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Environnement

La dernière ourse des Pyrénées abattue

Ourse des Pyrénées. Cannelle, la dernière femelle de souche du massif a été abattue ce lundi 1er novembre 2004. 

		(Photo: AFP)
Ourse des Pyrénées. Cannelle, la dernière femelle de souche du massif a été abattue ce lundi 1er novembre 2004.
(Photo: AFP)
Cannelle, la dernière ourse de souche pyrénéenne, a été tuée par un chasseur en vallée d’Aspe lors d’une battue au sanglier. La mort de l’animal a provoqué la consternation des associations de protection de la nature qui dénoncent une vraie catastrophe écologique. Le ministre de l'Ecologie Serge Lepeltier a demandé l'ouverture d'une enquête approfondie sur cette affaire.

Cannelle, la dernière ourse des Pyrénées a été abattue lundi par un chasseur sur la commune d’Urdos, en vallée d’Aspe lors d’une battue aux sangliers. Selon les déclarations des chasseurs, Cannelle accompagnée de son ourson âgé de quelques mois aurait soudainement surgi d’un fourré et se sentant menacée, aurait commencé à attaquer les chiens, mordant l’un profondément. Un premier chasseur aurait tiré en l’air pour l’effaroucher. Dans sa fuite, le mammifère se serait retourné vers un autre chasseur qui l’aurait tiré à bout portant, tandis que l’ourson disparaissait dans la nature. L’homme a affirmé qu'il avait dû tirer en état de légitime défense après s'être retrouvé nez à nez avec l'animal.

La mort de Cannelle a provoqué la colère des associations de protection de la nature qui jugent «inadmissible» que la battue au sanglier, au cours de laquelle Cannelle a été tuée, se soit déroulée dans un des secteurs forestiers «parfaitement connus pour abriter les derniers ours pyrénéens». Les associations attendent quelques explications sur le maintien d’une battue sur un site où la présence de l’ourse et de son petit avait été signalée aux fins de l’éviter. Gérard Caussimont, président d’une organisation locale de défense des ours bruns, FIEP-Groupe Ours Pyrénées, s’insurge : «cet acte inqualifiable s’est produit alors que des chasseurs sont allés en battue dans un secteur où la femelle et son ourson étaient installés et signalés à leur attention depuis des semaines». Des propos confirmés par le président de la Fédération de chasse des Pyrénées-Atlantiques, Bernard Placé : «la société de chasse d’Urdos avait été prévenue de la présence de l’ourse dans le secteur. Il n’y aurait jamais dû y avoir de battue. C’est une affaire gravissime, un patrimoine biologique qui disparaît».

Des zone de refuge sans chasse pour la faune

La disparition de cette femelle compromet sérieusement l’avenir des populations d’ours dans les Pyrénées. En effet, l’animal, en âge de procréer, était l’unique ourse femelle autochtone recensée dans le massif des Pyrénées, avec un patrimoine génétique distinct des ours en provenance de Croatie ou de Slovénie introduits dans la région depuis le milieu des années 90. Ce «braconnage sur une espèce protégée» avait connu déjà trois précédents depuis 1994 avec Claude, Melba et Papillon, trois ours tués par des chasseurs dans les Pyrénées.

L’ASPAS (Association pour la protection des animaux sauvages), le WWF- France (Fonds mondial pour la nature) et la SPA (Société protectrice des animaux) ont annoncé séparément qu’ils porteraient plainte. L'ASPAS a déclaré qu'elle attaquait «le tueur de Cannelle et le président de la société de chasse responsable». Le WWF-France «a décidé de porter plainte contre les organisateurs de la battue et de leur demander un million d'euros de dommages et intérêts». La SPA a annoncé qu’elle portait également plainte «contre le chasseur responsable». Pour sa part, le ministre de l'Ecologie Serge Lepeltier va se rendre en vallée d’Aspe pour s’informer directement des circonstances de la mort de Cannelle. Il a demandé l'ouverture d'une enquête approfondie sur cette affaire.

Les associations ont par ailleurs appelé les pouvoirs publics «à créer des zones de refuge sans chasse pour la faune» et à introduire de nouveaux ours de souche étrangère dans les Pyrénées «pour éviter l’extinction définitive de l’espèce». En effet, selon les dernières estimations, après la mort de Cannelle, il n'existerait plus que deux ours de souche pyrénéenne, tous deux mâles, alors qu'au total le massif compterait une quinzaine de plantigrades essentiellement issus de programmes de réintroduction, dont quatre femelles. Reste également l’ourson de Cannelle -probablement issu d'un accouplement avec un ursidé d'origine slovène et qui n'est donc pas purement pyrénéen- mais dont les chances de survie sont très faibles. Si l’on en croit France Nature Environnement, la Fédération française des associations de protection de la nature et de l’environnement : «sans sa mère, le jeune ourson âgé de 10 mois seulement –repéré dans la vallée d’Aspe mercredi matin- aura beaucoup de difficultés à survivre, étant donné qu’il n’a pas fini son apprentissage pour s’alimenter et qu’il n’a jamais vécu un hiver tout seul dans les montagnes»



par Myriam  Berber

Article publié le 03/11/2004 Dernière mise à jour le 03/11/2004 à 15:26 TU