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Cedeao

Mamadou Tandja, nouveau président

Mamadou Tandja, président en exercice pour l'année 2005.(Photo : AFP)
Mamadou Tandja, président en exercice pour l'année 2005.
(Photo : AFP)
Réuni le 19 janvier, à Accra, au Ghana, le 28ème sommet annuel de la Communauté économique des (quinze) Etats d'Afrique de l'Ouest (Cedeao) s’est donné pour président en exercice le chef de l'Etat nigérien, Mamadou Tandja. Réélu à la magistrature suprême du Niger en décembre 2004, Mamadou Tandja prend pour un an la relève de son homologue ghanéen, John Kufuor. Comme son prédécesseur, qui a effectué deux mandats à la tête de la Cedeao, le président Tandja sera confronté à un dossier ivoirien qui échappe largement à l’organisation sous-régionale.

«Je vais poursuivre les efforts de paix en Côte d'Ivoire et exhorter toutes les parties à en finir avec ce conflit fratricide», proclame le nouveau président en exercice de la Cedeao qui ambitionne de «promouvoir une stabilité politique adéquate» aux «plans régional et international». Pour autant, les quinze Ouest-Africains n’ont pas manqué de réaffirmer à Accra «leur soutien aux initiatives du Conseil de sécurité des Nations unies et de l'Union africaine pour rétablir la paix» en Côte d’Ivoire. Le secrétaire exécutif de la Cedeao, Mohammed Ibn Chambas a même jugé utile d’enfoncer le clou en expliquant que «les chefs d'Etat ont réaffirmé leur confiance dans les accords de Marcoussis et d'Accra III comme unique voie à suivre pour la résolution de la crise» ivoirienne. En mars 2003, la capitale ghanéenne avait en effet été le théâtre d’une réunion des dix signataires des accords inter ivoiriens concoctés dans la banlieue parisienne. Après avoir validé Marcoussis à Accra, la diplomatie ouest-africaine a d’ailleurs cédé le pas à une action panafricaine confiée en novembre dernier au Sud-Africain Thabo Mbéki.

La Cedeao n'a pas abouti en Côte d'Ivoire

Le Nigeria, abrite à Abuja le siège de la Cedeao. Membre du Groupe de contact sur la Côte d’Ivoire (à l’instar du Niger), le géant ouest-africain n’a pas tenté de disputer à Pretoria le rôle de médiateur dans la brûlante crise ivoirienne. Pour sa part, pas plus que le Ghana, le pauvrissime Niger, n’a l’envergure suffisante pour jouer en la matière un quelconque rôle de locomotive diplomatique. Bien qu’unanimement salués, les efforts de conciliation du président Kufuor n’ont pas abouti. Et au plan militaire, le 4 avril 2004, le Secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan «a transféré l’autorité de la Minuci et des forces de la Cedeao à l’Onuci». En clair, les quelque 1 300 soldats ouest-africains déployés en Côte d’Ivoire portent désormais le casque bleu onusien. Même les ambitions de gendarme régional du Nigeria ont trouvé leurs limites en Côte d’Ivoire.

Sous la férule nigériane, les forces de l’Ecomog (Economic community of west african states cease-fire monitoring group) avait pourtant tenu la tête d’affiche au Libéria comme en Sierra Leone, dans les années quatre-vingt-dix. Et cela pas seulement pour contrôler le cessez-le-feu, mais aussi pour imposer la paix. En 1998-1999, les troupes ouest-africaines avaient aussi été appelées en renfort en Guinée Bissau où la Cedeao se promet aujourd’hui de contribuer à sécuriser des élections «libres et régulières» en mai 2005. En Côte d’Ivoire, l’année qui commence verra l’échéance du mandat présidentiel du président Gbagbo, en octobre. Le calendrier électoral paraît de plus en plus compromis et visiblement le bourbier ivoirien ne saurait s’assécher avec quelques bonnes paroles diplomatiques et autres recommandations. Tentaculaire, le conflit ivoirien implique très diversement les Etats d’une région dont il est en train de ruiner les fragiles équilibres économiques.

«Nous allons continuer à entretenir des rapports de bon voisinage dans la région pour faire en sorte que les Ivoiriens puissent vivre en paix, pour qu'ils voient au-delà de leurs intérêts personnels et pour qu'ils fassent l'effort de mettre en oeuvre le plan de paix, afin qu'elle revienne dans leur pays avec le soutien de la Cedeao», annonce Mamadou Tandja. «Cela accompli, nous pourrons nous concentrer sur le développement de la sous-région, dont notre peuple a tant besoin», conclut-il. Avec lui, la Cedeao n’a visiblement pas fait le choix d’une offensive diplomatique. Pour avoir jadis lui-même surfé de coup d’Etat (avec Seyni Kountché en 1974) en jeu de chaises musicales militaires (avec Daouda Mallam Wanké en 1999), avant d’être finalement consacré par les urnes, le colonel à la retraite Mamadou Tandja paraît surtout disposé à ne rien brusquer à la Cedeao.

Dans son discours d’investiture, Mamadou Tandja projette de «travailler à impliquer les populations de notre espace communautaire en vue de construire une véritable communauté des peuples». En attendant la paix et la sécurité qui le permettront, les 15 «ont adopté une politique agricole commune dans le but d'assurer une stabilité alimentaire durable, l'utilisation rationnelle des ressources naturelles de la région et une rémunération décente» pour les travailleurs de l’agriculture, indique le secrétariat de la Cedeao. Ils se sont aussi «engagés à améliorer l'alimentation en électricité dans la région à travers un investissement accru pour la production et la distribution». La Cedeao peine à tenir ses promesses de paix, de stabilité et d’intégration économique répétées chaque année depuis trois décennies. Mais dans chacun de ces domaines, les décisions concrètes se prennent ailleurs.


par Monique  Mas

Article publié le 20/01/2005 Dernière mise à jour le 20/01/2005 à 17:43 TU