissement. Neuf détenus ont toujours leurs lèvres cousues, mais trente-cinq autres ont souhaité ce mardi que leurs points de suture soient enlevés, en signe de bonne volonté vis-à-vis d’une Commission consultative mis en place par le gouvernement, qui vient de demander à son tour la fermeture du centre de Woomera et le déplacement des clandestins, à cause des risques de «tragédie humaine aux proportions non prévisibles». Pour éviter cette «tragédie qui s’annonce» cette commission a préconisé un traitement plus humain des détenus «dans les limites du possible, compte tenu de l’austérité de l’environnement lugubre du centre de Woomera».

Mais le gouvernement ne compte pour autant pas céder aux pressions des grévistes de la faim. Il a confirmé mardi qu’il envisageait d’expulser 67 détenus de ce centre, parce qu’ils sont soupçonnés d’être les meneurs de la grève de la faim en cours. Et ce en dépit des manifestations qui ont eu lieu ce week-end à Melbourne et à Sydney devant d’autres centres de rétention de clandestins. Le premier ministre John Howard a rejeté tous les appels en faveur d’un assouplissement de sa politique envers les immigrants. Selon lui, la dureté des conditions de vie dans les cinq camps doit servir à décourager l’immigration clandestine vers l’Australie : un territoire de plus de sept millions et demi de kilomètres carrés (14 fois plus que la France), et habité par dix-huit millions d’habitants seulement.




par Elio  Comarin

Article publié le 29/01/2002