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Santé

Les Français ne vont pas tous bien

D’un point de vue général, les Français vont bien. Toutefois, plus on y regarde de près, et plus les inégalités s’accroissent en matière de santé. Si la France bat les records d'espérance de vie dans l'Union européenne, elle a cependant été incapable de réduire les inégalités depuis ces dernières 25 années. C’est le paradoxe que relève le rapport triennal du Haut Comité de la santé publique (HCSP).
Certes, la France bat des records d'espérance de vie dans l'Union européenne. Mais le «cocorico» n’est pas vraiment de mise. Les inégalités stagnent en matière de santé, qu’elles soient de nature géographique, sociale ou liée au sexe. C’est ce que dénonce le rapport sur la santé des Français, qui définit ainsi le «paradoxe français.»

Cette étude, la troisième depuis la création du Haut Comité de la santé publique (HCSP), il y a dix ans, rapporte qu’avec encore plus de 16 ans à vivre pour les hommes âgés de 65 ans, et vingt pour les femmes du même âge, la France arrive en tête des pays européens. «Avec 78 ans d'espérance de vie à la naissance, la France se place loin devant de très nombreux pays au développement comparable dans le monde», ajoutent les experts de la santé publique et la Direction générale de la santé qui ont constitué ce document de 400 pages.

Les résultats d'ensemble sont très positifs, si l’on en croit les auteurs de ce rapport: la baisse de la consommation d’alcool ou encore la diminution de la mortalité par maladies cardio-vasculaires en sont des signes pregnants. Le rapport relève également une amélioration de l’accès aux soins, notamment grâce à la couverture maladie universelle (CMU) mise en place il y a deux ans en vue d’offrir une mutuelle aux plus démunis.

Toutefois, la France serait en quelque sorte victime de son succès. Le rapport fait apparaître comme «paradoxales et même inacceptables» la persistance d’inégalités. Ces dernières «ne régressent pas» en dépit de dépenses publiques consacrées à la santé qui figurent parmi les plus élevées du monde.

La mortalité des ouvriers trois fois supérieure à celle des cadres

Les inégalités relevées par le Comité de la santé publique sont d’abord d’origine sociale, le niveau de santé des cadres étant bien supérieur à celui des ouvriers. La mortalité des ouvriers et des employés est près de trois fois supérieure à celle des cadres et la différence d'espérance de vie des hommes de 35 ans appartenant à ces deux catégories sociales atteint 6,5 années. Dans la même veine, le taux de prématurité varie du simple au triple en fonction du niveau scolaire de la mère. De surcroît, 32 % des Maghrébins et 54 % des Africains résidant en France ignorent leur séropositivité au moment où ils tombent malades du sida, contre 21 % des personnes de nationalité française.

Géographiquement, l'espérance de vie à la naissance varie de plus de dix ans entre le Nord et le Sud. Ce type d’inégalités s’est même accru entre 1975 et 1990. A titre d’ exemple: l'obésité des jeunes hommes. Sa fréquence, qui a globalement doublé en dix ans, est nettement plus marquée dans les zones rurales qu'urbaines avec, aux extrêmes, un rapport de 1 à 3 entre l'Ile-de-France et la Corse.

L’inégalité liée au sexe s’inscrit surtout, quant à elle, au niveau de la mortalité prématurée. L’écart d’espérance de vie entre hommes et femmes se manifeste notamment par un comportement à risques, plus courant chez la gente masculine que féminine.

Ces disparités françaises, selon le rapport, s’expliquent par une politique de santé principalement axée sur l’accès aux soins «plutôt qu’une promotion de la santé». Cette orientation explique de meilleurs résultats concernant les maladies qui peuvent être soignées par les médicaments, contrairement aux maladies comme le cancer du poumon.ou la cirrhose du foie. Le rapport critique également le mode gestion et l’organisation du système de santé en France, qui, à force de complexité, en devient «opaque».



par Céline  Boileau

Article publié le 01/02/2002