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Kurdistan irakien

Mala Krekar: le chaînon manquant entre Ben Laden et Saddam Hussein ?

Arrêté le 12 septembre à Amsterdam, le dirigeant kurde irakien Mala Krekar est soupçonné par les Etats-Unis de servir de lien entre Al-Qaïda et le régime de Saddam Hussein. Lâché par l’Iran qui le soutenait, le chef du mouvement islamiste radical Ansar Al Islam, a effectué plusieurs séjours en Afghanistan. Notre envoyé spécial au Kurdistan irakien a voulu en savoir plus.
De notre envoyé spécial au Kurdistan irakien

Agé de 47 ans, Mala Krekar est né dans le petit village d’Oularlou, dans la région de Chouarta, près de Souleimania au Kurdistan irakien. Après avoir terminé ses études secondaires, et deux années d’université, il a milité pendant un certain temps au sein de «Komala», une organisation marxiste-léniniste kurde de tendance maoïste. En 1985-1986, il a basculé dans l’islamisme, et est parti en Afghanistan. On le retrouve successivement dans des organisations proches de Hekmatyar, puis chez les Taliban, et enfin, affirment nos informateurs kurdes, au sein d’Al Qaïda.

Tous ceux qui l’ont connu le décrivent comme un colosse, barbu à l’afghane, toujours bardé de bandes de munitions, portant une kalachnikov qui sur lui a l’air d’un pistolet... C’est un homme qui a beaucoup lu, et c’est un excellent orateur: «Quand il prêchait dans une mosquée pour la prière du vendredi, il pouvait faire pleurer tout son auditoire», raconte un chef kurde qui l’a souvent rencontré à partir de la fin 1993, quand a commencé le conflit entre l’UPK (Union patriotique du Kurdistan) de Jelal Talabani et les islamistes. L’homme raconte aussi que Mala Krekar est en fait aussi un «homme assoiffé de pouvoir, qui voulait être le chef», un homme qui donnait des ordres, des fatwas -mais aussi un homme qui évitait d aller au combat. «Personne ne l’a jamais vu sur un champ de bataille», confirme cheikh Jaffar Barzinji.

Lâché par l’Iran

Son programme politique tient en quelques mots: instaurer une «République islamique du Kurdistan». Mais, selon nos informateurs kurdes, il n’en avait pas les moyens, et «il prenait ses ordres ailleurs, à Londres et en Afghanistan». Quel rôle jouait la violence dans sa stratégie? Selon un autre chef kurde qui l’a bien connu, Mala Krekar disait souvent: «Nous devons convaincre les gens par la parole, non par la force». Mais je suis obligé d’utiliser ces groupes fondamentalistes pour me protéger».

En fait, selon la plupart des observateurs kurdes, Mala Krekar est un homme qui tient un double langage, et qui a approuvé le massacre de Kheli Khama, le 23 septembre 2001 : Ce jour là, 42 pechmergas de l’UPK ont été égorgés comme des moutons par les combattants d’Ansar al Islam.

Son arrestation à Amsterdam il y a quelques jours est un coup terrible pour tous ses partisans et alliés: ils réalisent avec effroi que les Iraniens qui l’ont «donné» aux services occidentaux ne veulent plus, ou ne peuvent plus les protéger. Et qu'ils sont sous la menace d’une attaque américaine. Les islamistes les plus modérés recherchent la protection des chefs kurdes qu’ils combattaient il y a encore peu de temps, tandis que les plus extrémistes dispersent leurs forces et cachent leurs stocks de munitions et de vivres dans des grottes le long de la frontière iranienne.



par Chris  Kutschera

Article publié le 20/09/2002