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Pays-Bas

Ouverture de procès de l’assassin de Théo van Gogh

Mohammed Bouyari l'assassin présumé du réalisateur néerlandais Théo Van Gogh.(Photo : AFP)
Mohammed Bouyari l'assassin présumé du réalisateur néerlandais Théo Van Gogh.
(Photo : AFP)
Avec le procès de Mohammed Bouyari, le Néerlandais d’origine marocaine qui a tué le réalisateur Théo van Gogh, le 2 novembre 2004, au nom de l’islamisme radical, c’est toute une société qui s’interroge sur l’intégration de ses immigres.

De notre correspondante aux Pays-Bas

Au 220 de Spartacussweg, au pied d’un bâtiment administratif d’Amsterdam, une petite foule patientait ce matin. «Je suis venu entendre ce que cet assassin a à dire pour sa défense», déclarait Koos de Waal, un technicien de la télévision, avant d’accéder a une salle réservée au public. Là, sur des rangées de chaises, dans une salle séparée du palais de justice, des citoyens se sont installés pour suivre le procès de Mohammed Bouyari, l’assassin de Théo van Gogh, retransmis en direct sur des écrans de télévision.

L’incertitude demeurait, a l’ouverture du procès, sur la stratégie de défense que suivrait l’accusé. Plusieurs témoins l’ont vu, le matin du 2 novembre 2004, tuer par balles, égorger et poignarder Théo van Gogh, qui se rendait à bicyclette a son bureau. L’avocat de la défense, Peter Plasman, a indiqué que son client ne voulait pas faire de déclaration devant la cour. Mohammed Bouyari, qui a renforcé par son crime un fort ressentiment anti-musulman en général et anti-marocain en particulier, encourt une condamnation à la prison à vie.

Les Pays-Bas sont encore traumatisés par le second meurtre politique qu’ils aient connu en deux ans, après l’assassinat le 6 mai 2002, du leader de droite Pim Fortuyn, par un militant néerlandais de gauche. Mohammed Bouyari, qui a grandi a Overtoomse Veld, une banlieue d’Amsterdam, est considéré par certains comme un «pur produit de la Hollande». «Il a pu préparer et commettre son crime tranquillement, en grande partie grâce a notre tolérance», estime Geert Lankhoorn, un libraire sexagénaire lui aussi venu assister au procès. «Avec Mohammed Bouyari, notre système a clairement montré ses limites», poursuit-il. La peur d’attentats terroristes plus graves encore planait ce matin aux portes du tribunal, ou une forte présence policière a été constatée. «Notre pays court les mêmes risques que Londres ou Madrid», a lui-même reconnu Piet Hein Donner, le ministre de la Justice, après les attentats du 7 juillet a Londres.

Un idéal multiculturel qui bat de l’aile

Quoi qu’il en soit, l’assassin de Théo van Gogh n’appartenait vraisemblablement pas a Al-Qaeda, mais a un groupuscule islamiste basé à La Haye et surveillé depuis plusieurs années par les services secrets. A priori, Mohammed Bouyari en voulait surtout à Théo van Gogh pour ses prises de position provocatrices sur l’islam, dans des débats télévisés, mais aussi pour son court-métrage de fiction intitulé «Soumission», dénonçant sans nuances le sort des musulmanes. Théo van Gogh, mort à 47 ans, avait reçu de nombreuses menaces de mort. Sa sœur, Josien van Gogh, reproche aujourd’hui aux renseignements de n’avoir pas pris au sérieux le danger que représentait Mohammed Bouyari. Ce n’est qu’après la mort du réalisateur que les membres du réseau islamiste Hofstad ont été arrêtés.

A Amsterdam, des enseignants ont tiré l’alarme sur le fait que certains de leurs élèves, issus de l’immigration turque et marocaine, les deux plus fortes communautés étrangères aux Pays-Bas, aient déjà fait de Mohammed Bouyari leur héros. Alors que les études se multiplient, sur les tensions ethniques a l’école, des programmes sont mis au point pour envoyer des professeurs suivre des stages culturels au Maroc et en Turquie, afin de mieux comprendre leurs élèves. Depuis la mort de Théo van Gogh, c’est tout un idéal multiculturel qui bat de l’aile.


par Sabine  Cessou

Article publié le 11/07/2005 Dernière mise à jour le 11/07/2005 à 15:43 TU