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Union européenne

Pacte de stabilité : arbitrage au centre

La Cour européenne de justice 

		Photo : CURIA
La Cour européenne de justice
Photo : CURIA
La Cour européenne de justice, arbitrant entre le Conseil des ministres et la Commission européenne sur l’application du pacte de stabilité, précise ce qui relève de la décision politique et du droit communautaire dans les rapports entre les institutions de l’Union. Ainsi la CEJ a annulé la décision prise par les ministres des Finances de l’Union européenne, le 25 novembre 2003, de geler la procédure de déficit excessif lancée contre la France et l’Allemagne.

La Commission européenne, s’érigeant en gardienne des traités communautaires, avait attaqué cette décision devant la Cour européenne de justice (CEJ), estimant que les ministres des Finances des Quinze violaient le pacte de stabilité et de croissance en ne sanctionnant pas les contrevenants. Dans son arrêt, la Cour est beaucoup plus nuancée et opère un balancement entre les droits et obligations de l’instance politique intergouvernementale qu’est le Conseil des ministres et l’autorité communautaire qu’est la Commission.

Selon la CEJ, le Conseil avait effectivement le droit de ne pas adopter les recommandations de la Commission lui demandant de sanctionner la France et l’Allemagne, dont le déficit budgétaire dépassait les 3% du PIB fixé par le pacte de stabilité. Il suffisait pour cela de constater que la majorité qualifiée nécessaire à la poursuite de la procédure pour déficit excessif n’était pas réunie. De fait, à l’époque, seuls les Pays-bas, l’Espagne, l’Autriche et la Finlande avaient voté contre le gel des sanctions et donc en faveur de l’application stricte du traité entériné par le sommet d’Amsterdam de juin 1997.

En revanche, la Cour estime que les ministres ont outrepassé leurs prérogatives en fixant eux-mêmes les règles auxquelles la France et l’Allemagne devraient se conformer pour rentrer dans les clous du pacte de stabilité. Le Conseil des ministres européens des Finances, très officiellement, le 25 novembre 2003, se déclarait « d’accord pour mettre entre parenthèses pour le moment la procédure pour déficit excessif » à l’encontre de la France et de l’allemagne. Mais il assortissait cette mansuétude de conditions, ce que la Cour européenne de justice conteste aujourd’hui. La France, pour échapper aux sanctions, devait réaliser, en 2004, une réduction de son déficit à hauteur de 0,8% de son PIB et l’Allemagne de 0,6%. Ce redressement devait être poursuivi en 2005 au rythme de 0,6% pour la France et 0,5% pour l’Allemagne. Le Conseil des ministres ajoutait en corollaire que la voie des sanctions pourrait être reprise si les deux pays n’agissaient pas conformément à leurs engagements.

En résumé, la Cour reconnaît aux ministres le droit d’adopter une position « politique » s’ils jugent opportun de ne pas appliquer strictement la règle communautaire, ce que la Commission contestait. Mais la Cour ne leur permet pas d’inventer d’autres règles que celles existant déjà dans les traités.


Cour de justice européenne 

		© CURIA
Cour de justice européenne
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Tout le monde a gagné

C’est pourquoi opposants comme  partisans du gel des sanctions contre la France et l’Allemagne ont trouvé dans l’arrêt de la Cour matière à satisfaction. Les Pays-Bas, qui assurent depuis le 1er juillet la présidence de l’Union européenne, ainsi que, collégialement, les ministres des Finances de l’Union européenne, se sont dits heureux de cette décision qui  « apporte de la clarté ». Toutefois, la présidence néerlandaise doit maintenant envisager les mesures à prendre pour tenir compte des conséquences de cette décision.

L’Allemagne se félicite que soit reconnue « une marge de manœuvre » aux gouvernements dans l’interprétation des textes. Et la France souligne que, selon elle, cela « ne remet pas en cause l’orientation de sa politique budgétaire », ni, a ajouté le ministre de l’Economie Nicolas Sarkozy son « engagement à maîtriser les dépenses publiques pour réduire les déficits ». Quant à la Commission européenne, elle y voit confirmation « du rôle essentiel des règles du pacte de stabilité ».

Pour Romano Prodi, président de la Commission européenne, on est donc revenu au point de départ : la constatation d’un déficit excessif de la France et de l’Allemagne. D’autant plus que dans l’Union à 25 le cas n’est plus isolé. Le dernier Conseil des ministres des Finances, le 5 juillet, a décidé de lancer des procédures pour déficit excessif contre la Grèce et six nouveaux adhérents, la République tchèque, la Pologne, la Hongrie, la Slovaquie, Chypre et Malte. En revanche, l’Italie est passée à travers les mailles du filet en présentant, à la dernière minute, des mesures de redressement budgétaire.

Après cette décision de justice, la réforme du pacte de stabilité et notamment son assouplissement dans une conjoncture de faible croissance ou de nécessité de la doper, reste plus que jamais à l’ordre du jour. D’ailleurs le président désigné de la future Commission européenne José Manuel Durão Barroso s'est dit « prêt à voir comment rendre le pacte de stabilité plus crédible et plus efficace, sans le réécrire ».


par Francine  Quentin

Article publié le 13/07/2004 Dernière mise à jour le 13/07/2004 à 13:27 TU