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Le «guide du respect» pour faire la paix

«Sans faire d'alarmisme, il faut être juste et ne pas hésiter à employer ce mot».
(Photo : <a href="http://www.niputesnisoumises.com" target=_BLANK>www.niputesnisoumises.com</a>)

Il y a des tensions entre jeunes, et pas seulement dans les banlieues. Le «guide du respect», réalisé par l’association Ni putes ni soumises, essaie de donner les bases d’une nouvelle cohabitation entre jeunes garçons et jeunes filles. L’agence de publicité BETC Euro RSCG a mis ses compétences au service de ce nouveau combat pour l’égalité des sexes.

C’est après la marche des femmes, organisée par Ni putes ni soumises en 2003, que l’idée de ce guide s’est imposée. En parcourant la France à la mémoire de Sohanne (brûlée vive dans le local poubelle d’une cité de la banlieue parisienne), les jeunes fondateurs de l’association ont rencontré beaucoup d’autres jeunes. Par la suite, des questions, des témoignages sont remontés à l’association ; des mails, des lettres, auxquels le guide essaie de répondre.

Ce guide est organisé autour de trois thèmes : sexualité, traditions, et violences. Sur la sexualité, explique Safia Lebdi, vice-présidente de Ni putes ni soumises et qui a écrit le guide, «on a voulu donner un ton différent et donner des clés aux jeunes filles et aux jeunes garçons contre le discours rentre-dedans». L’association formalise cette question de la sexualité en expliquant qu’elle se résume trop souvent à l’alternative suivante : soit les filles sont considérées comme des «filles des caves» (dites des «putes»), soit comme des objets de pureté qui respectent la loi des pères et des frères. Entre les deux, pas de place pour les sentiments, ni pour une relation d’égalité entre les filles et les garçons. C’est pourquoi une éducation sexuelle qui prend en compte cet état des lieux et réhabilite les notions de désir, d’amour, et de partage, est nécessaire, indique NPNS.

Quelques articles du code pénal

«Le guide du respect» parle donc du désir, de la première fois qu’un(e) adolescent(e) va faire l’amour. Il rappelle qu’en France, chacun dispose librement de son corps, que dans notre pays l’homosexualité n’est pas un délit. Le guide n’oublie pas les conseils pratiques - il faut se protéger du sida - , la contraception. Quelques articles du code pénal sont rappelés noir sur blanc. Côté contacts, des numéros de téléphone sont donnés pour s’informer ou demander de l’aide. Tout le chapitre est étayé de témoignages où l’on voit que les filles notamment se savent pas toujours comment répondre aux demandes des garçons.

Estimant que la question est suffisamment débattue en France, ce guide ne met pas l’accent sur l’excision. Pendant la conférence de présentation du guide, un représentant du pôle jeunes de l’association a fait remarquer que les jeunes garçons se posent des questions quand ils voient quatre hommes adultes empoigner une jeune fille pour l’exciser dans une salle de bains, il y a du sang partout.

Un chapitre entier est consacré aux traditions. En France, 70 000 jeunes femmes sont concernées par le mariage forcé. «Tu peux dire non car la loi te protège»,  précise le guide qui donne aussi des informations sur la législation qui s’applique en France, et à l’étranger ; et quelle est la différence si une jeune fille est de nationalité française, binationale, ou de nationalité étrangère. Virginité, polygamie, le guide essaie de remettre les idées en place et recommande aux jeunes filles d’être vigilantes. Chaque fois la présentation question/réponse et les témoignages donnent dans le concret.

«Ca leur parle»

Ce jeune homme qui raconte l’effroi des jeunes garçons devant une excision parle aussi de son expérience à l’intérieur d’un lycée. Représentant de NPNS, il a entendu dans la cour de l’établissement les insultes entre jeunes, devenues banales. Le guide s’emploie dont à dénoncer la violence verbale, comme d’ailleurs la violence physique. Un débat a eu lieu dans un lycée parisien. Les élèves étaient contents qu’il y ait des témoignages dans le guide, «ça leur parle», déclare Latifa Zoubir, responsable du pôle jeunes à l’association. «Cette notion de respect les interpelle. Ils ont appris plein de choses dans ce guide ».

«L’égalité passe par le respect du féminin, il faut que les jeunes filles puissent être féminines sans se cacher. C’est une manière de maintenir l’égalité». La première agence européenne de publicité s’est impliquée dans le lancement du guide en montant gratuitement une campagne de communication. «C’est un mouvement qui tient à cœur ; on se reconnaît dans NPNS ; nous on sait faire ça, vous pouvez venir chez nous ; c’est pas une problématique d’agence, c’est des gens qui veulent s’impliquer». La jeune pédégère de BETC Euro RSCG, Mercedes Erra, a décidé de soutenir Ni putes ni soumises et d’aider l’association. Tout le monde s’y est mis pour créer cette campagne et la réaliser gratuitement. Les afficheurs, eux aussi, offrent de l’espace, notamment la SNCF, avec des panneaux d’affichage surtout dans les gares de banlieue.   

« Quand une petite fille grandit, elle devient une femme, pas une pute », dit l’une des deux affiches. « Sans faire d’alarmisme, il faut être juste et ne pas hésiter à employer ce mot, explique Mercedes Erra. Les affiches feront donc connaître le guide, diffusé à 100 000 exemplaires dans les CIDJ (les centres d’information de la jeunesse), les maisons de quartiers, les comités locaux de NPNS.

Les services du Premier ministre ont donné 40 000 euros, le ministère de la parité et de l’égalité professionnelle, 20 000 euros. En revanche le ministère de l’éducation n’a pas donné son agrément à la diffusion du guide dans les établissements scolaires. «C’est compliqué pour eux parce que ce n’est pas un produit labellisé Education nationale», a expliqué Safia Lebdi. 800 interventions sont cependant prévues dans des établissements scolaires pour en parler.      

par Colette  Thomas

Article publié le 31/03/2005 Dernière mise à jour le 31/03/2005 à 17:32 TU