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Terrorisme

L'ETA décapitée

D'après le ministre espagnol de l'Intérieur, «<EM>toutes les informations dont disposaient les polices françaises et espagnoles</EM>» indiquaient qu'Iriarte, alias «Antza» et sa compagne se trouvaient à la tête de l'ETA. 

		(Photo: AFP)
D'après le ministre espagnol de l'Intérieur, «toutes les informations dont disposaient les polices françaises et espagnoles» indiquaient qu'Iriarte, alias «Antza» et sa compagne se trouvaient à la tête de l'ETA.
(Photo: AFP)
Le chef politique de l’organisation terroriste basque ETA, Mikel Albizu Iriarte, dit «Antza», a été arrêté dimanche dans un village du pays basque français. Il se trouvait aux côtés de sa compagne, Soledad Iparragirre Genetxea ou «Anboto», elle aussi impliquée dans l’organisation et recherchée par la justice espagnole pour sa participation à plusieurs assassinats. L’arrestation du couple de terroristes a eu lieu dans la cadre d’un vaste coup de filet au cours duquel 17 personnes ont été interpellées et plusieurs caches d’armes découvertes.

En capturant «Antza» et «Anboto», la police française a réussi à décapiter l’aigle à deux têtes de l’organisation terroriste basque ETA. Respectivement chef politique et responsable des «commandos légaux» et du financement de ce mouvement indépendantiste, «Antza» et «Anboto» étaient en cavale depuis plusieurs années. Tous deux sous le coup de mandats d’arrêts, ils vivaient dans la clandestinité avec leur petit garçon dans une villa isolée proche du village de Salies-de-Béarn dans les Pyrénées-Atlantiques. C’est là qu’ils ont été interpellés le 3 octobre par la police française, à la suite d’une vaste opération menée contre les bases arrières d’ETA installées dans la région.

Au-delà même de l’arrestation de deux dirigeants historiques de l’organisation terroriste basque, c’est toute l’infrastructure logistique d’ETA qui a été atteinte. Dix-sept personnes ont, en effet, été interpellées dès dimanche sur les différents sites où se sont déroulées les perquisitions, organisées en présence de la juge antiterroriste Laurence Le Vert et de quelque 140 membres des forces de l’ordre issus notamment du RAID, l’unité d’élite de la police, et de la division nationale antiterroriste de la police judiciaire. Mais surtout, des caches d’armes dans lesquelles se trouvaient des quantités impressionnantes de munitions et d’explosifs ont été découvertes à Urrugne, Saint-Pierre-d’Irube, Briscous, Ayherre. Lance-roquettes, fusils mitrailleurs, grenades étaient entreposés dans des planques souterraines particulièrement bien dissimulées où les policiers français ont aussi retrouvé 300 kilos de chlorate de potassium, 400 kilos de dynamite et un tunnel de tir qui servait à s’entraîner. De la documentation sur ETA et des sommes importantes en argent liquide ont aussi été saisies sur les différents sites perquisitionnés.

Une étroite collaboration franco-espagnole

Cette opération policière a été saluée des deux côtés des Pyrénées. Le ministre de l’Intérieur espagnol, José Antonio Alonso, a parlé d’événement «historique» et s’est félicité de voir la France mettre la lutte contre l’organisation terroriste basque au rang d’une «affaire d’Etat». Son homologue français Dominique de Villepin a fait écho à la satisfaction espagnole et a mis l’accent sur les résultats obtenus grâce à l’étroite collaboration des services de police et de justice des deux pays dans cette affaire. Il a ainsi déclaré que cette opération «anti-ETA» était «le fruit d’une longue investigation commencée en 2000 par la Garde civile espagnole et la Direction centrale des renseignements généraux» .

Depuis quelques mois, une coopération franco-espagnole revigorée dans la lutte contre le terrorisme a en effet permis de porter des coups très durs à ETA, pour la plus grande satisfaction des Espagnols frappés depuis de longues années par des attentats menés par cette organisation. Le coup de filet de dimanche fait suite à celui de juin dernier qui avait permis l’arrestation d’un autre dirigeant important de l’organisation, Ignacio Lopez de Vergara Astola, dit «Yves», qui était chargé de la formation et du recrutement pour ETA. Quelque temps auparavant, deux autres personnalités du mouvement, Felix Ignacio Esparza Luri, alias «Navarro», chef présumé de l’appareil logistique, et Felix Alberto Lopez de la Calle, appelé aussi «Mobutu», considéré comme l’un des dirigeants «historiques» de l’organisation, avaient eux aussi été capturés.

Pour autant, les spécialistes rappellent qu’il ne faut pas crier victoire trop vite. Si ETA sort incontestablement affaiblie de ces vagues d’arrestations, il ne faut pas en déduire que l’organisation n’est plus dangereuse. Le ministre espagnol de la Justice, Joseba Azkarraga, a d’ailleurs expliqué qu’ETA avait une grande capacité à se «régénérer», notamment parce qu’elle «jouit d’une base sociale importante». La dernière opération de grande envergure menée en 1992 contre l’organisation, au cours de laquelle l’état-major d’ETA avait été entièrement démantelé, n’a en effet pas permis de mettre un terme aux activités terroristes de ses membres.

C’est d’ailleurs à la suite des ces événements qu’«Antza» est devenu le chef politique et le stratège du mouvement. Son arrivée a coïncidé avec l’abandon des attentats «aveugles» mais 120 assassinats ont tout de même été commis par ETA durant la période où il a été le dirigeant politique de l’organisation. Si «Antza» lui-même n’a jamais été directement impliqué dans des attentats et n’est accusé d’aucun crime de sang, sa compagne, «Anboto», est par contre soupçonnée d’avoir participé à au moins quatorze meurtres. Les deux terroristes sont issus de familles de basques militants d’ETA et font partie des membres «historiques» de l’organisation. Ils n’ont fait aucune déclaration lors de leur interpellation.

par Valérie  Gas

Article publié le 04/10/2004 Dernière mise à jour le 03/11/2004 à 13:06 TU

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