Union européenne
Budget 2007-2013 : début des grandes manœuvres
(Photo : AFP)
Les propositions de la Commission européenne pour l’élaboration du budget communautaire sur la période 2007-2013 seront rendues publiques le 14 juillet à Bruxelles. Les négociations qui vont s’engager sur la base de ces propositions initiales se présentent comme particulièrement difficiles car la Commission se propose de remettre en question quelques situations solidement établies. Depuis 1988 l’Union européenne définit des « perspectives financières » qui fixent un plafond et la composition des dépenses pour une période de six ans. L’agenda 2000 portant sur 2000-2006 venant bientôt à échéance, les 25 doivent se mettre d’accord sur de nouvelles perspectives au cours de l’année 2005.
Vu l’écart des positions de départ, pour celles qui sont déjà connues, les membres de l’Union européenne n’auront pas de trop des mois qui viennent pour trouver un compromis. En décembre dernier, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, l’Autriche et la Suède ont adressé une lettre commune au président de la Commission européenne lui demandant le gel du budget de l’Union à 1% du PIB cumulé des pays membres. Soit pratiquement le même niveau de dépenses que durant la période antérieure alors que dix nouveaux membres ont intégré l’Union européenne depuis le mai 2004. «Les miracles ne sont pas ma spécialité», avait rétorqué Romano Prodi, soulignant qu’avec une marge financière aussi étroite, il ne lui serait pas possible de réaliser les projets ambitieux de l’Union européenne à 25.
En 1999, les chefs d’Etat et de gouvernement ont décidé, au sommet de Berlin, qui se prononçait sur les perspectives 2000-2006, de plafonner le montant des ressources de l’Union européenne à 1,24% du revenu national brut (RNB) des Etats membres soit environ 1,27% du produit national brut (PNB) à 15. Toutefois, cette exigence qui avait en grande partie pour objectif d’amener l’Espagne et la Pologne à plus de souplesse sur la constitution européenne devrait être moins ferme depuis que le projet de constitution a été adopté.
« Rendez-moi mon argent »
Mais à cela s’ajoute le problème central des contributions nationales au budget communautaire. Elles représentent plus de 70% du total et sont calculées, pour chaque pays, en fonction de sa richesse et de sa taille. Mais cette théorie connaît des assouplissements dans la pratique car les pays sont très attentifs au solde entre leur contribution et les retours qu’ils perçoivent sous forme d’aides communautaires. Ainsi l’Allemagne, les Pays-Bas, l’Autriche et la Suède, qui estimaient leur contribution nette trop élevée, ont obtenu au même sommet de Berlin une réduction de leur quote-part tandis que le Royaume-Uni se faisait confirmer la ristourne obtenue en 1984 et reconduite depuis.
Or la Commission européenne entend bien s’attaquer cette fois au privilège dont bénéficie le Royaume-Uni pour instaurer un mécanisme plus juste en faveur de l’ensemble des pays qui payent plus qu’ils ne reçoivent. Le Premier ministre britannique Margaret Thatcher avait obtenu, en 1984 au sommet de Fontainebleau, le remboursement, chaque année, des deux tiers de sa contribution nette au budget européen. Sa demande est restée célèbre pour sa formulation : « Rendez-moi mon argent » avait-elle exigé. Le maintien de ce dispositif dit « chèque britannique » conduirait le Royaume-Uni à verser, durant la période 2007-2013, 0,25% de son PIB à l’Union européenne soit beaucoup moins que les Pays-Bas, l’Allemagne ou la Suède qui devraient acquitter, pour leur part, 0,5% ou plus de leur PIB. A l’inverse, la suppression totale du mécanisme propulserait Londres en tête des contributeurs avec un versement net de 0,6% du PIB britannique.
C’est donc une formule moyenne que la Commission européenne propose en l’élargissant à tous les pays contributeurs nets. Ils ne pourraient bénéficier d’un reversement qu’à partir d’un excédent des versements sur les aides perçues dépassant 0,35% de leur PIB, et avec un plafond de ristourne fixé à 7,5 milliards d’euros. Pour l’instant les Britanniques font savoir que leur rabais est parfaitement justifié et non négociable. Il leur est facile de mettre en avant l’exemple des pays qui tirent largement leur épingle du jeu grâce aux versements de la politique agricole commune (PAC), et au premier rang, la France. Ce sujet a d’ailleurs été à l’origine d’un incident verbal entre le président français Jacques Chirac et le Premier ministre britannique Tony Blair au sommet européen de Bruxelles en octobre 2002. Il est possible que ce ne soit pas la dernière passe d’armes du genre.
par Francine Quentin
Article publié le 08/07/2004 Dernière mise à jour le 08/07/2004 à 13:25 TU