Côte d'Ivoire
Faire respecter les engagements
(Photo: AFP)
Dès son retour d’Abuja, le président Laurent Gbagbo s’est adressé le 21 juin à la nation ivoirienne pour rappeler à ses compatriotes que la paix reste sa préoccupation première. Il a évoqué les échéances électorales comme des préalables au retour de la paix en Côte d’Ivoire. Il a aussi pris soin de préciser, surtout à l’endroit des ses partisans les plus radicaux, que les présidents Gnassingbé Eyadéma du Togo, Olusegun Obasanjo du Nigeria, et John Kufuor du Ghana auront très prochainement une implication directe auprès des acteurs de la crise ivoirienne. Leur travail emboîtera le pas à celui du Premier ministre Seydou Diarra à qui le président aurait demandé «de continuer ses consultations» en vue de renouer le dialogue politique avec la coalition des partis d’opposition et les Force nouvelles, le G7.
La communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) a confié au président togolais la mission de conduire les négociations en collaboration avec son homologue nigérian dont le pays abrite le siège de la CEDEAO et au président ghanéen qui préside la communauté. Leur première tâche est de ramener tous les protagonistes autour d’une table de discussion en vue de redémarrer le processus de paix. Mais plusieurs questions se posent. Comment faire revenir au conseil des ministres tous ceux qui le boycottent en invoquant le non-respect, par le président Gbagbo, de certains principes retenus à Marcoussis. Comment faire revenir sur sa décision de limogeage de certains ministres, le président Gbagbo ? Le Premier ministre a, plusieurs fois déjà, fait entendre sa différence, car le gouvernement qu’il dirige est le fruit de l’accord de Marcoussis qui a pris en compte un certain équilibre politique. Or le remplacement des ministres par des intérimaires issus du parti présidentiel, le FPI (Front populaire ivoirien) fausse les équilibres, mais le président Gbagbo rétorque que «la République n’est pas liée à des personnes» et qu’il appartient aux partis des ministres limogés de lui faire d’autres propositions. Ces derniers ont déjà refusé d’obtempérer.
Commission d'enquête indépendante
A la rescousse des négociateurs africains apparaît une délégation du Conseil de sécurité de l’ONU, qui adopte dès son arrivée le 23 juin à Abidjan, un ton ferme. Dans une volonté de mettre les belligérants ivoiriens face au destin de leur pays, les 14 membres de la délégation onusienne ont brandi quelques sanctions qui pourraient être appliquées individuellement à toute personne entrave la bonne marche du processus de paix. «Nous sommes venus ici avec un message très ferme, nous ne ferons pas de menaces mais présenterons des exigences très concrètes sur les mesures que nous voulons voir mises en œuvre», précisent les ambassadeurs. Le Conseil de sécurité dispose d’un éventail important de sanctions, parmi lesquels «l’interdiction de déplacement, le gel des avoirs financiers», a précisé l’ambassadeur britannique Emyr Jones Perry, chef de la mission.
En revanche, le pouvoir ivoirien a quelques motifs de satisfaction puisque le Haut commissaire des Nations unies pour les droits de l’homme, Bertrand Ramcharan a annoncé la création et l’envoi en Côte d’Ivoire d’une commission d’enquête indépendante sur les violences commises depuis le début de la rébellion en septembre 2002. La commission est composée d’Aref Mohamed Aref (Djibouti), de Gérard Balanda (RD Congo), de Fatima Mbaye (Mauritanie), de Radhia Nazraoui (Tunisie) et d’Almiro Rodriguez (Portugal). Leurs investigations porteront sur la période allant du 19 septembre 2002, début de la rébellion au 24 janvier 2003, date de signature de l’accord de Marcoussis. La commission d’enquête devra dégager les responsabilités des violations des droits de l’homme qui se sont produits en Côte d’Ivoire.
par Didier Samson
Article publié le 24/06/2004 Dernière mise à jour le 24/06/2004 à 17:12 TU