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Développement

Les PMA et la pauvreté

Habib Ouane est en charge du Département des Pays les moins avancés, les Pays en développement sans littoral et les Pays en développement insulaires de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) 

		(Photo : Didier Samson/RFI)
Habib Ouane est en charge du Département des Pays les moins avancés, les Pays en développement sans littoral et les Pays en développement insulaires de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED)
(Photo : Didier Samson/RFI)
La Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) publie son rapport 2004 sur «Les pays les moins avancés». Après les constats et analyses de données économiques qui aggravent la pauvreté dans certains PMA, et les marginalisent dans le commerce international, la CNUCED appelle à un accroissement de l’aide des pays riches mais aussi au renforcement des capacités de production des pays pauvres pour réduire la pauvreté.

«Mondialisation et stratégies de développement, renforcement des capacités de production et compétitivité internationale, le commerce au service du développement, commerce et pauvreté» ont constitué l’axe de travail des experts de la CNUCED qui ont passé au crible les politiques économiques et sociales des pays pauvres pour mesurer leurs niveaux de développement. La CNUCED pense naturellement que le commerce, en terme d’échanges,  pourvoyeur de revenus, est un vecteur essentiel du développement des nations. Le malien Habib Ouane, chargé du département des pays les moins avancés et des pays enclavés et insulaires à la CNUCED, présentant le rapport a insisté sur la notion de réduction de la pauvreté. Les PMA, et surtout les pays africains ont tous enregistré des taux de croissance positifs, plus forts que dans les pays développés, mais connaissent paradoxalement une augmentation du taux de pauvreté.

Malgré un taux de croissance d’une moyenne de 4,9% aucune traduction effective sur le quotidien des populations n’est enregistrée. La CNUCED a répertorié plusieurs  facteurs aggravant qui empêchent un relèvement du niveau en rapport avec l’expansion du commerce. La totale dépendance de certains pays aux produits d’exportations dont les cours fluctuent selon la tenue du marché international, l’inadaptation aux normes et l’incapacité à maîtriser la logistique de production sont des facteurs non maîtrisés par les pays et qui sont dommageables pour une économie moderne. La faiblesse des investissements directs étrangers, l’importation massive de produits handicapent les PMA dans une économie globalisée. Par ailleurs, «il faut s’assurer que la population en âge de travailler est employée pleinement  et de façon productive», selon la CNUCED, or cette population augmentera de 30% entre 2000 et 2010. L’état actuel de l’économie des PMA ne permet pas de supporter cette pression.

 Plus de 71% de cette tranche d’âge sont employés dans l’agriculture qui ne connaît pas le développement nécessaire pouvant occuper et faire vivre les populations. La CNUCED évoque les liens fragiles entre les différents secteurs de l’économie. Habib Ouane cite quelques exemples de «croissance enclavée» du fait des fruits de la croissance essentiellement répartis, socialement et géographiquement entre membres d’une certaine élite. Dans les PMA, plus de 50% de la population vit avec moins d’un dollar par  jour et consacre environ 0,15 dollar aux frais de santé ou à l’éducation. Dans une telle situation d’extrême pauvreté on note que 16 enfants sur 100 meurent avant l’âge de 5 ans contre 1 sur 100 dans les pays de l’OCDE (pays riches), dans lesquels par ailleurs, on affecte à la santé 1 456 dollars par an et par ménage contre 4 dollars dans les PMA.

 Renforcer les capacités de production locales

La CNUCED insiste sur le fait que les programmes locaux et de lutte contre la pauvreté ne participent pas à un «développement économique soutenu et partagé, contribuant à la hausse du revenu moyen des ménages et de leur consommation». Pour les pays africains un déficit de stratégie de développement est flagrant comparativement aux pays du sud-est asiatique où des politiques économiques ont fait une large part aux échanges inter-régionaux qui représentent plus de 40% du volume d’affaires. Des politiques d’intégration et de complémentarité ont été élaborées au sein de l’Association des nations de l’Asie du sud-est (ASEAN) pour un accroissement des capacités de production. Un pôle attractif comme le Japon sert de locomotive à cette économie régionale. Elle a aussi su s’adapter aux besoins du marché en profitant des accords internationaux. La délocalisation d’industrie pour un moindre coût de la main d’œuvre alors qu’il connaît au Japon un accroissement exponentiel a été un atout majeur pour l’économie des pays du sud-est asiatique. De petites unités de transformation du textile et des fabriques de vêtements tiennent une place importante dans le relèvement du niveau de vie dans les pays de la région, selon le constat de la CNUCED.

 De telles stratégies manquent cruellement aux PMA africains qui ne savent pas répondre aux besoins de leurs propres marchés. Par exemple le Mali, premier producteur africain de coton, avec plus de 600 000 tonnes, ne transforme localement qu’à peine  1% de sa production annuelle. Pour la CNUCED la réduction de la pauvreté passe également par le renforcement des capacités inclusives de développement. La bonne tenue des échanges inter-régionaux renforce les capacités de production et «évite la vulnérabilité des industries locales et dynamise les exportations», précise Habib Ouane. Mais le constat global pessimiste est néanmoins contre-balancé par une recommandation des experts de la CNUCED à l’endroit des pays riches. La Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement appelle à un accroissement des aides pour une meilleure intégration des PMA au commerce international. «Les mesures internationales visant à accroître l’impact positif du commerce sur la réduction de la pauvreté doivent aller au-delà de la libéralisation multilatérale du commerce (…) Les PMA eux-mêmes peuvent maximiser cet impact du commerce international sur la pauvreté en suivant une approche du commerce axée sur le développement plutôt qu’une approche du développement axée sur le commerce», conclut la CNUCED.



par Didier  Samson

Article publié le 28/05/2004 Dernière mise à jour le 28/05/2004 à 10:40 TU