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Sénégal

Le «Joola», pénible anniversaire

Dans tout le Sénégal de nombreuses cérémonies et prières rendent hommage aux victimes. 

		(Photo : AFP)
Dans tout le Sénégal de nombreuses cérémonies et prières rendent hommage aux victimes.
(Photo : AFP)
Deux après le naufrage du Joola, faisant près de 2000 morts, au large de la Gambie, seulement une minorité de familles peut effectivement faire un véritable deuil des disparus. Cinq cents corps ont pu être repêchés pour bénéficier d’une sépulture digne. Les autres gisent dans l’épave du ferry qui repose au fond des eaux à plus de 40 kilomètres des côtes gambiennes.

Les 64 rescapés du naufrage du Joola sont marqués à vie. Le récit du drame qu’ils ont vécu est souvent un moment fort d’émotions. L’incompréhension et de nombreuses interrogations émaillent leur récit. Ils racontent tous un sentiment d’abandon qui semble les envahir quand ils voient « que les enquêtes n’ont guère évolué » depuis le naufrage du 26 septembre 2002. Selon eux, la création des associations de victimes a néanmoins contribué à maintenir une certaine pression sur les autorités sénégalaises qui ont confessé certaines insuffisances. La gestion de « l’affaire Joola » est dénoncée par le Collectif de coordination des familles des victimes du naufrage du Joola (CCFV-Joola). Ce collectif reproche à l’Etat sénégalais de lier la gestion de cette affaire à la « seule question d’indemnisation ». 

Pour le CCFV-Joola, le nombre total des victimes reste une question importante non abordée sérieusement par le pouvoir sénégalais, tout aussi bien que l’inscription de tous les orphelins au statut de pupilles de la nation (promesse non tenue), sans oublier les poursuites judiciaires contre les responsables du naufrage. Mais le CCFV-Joola, n’est plus l’interlocuteur privilégié du pouvoir qui a reconnu une autre organisation, l’Association nationale des familles des victimes, dont le siège est Ziguinchor. C’est elle qui a fourni les premiers chiffres sur les indemnisations accordées aux familles des victimes par l’Etat sénégalais. Sur 1 336 dossiers reçus entre le 1er septembre 2003 et le 24 juillet 2004, 1 262 personnes ont perçu chacune une indemnité de 10 millions de francs CFA, soit plus de 15 000 euros.

Par ailleurs, c’est à Ziguinchor, ville située au sud du Sénégal, point de départ du Joola que les plus importantes manifestations de commémoration et de souvenir se sont tenues. Des expositions de photos « Hommage aux disparus »  réalisées par des initiatives privées de gens ayant perdu des proches dans le naufrage. Des visites au cimetière où des victimes ont été inhumées, des cérémonies de recueillement, des conférences-débats, des rencontres, et même des matches de football au profit des associations d’aide aux victimes sont organisés et s’étaleront sur plusieurs jours. Une association de victimes basée à Toulouse, dans le sud de la France a aussi prévu des manifestations de soutiens aux familles des victimes. De nombreux Français (et autres nationalités européennes) sont au nombre des victimes du naufrage du Joola.

Un monument digne de ce nom

A Dakar, la première pierre d’un monument dédié aux victimes a été posée. L’archevêque de Dakar, Monseigneur Théodore Adrien Sarr a présidé la cérémonie. Les associations de parents des victimes ont apprécié ce geste et ont invité les autorités politiques sénégalaises à édifier un « mémorial d’envergure nationale ». Chrétiens et musulmans ont organisé un peu partout au Sénégal des cérémonies pour le « repos de l’âme des disparus ».

A Evry, en région parisienne, le parquet a ouvert une information judiciaire. Le procureur Pierre-Louis Jacob tout en comprenant le « besoin légitime d’information » des familles exprime les limites qu’impose l’instruction de l’enquête. Quatre commissions rogatoires ont été lancées. Les services de recherche de la gendarmerie de Paris sont saisis aussi bien que la gendarmerie maritime de Brest, dans l’ouest de la France. En Allemagne, là où le Joola a été construit, une autre enquête suit son cours, pendant qu’une autre est conduite en Gambie, pays au large duquel le Joola a sombré. Le dossier devrait bientôt être bouclé.

Hormis les aspects judiciaires et humains du naufrage du Joola, son importance économique est aussi indéniable. Il permettait le désenclavement de la Casamance et l’acheminement des produits de cette province vers la capitale, Dakar. Selon de nombreux indicateurs économiques, la flambée des prix de certaines denrées, la production non écoulée de certains produits sont directement liés au manque de liaison directe entre Dakar et la Casamance. Selon les autorités sénégalaises, la Banque européenne d’investissement (BEI) envisage de financer l’achat d’un nouveau bateau pour pallier ce manque. Les Casamançais attendent de voir.           

par Didier  Samson

Article publié le 26/09/2004 Dernière mise à jour le 26/09/2004 à 15:42 TU

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