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Togo

Un dialogue politique difficile

Pour les partis de l’opposition, l’annonce par le président Eyadéma de dissoudre l’assemblée nationale en 2005 et l’organisation des élections législatives sont les actions de séduction  en direction de  Bruxelles. 

		(Photo : AFP)
Pour les partis de l’opposition, l’annonce par le président Eyadéma de dissoudre l’assemblée nationale en 2005 et l’organisation des élections législatives sont les actions de séduction en direction de Bruxelles.
(Photo : AFP)
Louis Michel, commissaire européen à la coopération, au développement et à l’action humanitaire, est attendu dimanche à Lomé pour engager une nouvelle série de discussions avec les principaux acteurs politiques du pays. Sa visite intervient quelques jours après l’annonce par le président Eyadéma pour 2005 de la dissolution de l’Assemblée nationale et d’organisation d’élections législatives anticipées. Ces deux mesures vont dans le sens des exigences de l’Union européenne qui a demandé aux autorités togolaises de réduire «son déficit démocratique». L’opposition dénonce de simples manœuvre de séduction à l’égard de Bruxelles.

De notre correspondant à Lomé

Le vote du nouveau code électoral par le Parlement, acquis au pouvoir, a été reporté sine die pour une troisième fois jeudi sans explication convaincante.  Le même jour, le président de la République, Gnassingbé Eyadéma, a annoncé en conseil des ministres la dissolution de l’assemblée nationale au cours de l’année prochaine et l’organisation des élections législatives avant la fin du premier semestre 2005. Ces décisions interviennent une semaine après une rencontre entre le gouvernement et l’opposition. Cette réunion, qui devait porter sur le cadre électoral, s’est terminée sans avancée notable après plus de quatre heures de discussions.  Les trois partis de l’opposition dite radicale, l’UFC de Gilchrist Olympio, le CAR de Me Yaovi Agboyibo et la CDPA de Léopold Gnininvi, ont présenté une plate-forme de onze propositions après avoir salué le fait que, pour une fois, l’invitation du gouvernement était associée à un  ordre du jour.

Ces partis proposent, entre autres, la réduction des cautionnement pour les candidats aux différentes élections, le rétablissement de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) dans ses fonctions d’organisatrice des élections, le retour au mode du scrutin d’antan , à savoir le système majoritaire à deux tours, l’implication des observateurs nationaux dans le processus électoral et la suppression du délai de résidence sur le territoire  national pour les candidats aux élections présidentielles et aux législatives. Ces propositions ont provoqué  une vive  réaction de la part des autres partis, le RPT, qui est au pouvoir, la CPP d’Edem Kodjo et le PDR de Zarifou Ayeva, ainsi que de la part de deux associations de la société civile qui soutiennent le gouvernement dans le cadre de la réalisation des 22 engagements qu’il a pris à Bruxelles le 14 avril 2003.

Le gouvernement a promis se travailler sur les propositions de l’opposition. Il faut rappeler que le projet de code électoral en étude actuellement à l’Assemblée Nationale a été rédigé par un comité mis en place le 30 juin dernier par le Premier ministre et composé des membres du RPT, de la CPP, du PDR et de la société civile. Les trois partis de l’opposition dite radicale avait, à l’époque, boycotté ce comité. Au moment des discussions de ce projet au Parlement, le président de l’Assemblée Nationale avait invité en vain ces trois partis à rattraper le train en marche en versant leurs propositions à la commission des lois du parlement pour étude.

Les engagements envers Bruxelles

«Nous n’allons pas tourner en rond tout le temps. Ils (ces trois partis d’opposition) font tout pour retarder la normalisation des relations entre le Togo et l’Union Européenne. Ces propositions sont fantaisistes. Comment ils peuvent demander la suppression du délai de résidence sur le territoire national des futurs présidents de la République et députés alors que cette disposition a été appliquée aux candidats des élections depuis 1993 auxquelles ces partis ont participé ? Alors que le gouvernement fait tout pour respecter le délai fixé par l’Union Européenne qui voudrait que le Togo annonce la date des législatives avant la fin  de l’année 2004, au risque de perdre 20 millions d’euros du reliquat du 9ème Fond Européen de Développement, ces partis font tout pour priver les populations de ces aides», avait déclaré un cadre du RPT à la sortie de la rencontre entre le pouvoir et l’opposition du 15 décembre dernier. Le parti d’Edem Kodjo estime que les limites du cadre électoral, doivent être conformes aux engagements auxquels le gouvernement a souscrit à Bruxelles .

Pour les partis de l’opposition radicale, le report sine die du vote du code électoral par le parlement et l’annonce du chef de l’Etat de dissoudre l’assemblée nationale en 2005 sont les actions de séduction du pouvoir  en direction de  Bruxelles. En effet le commissaire européen à la coopération, au développement et à l’action humanitaire, Louis Michel, est attendu à Lomé dimanche pour donner un coup de pousse au dialogue intertogolais. Cette visite a poussé le pouvoir à faire des gestes dans le sens des attentes de l’Union Européenne qui exigeait l’adoption d’un cadre électoral consensuel et l’annonce de la date des prochaines législatives anticipées avant le 31 décembre 2004. « La dissolution annoncée de l’Assemblée RPT n’est pour l’instant qu’une simple intention du Chef de l’Etat. Il faut attendre les mois à venir pour voir si ce dernier est réellement à même de prendre le risque de sacrifier une Assemblée monocolore dont il se sert pour gérer le pays à sa guise. Je crains pour l’instant qu’il ne s’agisse davantage  d’un clin d’œil de charme en direction de l’Union Européenne», indique Yaovi Agboyibo.

Selon certains observateurs, la bataille autour du code électoral est une perte de temps. «On peut avoir un code électoral parfait accepté par les partis. On peut organiser des élections bien transparentes, le perdant (généralement l’opposition) criera toujours à la fraude. C’est un classique connu en Afrique», avoue un diplomate en poste à Lomé. C’est peut-être pour cela que certains dirigeants recommandent plutôt la formation d’un gouvernement de transition ou d’union nationale, convaincus que les élections ne régleront  pas la crise togolaise. L’arrivée du commissaire européen pourra-t-elle décanter la situation ?



par Guy  Mario

Article publié le 26/12/2004 Dernière mise à jour le 26/12/2004 à 11:46 TU