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Droit de l’Internet

Double revers pour l’industrie du disque

Coup sur coup, ces derniers jours, deux autorités judiciaires, la Cour Suprême des Pays-Bas et une Cour d’appel fédérale américaine ont rendu des décisions en faveur des réseaux d’échange de fichiers sur Internet dit «peer-to-peer». Ces jugements sont un sérieux revers pour la campagne contre le piratage lancée par l’Association américaine de l’industrie phonographique (RIAA) qui défend les intérêts des grandes maisons de disques.
Première affaire: la Cour de Suprême néerlandaise a estimé que Kazaa, le premier service mondial d’échange de fichiers peer-to-peer était légal au titre que le site ne faisait que fournir le logiciel et ne pouvait être tenu pour responsable des pratiques illégales de certains de ses usagers. Extrêmement populaire, le logiciel Kazaa -comme son prédécesseur Napster- permet aux internautes de télécharger et d’échanger gratuitement de la musique, des films et des jeux vidéo sur Internet. En octobre dernier, le très sérieux cabinet d’études Nielsen-NetRatings dénombrait plus de 18 millions le nombre d’utilisateurs européens et américains de ce service.

Dans la seconde affaire, la Cour d’appel du District de Columbia a décidé que l’industrie du disque ne pouvait pas forcer les fournisseurs d’accès à Internet à révéler l’identité de leurs abonnés téléchargeant de la musique en ligne. Rappels des faits. Mardi 21 janvier 2003, un juge fédéral avait estimé que le fournisseur d’accès à Internet Verizon devait aider l’industrie du disque en révélant le nom d’un internaute accusé d’avoir téléchargé en une journée plus de 600 fichiers musicaux via le serveur Kazaa, en vertu du «Digital Millenium Copyright Act», la législation sur les droits d’auteurs votée en 1988 aux Etats-Unis. Le fournisseur d’accès à Internet Verizon a fait appel et a donc obtenu la suspension de cette sentence.

Une victoire pour les internautes

Pour la puissante RIAA, l’Association américaine de l’industrie phonographique, qui défend les intérêts des grandes maisons de disques (Sony, Universal, Time Warner et EMI), c’est la déception, comme l’a expliqué son président Cary Sherman: «la décision rendue par la Cour d’appel du District de Columbia signifie malheureusement que nous ne pourrons plus, dans le but de parvenir à des règlements à l'amiable, avertir les personnes échangeant illégalement de la musique avant de les poursuivre en justice».

La RIAA, qui se bat pour la fermeture des réseaux d’échange de fichiers, a entamé des poursuites judiciaires contre des particuliers adeptes du téléchargement gratuit, parmi lesquels figurent bon nombre d’utilisateurs de Kazaa. Depuis qu'elle a lancé sa campagne, il y a six mois, la RIIA a déposé quelque 382 plaintes contre des personnes accusées d'échanger et de télécharger illégalement des fichiers musicaux sur l'Internet. Elle espère mettre fin à une activité qui fait chuter dramatiquement les ventes de CD: plus de 30 % ces dernières années aux Etats-Unis et en Europe.

Pour sa part, la Fédération internationale de l’industrie phonographique (IFPI) qui regroupe 1400 producteurs et distributeurs de musique dans 76 pays, a critiqué le jugement rendu par la Cour Suprême des Pays-Bas le qualifiant de «défectueux». Selon les termes de son communiqué, «Kazaa est capable de contrôler et de filtrer ses utilisateurs et devrait donc être tenu responsable des irrégularités commises sur son service». Une victoire sans précédent pour les internautes, même si la décision établit également qu’il n’y a pas d’irresponsabilité de principe pour les internautes échangeant de la musique sur Internet.

Ce débat autour de la responsabilité ou non des internautes est complexe. Même si Napster, le pionnier de la musique gratuite sur Internet a disparu en juin 2001 sur décision de justice, d’autres systèmes d’échange de musique en ligne comme Kazaa ou Morpheus ont pris le relais. Aux Etats-Unis, les actions n’ont pas tardé à suivre. Les procès dans le domaine de la diffusion musicale sur Internet font l’actualité des tribunaux depuis quelques mois. Résultat: les FAI ont volontairement fermé les sites web proposant des fichiers de musique piratés. Ils rechignent toutefois à déconnecter les utilisateurs qui échangent directement de la musique via des réseaux peer-to-peer.



par Myriam  Berber

Article publié le 23/12/2003