Otages français en Irak
Cascade de soutiens dans le monde arabe
(Photo : AFP)
Le Comité des oulémas musulmans, principale organisation religieuse sunnite d’Irak, a lancé un appel solennel aux ravisseurs des journalistes français pour qu’ils les libèrent. «Il est fort regrettable que nous n’ayons pas de canal direct pour contacter les ravisseurs», a affirmé le cheikh Mohammad Bachar Al-Faidhi, porte-parole du Comité. « C’est pour cela que nous lançons une lettre ouverte aux ravisseurs à travers cette conférence de presse (…) en raison de la gravité de la question et étant donné que l’ultimatum approche de son expiration.»
Le cheikh Abdessatar Abdeljawad, membre du comité des oulémas musulmans, principale organisation sunnite, a estimé qu’une éventuelle exécution des deux journalistes français enlevés ne profiterait «qu’à l’ennemi occupant». «Le monde entier a exhorté les ravisseurs à libérer les deux otages (…). S’ils sont exécutés, seul l’ennemi occupant (ndlr : les Etats-Unis) profitera de cette opération, en créant une brèche entre la France et l’Irak», a estimé le dignitaire religieux dans une déclaration à la chaîne Al-Jazira.
Le cheikh Ahmed Al-Qoubaïssi, l’une des plus hautes autorités morales de la communauté sunnite irakienne, a déclaré que l’enlèvement des journalistes constituait un «crime» et que leur exécution serait une «catastrophe». «Rien dans l’islam n’autorise à menacer des gens pour appliquer un précepte de la charia (ndlr : la loi islamique), car l’obligation forcée n’existe pas dans la religion», a affirmé le cheikh Qoubaïssi, qui présente une émission de télévision très populaire à la télévision de Dubaï, où il réside depuis des années. «Le port du voile n’est qu’un rite et non l’un des piliers de l’islam comme la prière ou le jeûne du mois de ramadan. C’est inadmissible de menacer de tuer un être humain pour appliquer un rite», a-t-il poursuivi. «Si par malheur les journalistes étaient exécutés, ce serait une catastrophe pour l’Irak, l’islam et pour la résistance, qui disparaîtrait sans laisser de trace».
Le cheikh Mohammed Tantaoui, la plus haute autorité religieuse sunnite, a condamné l’enlèvement des journalistes français. Il a affirmé, selon l’agence de presse égyptienne Mena, que cet acte contredisait toutes les règles de la religion musulmane tolérante qui appelle au respect de la vie humaine, notamment des innocents. «L’enlèvement des civils qui travaillent et respectent les lois dans les pays islamiques est inadmissible», a estimé le cheikh Tantaoui.
Le mufti de Syrie, cheikh Ahmed Kaftaro, a demandé la libération des deux journalistes français. «Les ravisseurs doivent répondre aux appels lancés dans le monde, et livrer leurs otages. Un tel geste est de nature à préserver l’islam et les musulmans».
Le mouvement radical palestinien Hamas a appelé à la libération des deux journalistes en rappelant l’opposition de Paris à l’invasion américaine en Irak et ses prises de position favorables aux Palestiniens. «Nous appelons l’Armée islamique en Irak à relâcher rapidement les deux journalistes et nous pensons qu’une telle décision aura des répercussions positives sur les positions politiques de la France au niveau populaire et officiel à l’égard des causes palestinienne et irakienne», a déclaré le Hamas dans un communiqué.
Le conseil consultatif sunnite, un important groupe salafiste irakien, a implicitement appelé les ravisseurs à libérer leurs otages en reconnaissance de l’opposition française à l’intervention américaine en Irak. «Les combattants de la résistance irakienne doivent peser le pour et le contre afin de choisir la solution la moins nuisible et la plus conforme à la charia (loi islamique) qui est la source d’inspiration des moudjahidine (combattants musulmans)», a affirmé cette organisation dans un communiqué. «Au moment où l’Irak est théâtre de complots et de conspirations visant à diviser le pays, nous savons qu’il y a des peuples et des gouvernements en Europe qui comprennent notre juste cause et se tiennent aux côtés de l’Irak, spécialement la France, une nation ayant des relations amicales avec nous depuis des décennies et qui a refusé de participer à l’occupation».
La télévision du Hezbollah chiite libanais, Al-Manar, a jugé que le rapt des journalistes en Irak était une «pratique erronée» et a exhorté les ravisseurs à sauvegarder leur vie. «Al-Manar dénonce avec force les pratiques erronées contre les journalistes de quelque partie qu’elles proviennent et juge que leur protection et la facilitation de leur tâche sont un grand service à rendre à la cause irakienne».par Olivier Bras
Article publié le 31/08/2004 Dernière mise à jour le 31/08/2004 à 13:58 TU