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Proche-Orient

Objectif : élections en Palestine

Réunion de la direction palestienne sous le portrait du Raïs. 

		(Photo : AFP)
Réunion de la direction palestienne sous le portrait du Raïs.
(Photo : AFP)
La mort de Yasser Arafat laisse un vide politique que le Premier ministre de la direction palestinienne veut combler au plus vite en appelant à l’organisation d’une série d’élections à court terme. Face aux échéances qui s’annoncent, l’objectif est notamment de doter les futurs négociateurs d’une légitimité incontestable.

La prochaine étape sera politique. Après la disparition du leader historique palestinien, et le vide qu’il laisse, la direction intérimaire a donc choisi de procéder par le commencement en renvoyant tout d’abord les citoyens aux urnes. Conformément à la loi fondamentale palestinienne, le Premier ministre Ahmed Qoreï s’est engagé samedi à organiser des élections dans les 60 jours, avant le 9 janvier, pour désigner un successeur à Yasser Arafat à la tête de l’Autorité palestinienne. Il précise que des élections municipales se tiendront le mois prochain, et législatives lors du premier trimestre 2005.

La représentation politique palestinienne sera alors entièrement renouvelée et, débarrassée des querelles de succession, dotée d’une légitimité renforcée pour affronter les échéances. Aujourd’hui c’est le chef du Conseil législatif palestinien, Raouhi Fattouh, qui assure l’intérim. Il n’y avait pas eu de scrutin palestinien depuis l’élection triomphale de Yasser Arafat, en 1996. En raison de l’occupation militaire des Territoires palestiniens et de la très vive tension qui subsiste dans la région, l’organisation matérielle du scrutin est un projet compliqué qui nécessitera de la bonne volonté de part et d’autre, mais qui en tout état de cause reste soumis au feu vert des autorités israéliennes.

D’ores et déjà les Israéliens donnent des signes de souplesse. La radio militaire israélienne a indiqué que les policiers palestiniens, autorisés à porter des armes durant les obsèques d’Arafat pour parer à toute éventualité, pourraient continuer à le faire. Après avoir facilité la circulation des Palestiniens lors des funérailles de leur chef, les soldats d’Israël ont desserré le bouclage des localités palestiniennes de Cisjordanie, hormis sur Jénine et Naplouse où il n’a été qu’« allégé ». L’armée a reçu pour consigne de ne conserver qu’un dispositif « défensif », sauf en cas de menace précise, et d’éviter les « frictions » afin de ne pas provoquer « d’escalade de la situation ».

Washington impliqué

Quant au débat sur la question du vote des citoyens palestiniens de Jérusalem-Est, il divise déjà la classe politique israélienne. Malgré l’occupation, puis l’annexion, de la ville par les Israéliens, les Palestiniens avaient pu voter lors du dernier rendez-vous de 1996. Samedi, le ministre israélien des Affaires étrangères Sylvan Shalom s’est déclaré cette fois opposé à une participation des citoyens palestiniens de la partie Est de la ville. Selon la radio publique israélienne, le Premier ministre Ariel Sharon a souligné lors du conseil des ministres de dimanche que cette position ne reflétait qu’une opinion personnelle. Le maire de Jérusalem Ehud Olmert se montre de son côté mieux disposé à un vote palestinien qui se tiendrait à l’extérieur de la ville, tandis que le ministre de l’Intérieur Avraham Poraz, membre du parti centriste Shinoui, se prononce sans ambiguïté pour une participation de tous les Palestiniens au scrutin.

Officiellement, aucune demande palestinienne n’a été transmise aux Israéliens et aucune date précise n’a été fixée pour la tenue des scrutins. Mais, tant sur place qu’à l’étranger, on a le sentiment qu’un compte à rebours a été déclenché. La commission électorale palestinienne a lancé un appel à la communauté internationale pour l’aider à établir les listes électorales. En visite sur place, le Haut représentant de l’Union européenne pour la politique étrangère, Javier Solana, a promis l’aide de l’Europe. Le président américain et le secrétaire d’Etat sont « en contact » avec la direction palestinienne, a déclaré le chef de la diplomatie américaine Colin Powell qui a assuré avoir également pris « contact avec les Israéliens pour qu’ils puissent aider à s’assurer que le peuple palestinien ait la possibilité de se mouvoir librement et de participer aux élections ».

Hamas et Jihad islamique, le facteur « x »

Dans cette ambiance désormais pré-électorale, des candidatures commencent à émerger. Le nom du nouveau dirigeant de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) Mahmoud Abbas (nom de guerre Abou Mazen) circule comme favori du Fatah, la principale composante de l’organisation palestinienne. Celui de l’ancien responsable de la sécurité dans la bande de Gaza, Mohammed Dahlan, est également évoqué. Samedi, l’épouse du leader emprisonné Marouane Barghouti a indiqué que son mari envisageait de se présenter, lui aussi. M. Barghouti jouit d’une immense popularité, mais il purge plusieurs peines de réclusion à perpétuité pour avoir été reconnu responsable d’attentats sanglants. Plusieurs membres du gouvernement israélien ont vigoureusement écarté toute éventualité d’une candidature du prisonnier qui, de sa cellule, a appelé ses compatriotes à poursuivre la lutte après la mort d’Arafat. Le facteur « x » du paysage politique palestinien réside essentiellement dans l’attitude qu’adopteront les organisations radicales Hamas et Jihad islamique face au projet électoral palestinien.

Cette situation créée par la disparition du leader historique provoque mécaniquement une certaine effervescence diplomatique, caractérisée par les propositions formulées ici et là sur la reprise des négociations en vue d’aboutir à un statut final et à la création d’un Etat palestinien. Suite aux entretiens égypto-américains au Caire, en marge des obsèques de Yasser Arafat, l’idée d’une réunion du Quartette (Etats-Unis, Russie, Nations unies, Union européenne) est à nouveau à l’ordre du jour. Elle pourrait se tenir prochainement, dans la foulée de la rencontre de Charm el-Cheikh consacrée à l’Irak, les 22 et 23 novembre. Le Quartette parraine un processus contenu dans une « feuille de route » dont l’objectif est de conclure une paix juste et durable entre les deux peuples, dans le respect de la sécurité de tous. Les recommandations contenues dans ce document ont été au cours de ces derniers mois malmenées par les événements et l’annonce d’une nouvelle réunion des parrains sonne comme une volonté de réengagement de la communauté internationale dans le conflit du Proche-Orient. Enfin le secrétaire d’Etat Colin Powell est attendu prochainement en Israël ainsi que dans les Territoires palestiniens.



par Georges  Abou

Article publié le 14/11/2004 Dernière mise à jour le 14/11/2004 à 14:59 TU