Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Jeux olympiques 2004

Les Grecs à l’épreuve

Le stade olympique d'Athènes lors de la cérémonie d'ouverture des JO 2004.(Photo: AFP)
Le stade olympique d'Athènes lors de la cérémonie d'ouverture des JO 2004.
(Photo: AFP)
Grâce à une somptueuse cérémonie d’ouverture, les organisateurs grecs ont oublié l’espace de quelques heures l’épineuse affaire de leurs champions Kenteris et Thanou, accusés d’avoir refusé de se soumettre un contrôle antidopage et menacés d’exclusion.

Jusqu’au bout, les organisateurs ont réussi à préserver le suspense. Le nom du dernier relayeur olympique, celui de l’athlète chargé d’enflammer la vasque du stade olympique d’Athènes lors de la cérémonie d’ouverture, n’avait en effet pas été officiellement annoncé. En raison de l’immense popularité dont il jouit dans son pays, le sprinter Konstantinos Kenteris, médaille d’or à Sydney sur 200 m, semblait être le mieux placé. Mais c’est finalement Nikolaos Kaklamanakis, véliplanchiste médaillé d’or à Atlanta, qui a eu ce privilège. Car les Grecs ne pouvaient pas se permettre de ternir cet événement en choisissant un sportif qui se trouve au centre d’une vive polémique depuis quarante-huit heures.

Accusé d’avoir refusé de se soumettre à un contrôle antidopage, Konstantinos Kenteris risque en effet d’être exclu, tout comme sa compatriote Ekaterini Thanou, médaille d’argent à Sydney sur 100 m. Ils devaient tous les deux être soumis à un contrôle antidopage inopiné jeudi. Mais l’équipe du Comité international olympique chargée de procéder à ces examens a trouvé leurs chambres vides en arrivant au village olympique, alors que ces deux sportifs étaient censés s’y trouver. Car selon le règlement, tous les athlètes doivent en permanence informer du lieu où les officiels peuvent les trouver. Prévenus de la présence des contrôleurs, ils auraient tenté de rejoindre le plus rapidement possible le Village en empruntant la moto de leur entraîneur, Christos Tzekos. Mais ils auraient alors été victimes d’une chute, puis transportés dans un établissement spécialisé dans le traitement des accidentés de la route situé dans le nord d’Athènes.

Ce récit rocambolesque est celui qu’ont livré plusieurs officiels grecs sommés d’expliquer l’absence des deux sportifs au contrôle, puis leur disparition. A quelques heures de la cérémonie d’ouverture, ils étaient d’ailleurs toujours hospitalisés pour soigner diverses ecchymoses et traumatismes dus à la chute. L’hôpital dans lequel ils ont été admis avait en effet estimé qu’ils ne pourraient pas quitter l’établissement avant 48 heures. Dans la foulée, le Comité international olympique décidait de leur accorder un délai de 72 heures, jusqu’à lundi, pour se présenter devant une commission d’enquête chargée de recueillir leurs explications.

Un demi-dieu grec

Les instances olympiques ne sont pas les seules à enquêter sur cette mystérieuse histoire, la police grecque tentant de son côté d’éclaircir les conditions de l’accident. L’affaire occupe en fait depuis deux jours la une de tous les journaux grecs qui parlent de l’«ombre du dopage» sur la grande fête olympique. Kenteris se trouvait depuis déjà plusieurs années dans le collimateur de nombreux spécialistes qui tentaient d’expliquer ses résultats fulgurants. S’imposant à la surprise de tous à Sydney, il cultive depuis l’art du secret et a souvent alimenté la controverse par ses forfaits de dernière minute dans différentes réunions. Et il avait déjà fait parler de lui au mois de mars, le Fédération internationale d’athlétisme tentant alors désespérément de le trouver pour pouvoir le soumettre à un contrôle antidopage. Censé s’entraîner en Grèce, il était en fait au Qatar et avait déjà oublié d’avertir les instances sportives de ce changement de programme.

La répétition de ces «oublis» ou «négligence» pourrait bien valoir à Kenteris une exclusion pure et simple des Jeux organisés dans son propre pays. Plusieurs fédérations demandent en effet l’application stricte du règlement et refusent qu’on fasse preuve de mansuétude à son égard. «Je ne suis pas dupe», a ainsi déclaré Bernard Amsalem, président de la Fédération française d’athlétisme. «C’est un demi-dieu grec et il y doit y avoir une terrible pression pour éviter toute forme de sanction. Je serai déçu qu’il n’y ait pas de fermeté». Du côté suédois, on réclame purement et simplement l’exclusion de Kenteris et de Thanou en brandissant la menace de boycott des épreuves d’athlétisme si ce n’est pas le cas. Pour les organisateurs des Jeux, il est donc urgent de se prononcer. Et selon certaines informations officieuses, le comité national olympique grec aurait d’ailleurs choisi d’exclure ces deux athlètes de sa sélection, une décision jugée nécessaire pour sauver le prestige de la compétition.


par Olivier  Bras

Article publié le 14/08/2004 Dernière mise à jour le 14/08/2004 à 18:17 TU