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Togo

Présidentielle: une journée émaillée d’incidents

Une femme togolaise dépose son bulletin dans l'urne, à Lomé, le 24 avril 2005.(Photo: AFP)
Une femme togolaise dépose son bulletin dans l'urne, à Lomé, le 24 avril 2005.
(Photo: AFP)
Les opérations de vote se sont déroulées dans un climat de suspicion et de tension qui a engendré par endroits des échauffourées. L’opposition dénonce une fraude massive.

Les opérations de vote ont débuté dans le calme. Mais d’entrée de jeu, une attitude des « officiels » du ministère de l’Intérieur est restée sans explications. En application d’une « directive » du ministère de l’Intérieur, ils ont évacué assesseurs, délégués de liste et autres représentants des candidats, des bureaux pour se retrouver seuls, avant de les autoriser quelque trente minutes plus tard, à reprendre place dans les bureaux de vote. Aucune autre explication n’est fournie, mais partout, les opérations démarrent un calme relatif. A la mi-journée le ministère de l’Intérieur a annoncé un taux d’affluence de 52%.  

Dans les principales villes du pays, les  opérations de vote se déroulent dans une ambiance tendue. Cette élection à un tour entre trois candidats est devenue un duel entre le candidat de la coalition de l’opposition, Emmanuel Bob Akitani et celui du parti au pouvoir, le Rassemblement du peuple togolais (RPT), Faure Gnassingbé qui s’est acquitté de son devoir civique, tôt ce matin, au camp militaire RIT de Lomé. Son père, feu général Eyadéma avait là ses habitudes. Faure Gnassingbé a choisi, peut-être par superstition, d’emboîter le pas à son père qui avait l’habitude de voter dans ce même bureau.

Faure Gnassingbé, visiblement satisfait du déroulement des opérations, s’est installé dans une posture de futur président et promet de former un gouvernement d’union nationale et d’ouverture « en fonction des résultats et de la façon dont le peuple se sera exprimé ». Côté coalition de l’opposition, le discours est plutôt à la vigilance, « car notre victoire ne fait aucun doute. (…) Si comme dans le passé, le régime annonce sa victoire, cela va très mal se passer », prévient Jean-Pierre Fabre, le secrétaire général de l’Union des forces du changement (UFC), le principal parti de la coalition de l’opposition. Emmanuel Bob Akitani, après avoir voté et pris des renseignements des différents bureaux de vote, dénonce « des bourrages d’urnes se font à une grande échelle et on ne m’a pas signalé un seul bureau où tout se passe bien », a-t-il déclaré.

Des bagarres ont éclaté entre militants de deux bords qui s’accusaient de provocations ou de tentatives de fraudes. La Force de sécurité de l’élection présidentielle (FOSEP), spécialement créée pour l’occasion, a multiplié les interventions dans la capitale togolaise à l’heure de fermeture des bureaux de vote. Des rumeurs d’urnes enlevées, remplacées, ou farouchement défendues circulent et échauffent les esprits. La coalition de l’opposition a appelé à la vigilance et exhorte ses militants à assister au dépouillement. Mais selon de nombreux témoins joints par téléphone, une grande confusion règnerait à Lomé. Les mêmes sources indiquent que des urnes auraient été enlevées par des forces de l’ordre qui prétendent les « sécuriser » alors que le dépouillement devrait être public et sur le lieu de vote.

La nouvelle se répand très rapidement et des jeunes, militants de l’opposition, prennent position et érigent des barricades sur certaines artères de la ville de Lomé que les forces de l’ordre s’emploient à dégager à coups de grenades lacrymogènes pour les rendre à la circulation. Ces interventions alimentent des rumeurs « de reprise en main » par le pouvoir et précipitent l’opposition à rendre publics certains procès verbaux de bureaux de vote, une manière pour elle de prendre le peuple à témoin. Par ailleurs, certains réseaux de téléphones portables restés inaccessibles, en ce jour de vote, sont volontiers imputés à une conspiration du pouvoir. A Lomé on refuse de croire à une saturation du réseau.

Dans le reste du pays, la tension est tout aussi vive. Le déploiement des forces de l’ordre dans les principales villes du Togo est visible au moment ou débute le dépouillement des urnes. La commission électorale mixte indépendante (CEMI) n’a pas fixé de date pour la proclamation des résultats.


par Didier  Samson

Article publié le 24/04/2005 Dernière mise à jour le 24/04/2005 à 17:32 TU