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Ile Maurice

Enjeux économique et ethnique au cœur des législatives

Le Premier ministre sortant, Paul Bérenger.(Photo: Abdoollah Earally/RFI)
Le Premier ministre sortant, Paul Bérenger.
(Photo: Abdoollah Earally/RFI)
Plus de 800 000 Mauriciens sont appelés aux urnes dimanche pour élire un nouveau gouvernement. Deux blocs s'opposent : l’Alliance MSM/MMM dirigée par le Premier ministre sortant, Paul Bérenger, et l’Alliance Sociale, une coalition de six partis emmenée par le travailliste Navin Ramgoolam. Les résultats de ces législatives seront connus dès lundi après-midi.

De notre correspondant à Port-Louis

C’est un chiffre record :  645 candidats brigueront les 70 sièges dans les 21 circonscriptions de l’Ile. Parmi les 70 députés, 62 seront élus au suffrage universel, les huit autres étant désignés par la Commission électorale selon le Best Loser System mis en place pour éviter une sous-représentation des communautés ethniques au parlement. Les hindous constituent en effet 50% de la population, les musulmans 17% et les Chinois 3%. La constitution de Maurice regroupe les noirs, métis et blancs dans la catégorie «population générale» qui compose les 30% de la population restante.

Paul Bérenger, 60 ans, est le premier non-hindou à occuper le poste de Premier ministre. Issu de la communauté franco-mauricienne, il est arrivé au pouvoir en septembre 2003 grâce à un arrangement électoral avec Sir Anerood Jugnauth, actuellement président. Leader du MMM –le Mouvement militant mauricien–, cet ex-négociateur syndical, détenteur d’une licence en philosophie et en français, brigue un 2e mandat au poste de Premier ministre.

Le travailliste Navin Ramgoolam.
(Photo: Abdoollah Earally/RFI)
Son principal rival, Navin Ramgoolam, 58 ans, médecin et avocat, est le fils de l’ancien Premier ministre Sir Seewoosagur Ramgoolam, décédé en décembre 1985. Leader du Parti travailliste, il a dirigé le pays de 1995 à 2000. Il est depuis cette date le chef de l’opposition.

Erreurs stratégiques dans le secteur du textile

Les élections ont lieu tous les cinq ans à l’Ile Maurice. L’assemblée nationale a été dissoute le 23 avril et Paul Bérenger a le sentiment du devoir accompli : «Nous avons apporté un nouvel espoir là où il y avait désespoir et instauré la cohésion sociale. Nous avons investi massivement dans les secteurs clés de l’économie.  Et par-dessus le marché, nous avons tracé le chemin qui placera Maurice dans le concert des pays ayant des revenus élevés par tête d’habitant».

Mais l’opposition accuse le gouvernement d’avoir commis des erreurs stratégiques sur le textile, qui a connu, selon elle, une contraction de 25% ses quatre dernières années. Selon les chiffres officiels, la croissance de la zone franche durant ses dernières années a été négative avec -6,8% l’an dernier. Et le nombre d’emplois dans ce secteur est passé de 91 000 en l’an 2000 à 67 000 cette année.

Cette fin de mandat de Paul Bérenger coïncide également avec la réforme du régime sucrier en Europe et la baisse annoncée, le mois dernier par la Commission européenne, de 39 % du prix du sucre des pays ACP –Afrique Caraïbes Pacifique–. Le sucre étant le premier pilier de l’économie mauricienne avec quelque 500 000 tonnes en moyenne exportées par an, cette baisse provoquera un manque à gagner annuel d’environ 40 % pour le pays.

Deux approches économiques opposées

Le taux du chômage inquiète également les économistes. Officiellement,  45 000 Mauriciens sont à la recherche d’un emploi. Mais pour de nombreux économistes ce chiffre ne reflète pas la réalité. Et selon l’opposition, il y aurait 70 000 chômeurs.

Pour le chef de l’opposition, Navin Ramgoolam, le prochain gouvernement doit réduire son train de vie. «Nous ferons la chasse au gaspillage. Je réduirai le nombre de ministres de 24 à 19», a d’ores et déjà annoncé le leader travailliste. «Charité bien ordonnée commence par soi. Un seul pour cent du budget national équivaut à 500 millions de roupies mauriciennes –environ 1,4 millions d’euros–», ajoute Rama Sithanen, ex-ministre des Finances et membre de l’Alliance Sociale.

«Les deux alliances n’ont pas la même approche économique», analyse le sociologue Ibrahim Koodoruth. Selon lui, «le gouvernement est pro-libéral et se prépare à faire face à la globalisation. L’opposition, pour sa part, souhaite que les filets de protection soient maintenus et espère jouer sur les relations de Port-Louis avec les pays amis. »

Depuis le lancement officiel de la campagne électorale, le 1er mai, les incidents entre les deux camps ont causé la mort d’un activiste de la majorité. D’autre part, un  partisan de l’opposition est mort électrocuté alors qu’il installait des banderoles. La police a en outre enregistré presque 300 incidents, pour la plupart mineurs. Trente-sept personnes ont été interpellées et 10 000 policiers sont mobilisés.


par Abdollah  Earally

Article publié le 02/07/2005 Dernière mise à jour le 02/07/2005 à 12:49 TU