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Otages français en Irak

Paris poursuit son offensive diplomatique

Vladimir Poutine et Gerhard Schröder ont apporté un «soutien sans réserve» à Jacques Chirac. 

		(Photo : AFP)
Vladimir Poutine et Gerhard Schröder ont apporté un «soutien sans réserve» à Jacques Chirac.
(Photo : AFP)
Le comité des oulémas musulmans a fait, mardi après-midi, une déclaration adressée à l’Armée islamique en Irak qui détient Christian Chesnot et Georges Malbrunot pour demander leur libération, devant les chaînes de télévision satellitaire arabes présentes à Bagdad. Cette intervention par médias interposés est inédite. Elle arrive alors que les autorités françaises poursuivent et accentuent leurs efforts pour obtenir la libération des deux journalistes.

Jacques Chirac s’est finalement rendu à Sotchi, en Russie, pour rencontrer le président Vladimir Poutine et le chancelier allemand Gerhard Schröder réunis sur les bords de la mer Noire. Mais il est tenu informé minute par minute de l’évolution de la situation des journalistes français pris en otages en Irak, Christian Chesnot et Georges Malbrunot. Ce dossier a d’ailleurs fait partie des sujets abordés par les trois dirigeants et Jacques Chirac a profité de son passage en Russie pour lancer devant les médias un nouvel appel à la libération des otages : «Je renouvelle ici, en notre nom à tous, mon appel solennel à la libération» des deux journalistes et de leur chauffeur. Le président s’était déjà exprimé dans ce sens, dimanche soir, à l’occasion d’un message télévisé exceptionnel. Vladimir Poutine et Gerhard Schröder ont quant à eux saisi l’opportunité offerte par cette rencontre pour se joindre à l’élan de solidarité international exprimé depuis lundi à l’égard de la France et ont apporté un «soutien sans réserve» à Jacques Chirac.

A l’instar du chef de l’Etat, l’ensemble du gouvernement français est mobilisé pour suivre ce dossier. Aucun commentaire officiel n’a été fait après l’annonce, lundi soir, du report de l’ultimatum des ravisseurs de 24 heures et la diffusion d’une nouvelle cassette montrant Christian Chesnot et Georges Malbrunot. Mais le Premier ministre a organisé une autre réunion de crise avec les principaux ministres concernés (Défense, Intérieur, Communication) et le chef de cabinet du ministre des Affaires étrangères ; puisque celui-ci effectue depuis lundi une tournée au Moyen-Orient destinée à lui permettre de coordonner les actions en faveur de la libération des otages.

Amman met ses contacts au service de la France

Hier au Caire, aujourd’hui à Amman, Michel Barnier mène, en effet, à la demande du président de la République une mission déterminante dans la région pour mobiliser les dirigeants et l’opinion arabe en faveur de la cause des otages français. La tournée du ministre des Affaires étrangères a déjà porté ses fruits puisque les déclarations de soutiens se succèdent sans interruption depuis 24 heures dans la région. L’ensemble des responsables politiques et religieux arabes ont exprimé leur solidarité avec la France, salué ses positions sur le conflit en Irak et dénoncé la prise d’otages dont sont victimes des ressortissants d’un pays «ami». Mais surtout, ils ont mis en avant le fait que cet enlèvement ne peut en aucun cas servir la cause de l’Irak ou des arabes et que la revendication sur l’abrogation de la loi sur la laïcité en France n’a aucun sens.

En Egypte, Michel Barnier a, rencontré à la fois des responsables religieux, le cheikh sunniteYoussef Quardaoui, politiques comme le ministre des Affaires étrangères Abou Gheït, mais aussi des services de renseignement en la personne du général Omar Souleimane qui bénéficie de réseaux en Irak. Car le deuxième volet de la mission du chef de la diplomatie française est de solliciter les réseaux des alliés arabes de la France sur le terrain pour obtenir une issue heureuse à la crise. A Amman, le ministre des Affaires étrangères jordanien Marwan Moasher, qui a reçu Michel Barnier, a d’ailleurs annoncé que son pays avait «entamé des contacts avec des groupes en Irak» pour tenter de faire libérer les deux français. La Jordanie, dont certains ressortissants ont été eux aussi enlevés puis libérés, a établi des relations avec des mouvements «qui peuvent influer sur la situation».

Dans la capitale jordanienne où il a aussi rencontré le roi Abdallah, le chef de la diplomatie française a fait une nouvelle déclaration dans laquelle il s’est dit profondément touché par «la solidarité et l’émotion qui s’expriment unanimement de la part des plus hautes autorités de l’islam», ajoutant, rempli d’espoir, que «ces voix» appellent «à la libération de Christian Chesnot et Georges Malbrunot».

Solliciter des médiations locales

Dans le même temps, sur le terrain en Irak, l’envoyé spécial du ministère des Affaires étrangères, le diplomate Hubert Colin de Verdière, tente de faire passer le message des autorités françaises aux ravisseurs et d’utiliser toutes les médiations locales, notamment celle du comité des oulémas musulmans (principale organisation religieuse sunnite qui a déclaré que «seul l’ennemi occupant» profiterait de l’exécution des otages), pour obtenir la libération des journalistes et de leur chauffeur. Ce comité est d’ailleurs intervenu directement en s’adressant aux membres de l’Armée islamique en Irak à l’occasion d’une conférence de presse dans laquelle il a exhorté les ravisseurs à libérer les otages français.

A quelques heures de la fin de l’ultimatum, les représentants du comité ont insisté sur le caractère inédit de leur intervention face aux caméras des chaînes satellitaires arabes, destinée, ont-ils affirmé, à porter leur message à l’Armée islamique en Irak avec laquelle aucun «canal direct» n’a pu être établi. Ils ont insisté sur la singularité de la position française face à l’occupation de l’Irak et son opposition «aux projets américains dans la région». Mais ils ont surtout  affirmé qu’ils craignaient «l’exécution des deux otages» et déclaré qu’en relâchant Christian Chesnot et Georges Malbrunot, les membres de l’Armée islamique en Irak montreraient qu’ils sont de véritables «résistants».



par Valérie  Gas

Article publié le 31/08/2004 Dernière mise à jour le 31/08/2004 à 15:50 TU