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Népal

Combats meurtriers entre armée et maoïstes

Les affrontements entre l’armée népalaise et les rebelles ont fait des centaines de morts en une semaine, contraignant le gouvernement de Katmandou à demander l’aide des États-Unis.
Aucune perspective de reprise des négociations, combats d’une extrême violence, bilans très lourds, arrivée d’experts militaires américains: le conflit qui oppose les forces gouvernementales népalaises à la guérilla maoïste a connu ces derniers jours une intensification brutale. Dans la nuit de mardi à mercredi, quelque 140 policiers et soldats ont été tués dans l'ouest du pays, lors d'une contre-offensive de la rébellion dans une région où elle est assiégée par les forces gouvernementales. Mardi soir, peu avant minuit, des rebelles ont encerclé un poste de la police et de l'armée à Gama, dans le district de Rolpa, le berceau de la guérilla situé à 300 km à l'ouest de Katmandou. Selon les responsables locaux, 45 des 185 hommes qui étaient en patrouille ont échappé à l'assaut. Mais les 105 policiers et 35 militaires présents sont morts dans les combats qui ont duré plus de quatre heures.
Le même jour, 32 personnes étaient tuées dans un autre incident armé, dans le nord-est du pays.

Mais c’est la semaine dernière que le conflit a connu, en six ans, son épisode le plus meurtrier. Quelque 550 rebelles maoïstes ont été tués dans une vaste offensive gouvernementale, les forces terrestres et aériennes menant une série d'attaques. C’est le bilan le plus lourd depuis le début de la «guerre du peuple» lancée il y a six ans par la rébellion, pour renverser la monarchie constitutionnelle et instaurer un régime communiste au Népal. La plupart des victimes ont été tuées vendredi et samedi dans l'assaut d'un camp de l'ouest du Népal, où quelque 800 guérilleros étaient rassemblés pour des entraînements. Les combats se sont déroulés à Lisne dans le même district de Rolpa, région de jungle et bastion des insurgés. Par ailleurs, dans le district de Sankhuwa Sabha, à quelque 400 km au nord-est de Katmandou, des maoïstes ont attaqué un poste de sécurité. Selon des responsables dans la capitale, 28 rebelles ont été tués ainsi que quatre policiers.

«Gouvernements du peuple»

Ces affrontements se sont déroulés peu après que le Premier ministre népalais, Sher Bahadur Deuba, en visite à Washington, eut rencontré le président George W. Bush et dit avoir obtenu son soutien dans la lutte contre la rébellion. «Je suis très content, très satisfait, a déclaré le dirigeant népalais. Le président Bush apporte un soutien solide à notre campagne contre le terrorisme et nous a assurés qu'il nous aiderait de multiples façons». Un responsable du département d'Etat a expliqué que Washington étudiait «les moyens d'aider le Népal, à la fois sur le plan de la sécurité militaire et en terme d'aide au développement».

Concrètement, l'administration Bush a déjà demandé au Congrès d'accorder une aide militaire de 20 millions de dollars (22 millions d’euros) à Katmandou. Une douzaine d'experts militaires américains ont effectué récemment une tournée dans l'ouest du Népal pour évaluer les besoins. «Le Népal affronte une rébellion maoïste et le Népal est un exemple de démocratie et les Etats-Unis se sont engagés à l'aider», a expliqué mardi le porte-parole de la Maison Blanche, Ari Fleischer. En janvier dernier, le secrétaire d’État Colin Powell était venu au Népal exprimer son soutien la lutte du gouvernement. Katmandou a également demandé l'aide d'autres pays, dont la Grande-Bretagne, la Russie et l'Inde.

Le Népal vit sous état d’urgence depuis le 26 novembre 2001, après que la guérilla, dirigée par Pushpa Kamal Dahal, alias Prachanda, a rompu des négociations entamées trois mois plus tôt avec Sher Bahadur Deuba, lequel venait d’être nommé. La reprise des hostilités a alors fait près de 300 morts en trois jours. Depuis, le chef du gouvernement refuse toute reprise des pourparlers tant que la guérilla n'aura pas déposé les armes. En six ans de «guerre du peuple» dans ce petit pays coincé entre l’Inde et la Chine, plus de 3 800 personnes ont trouvé la mort. La rébellion, forte d’environ 7000 membres, a gagné du terrain, parvenant, grâce à l’appui de la frange la plus pauvre de la population, à administrer de fait une dizaine de districts où fonctionnent des «gouvernements du peuple».



par Philippe  Quillerier-Lesieur

Article publié le 08/05/2002