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Espagne

Le recul des Basques modérés

Le PNV de Juan José Ibarretxe (au centre), le chef du gouvernement basque, perd quatre sièges au parlement régional.(Photo: AFP)
Le PNV de Juan José Ibarretxe (au centre), le chef du gouvernement basque, perd quatre sièges au parlement régional.
(Photo: AFP)
Les élections régionales organisées dimanche au Pays Basque ont vu le recul de la coalition des nationalistes modérés emmenée par Juan José Ibarretxe. Le président régional sortant dispose désormais d’une marge de manœuvre beaucoup plus réduite pour tenter d’imposer son plan de souveraineté. Et le gouvernement espagnol espère profiter de cette nouvelle donne politique pour réussir à imposer une nouvelle formule d’autonomie.

Les prévisions optimistes de Juan José Ibarretxe ne sont pas réalisées. Le président du Parlement basque avait expliqué la semaine dernière que les élections régionales allaient lui permettre «d’obtenir sans aucun problème une majorité pour gouverner». Il fallait pour cela que la coalition au pouvoir, composée du Parti nationaliste basque (PNV) et de la petite formation Eusko Alkartasuna (EA), parvienne à emporter au moins 38 des 75 sièges en jeu. Or, elle n’en dispose que de 29 à l’issue du scrutin organisé dimanche. Voilà quatre ans, la liste PNV-EA avait fait mieux puisqu’elle avait obtenu 33 sièges. Et la participation de la population basque avait alors également été bien meilleure, atteignant près de 79% contre 69% dimanche.

Ce résultat est, en premier lieu, une défaite pour Juan José Ibarretxe, président basque sortant et candidat à sa propre succession. Il avait décidé de convoquer ces élections après le rejet en février par le Parlement espagnol d’un projet de réforme du Pays basque qui prévoit un nouveau statut politique fondé sur le principe de la «libre association» de la région basque à l’Espagne. Ce projet connu sous le nom de plan Ibarretxe vise à doter le Pays Basque d’une plus grande autonomie. Et son auteur avait besoin d’une large victoire lors de ces élections régionales pour tenter de l’imposer, envisageant de le soumettre prochainement à référendum.

Trois blocs politiques

Les nationalistes modérés du PNV se retrouvent du coup dans une situation inconfortable. Car même si Juan José Ibarretxe insiste sur le fait que la coalition qu’il dirige a gagné ce scrutin, il ne fait pas de doute qu’elle ne dispose plus du même soutien. A l’inverse, le Parti socialiste d’Euskadi, branche régionale du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) du chef du gouvernement espagnol José Luis Rodriguez Zapatero, obtient cinq sièges supplémentaires par rapport aux élections régionales de 2001, passant de 13 à 18, et devient ainsi la deuxième force politique du Pays Basque. La troisième est le Parti populaire (PP), la formation de droite défaite l’an dernier lors des législatives, qui possède désormais 15 sièges, soit quatre moins que lors de la législature précédente.

Cette répartition des sièges contraint le PNV à se chercher de nouveaux alliés au sein du Parlement pour tenter de conserver une majorité relative. Or, la seule formation capable de faire pencher la balance en sa faveur est le Parti communiste des terres basques (PCTV-EHAK), qui réalise, avec neuf représentants, une entrée fracassante dans cette assemblée régionale. Le quotidien El Mundo explique dans son édition de lundi que cette formation n’a vu officiellement le jour qu’en septembre 2002, parvenant ensuite à occuper les espaces laissés vacants par la formation Aukera Guztiak. Cette dernière n’a pas pu participer à ces élections en raison de ses liens avec la formation indépendantiste Batasuna, considérée comme la vitrine politique du mouvement séparatiste armé ETA et interdite par les autorités espagnoles en 2003. Et il semble évident, au vu des résultats, que Batasuna avait donné à ses partisans une consigne de vote en faveur du PTCV-EHAK.

Batasuna en toile de fond

Le résultat de ce scrutin fait, du coup, l’objet de vives critiques au sein de la droite espagnole. «En tant que démocrate, cela fait mal. ETA et Batasuna étaient représentées dans cette élection. C’est un véritable revers pour la démocratie», a déclaré Carmelo Barrio, secrétaire général du Parti Populaire, en accusant le gouvernement socialiste de ne pas avoir écarté cette formation du scrutin. Voilà une semaine, le ministère de la Justice avait indiqué ne pas disposer de «preuves explicites» concluant à l’existence de liens entre PTCV-EHAK et Batasuna, José Luis Rodriguez Zapatero expliquant alors qu’il n’était pas possible de se livrer à des «mises hors-la-loi préventives».

La nouvelle donne politique du Pays Basque doit permettre, selon le pouvoir espagnol, de relancer le dialogue sur de nouvelles bases. Pour José Blanco, secrétaire du PSOE, les Basques ont démontré que le plan Ibarretxe «fait partie du passé». Cet échec va désormais permettre au chef du gouvernement espagnol de poursuivre sa politique en s’appuyant sur une proposition alternative qui prévoit certes un aménagement du statut d’autonomie du Pays basque, mais toujours dans le cadre de la Constitution espagnole de 1978. Et José Luis Zapatero, qui compte désormais sur un soutien politique plus solide dans cette région, peut espérer voir s’imposer son option à la place du plan Ibarretxe, que les radicaux jugent trop timide et les socialistes trop hardi.


par Olivier  Bras

Article publié le 18/04/2005 Dernière mise à jour le 18/04/2005 à 17:45 TU

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Dominique de Courcelles

Journaliste à RFI

«Le plan nationaliste est vraisemblablement enterré.»

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