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Arabie Saoudite

Le dernier adieu au roi Fahd

Plus de 36 nations ont été représentées, lors d’une cérémonie funéraire extrêmement simple, dans le respect du rite rigoriste wahhabite.(Photo : AFP)
Plus de 36 nations ont été représentées, lors d’une cérémonie funéraire extrêmement simple, dans le respect du rite rigoriste wahhabite.
(Photo : AFP)
Une nuée d’émissaires et des chefs d’Etat du monde entier ont afflué aux obsèques du roi Fahd, mardi 2 août, à Ryad, au lendemain de sa disparition, à l’âge de 84 ans. Plus de 36 nations ont été représentées, lors d’une cérémonie funéraire extrêmement simple, dans le respect du rite rigoriste wahhabite. L’ancien monarque inhumé, le royaume saoudien prêtera allégeance au nouveau roi, Abdallah ben Abdel Aziz, dès demain.

Tout le gotha politique et religieux mondial s’est donné rendez-vous pour rendre hommage au roi Fahd, une dernière fois, dans la capitale saoudienne transformée en bunker pour l’événement. La cérémonie a commencé par la «prière de l’absent» la mosquée de l'imam Turki Ibn Abdallah, dans le centre de Ryad, en présence du nouveau roi et demi-frère du défunt, Abdallah ben Abdel Aziz. Seuls les hommes de confession musulmane, - dignitaires saoudiens et chefs d'Etat arabes et musulmans -, ont pu assister à cette cérémonie funéraire sans fioriture. Recouvert d’un tissu marron, le corps du roi Fahd posé sur un simple brancard a été porté par huit fidèles jusqu’à l’intérieur de la mosquée. Pendant quelques minutes, le grand mufti Cheikh Abdel Aziz al-Cheikh, plus haute autorité religieuse du pays, a récité les prières rituelles pour le «repos de l'âme du défunt et le pardon de ses offenses».

La dépouille royale a ensuite été transportée en ambulance au cimetière public d'El-Oud, où reposent plusieurs membres de la famille royale, comme son père et fondateur du royaume, Abdel Aziz. Un cortège de dignitaires musulmans, drapés de leur «aba» et coiffés de keffieh à damiers rouges et blancs, a ensuite rejoint le cimetière distant de quelques kilomètres, en limousines noires, ou à l’abri d’ombrelles multicolores. Seule la famille royale a été autorisée à assister à l’inhumation. Enveloppé dans un linceul blanc, son corps a été recouvert de terre, à même le sol, selon la tradition musulmane. Deux petites pierres posées sur sa tombe au niveau de la tête et des pieds, indiquent l’endroit où il se trouve, sans aucune inscription. «Sa tombe sera identique à celle de tous les musulmans», a déclaré le grand mufti.

Chirac et le prince Charles pour l’Europe

Les autorités saoudiennes ont ensuite reçu les condoléances des dignitaires étrangers au Palais du Gouverneur à Ryad, alors que les dirigeants musulmans ont présenté leurs condoléances à la grande mosquée. Etaient présents le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas les présidents du Sénégal Abdoulaye Wade, de Mauritanie Maaouiya Ould Taya, d'Afghanistan Hamid Karzaï, du Bangladesh Iajuddin Ahmed.

Ont également assisté à la cérémonie le Premier ministre irakien Ibrahim al-Jaafari et le président Jalal Talabani, le sultan Hassanal Bolkiah de Brunei, le prince Moulay Rachid, frère cadet de Mohammed VI du Maroc, le président tunisien Zine el-Abidine Ben Ali, le sultan Qabous ben Saïd d'Oman, le roi Abdallah II de Jordanie.

Les présidents égyptien Hosni Moubarak, algérien Abdelaziz Bouteflika, yéménite Ali Abdallah Saleh, libanais Emile Lahoud, syrien Bachar al-Assad, pakistanais Pervez Musharraf ainsi que le prince héritier japonais Naruhito ont aussi fait le déplacement. Le président français Jacques Chirac et le prince Charles représentaient quant à eux l’Union européenne.

Un dirigeant de marque a toutefois brillé par son absence : le président américain George W. Bush a refusé de faire le déplacement, et s’est contenté d’envoyer une délégation conduite par le vice-président, Dick Cheney. Cette absence marque un véritable camouflet pour le royaume wahhabite, qui a entretenu pendant plusieurs années des relations amicales et financières très étroites avec les présidences des Bush, père et fils. Mais depuis les attentats du 11 septembre, leurs rapports se sont dégradés, l’administration américaine reprochant à l’Arabie d’avoir fait naître sur son sol 15 des 19 terroristes à l’origine des attaques. L’Iran chiite, longtemps considérée comme une «rivale» par les Saoudiens sunnites, a également préféré bouder l’événement, de même que l’Indonésie, premier pays musulman au monde, qui reproche à Ryad son soutien aux islamistes radicaux.

Ni deuil national, ni drapeaux en berne

Pour accueillir les hommes forts de ce monde, des «strictes mesures de sécurité ont été prises le long des routes qui seront empruntées par les convois des dignitaires et sur le lieu des obsèques», a indiqué le ministère de l'Intérieur. Tout autour de la grande mosquée, les routes ont été coupées et des milliers de policiers équipés de chiens se sont déployés pour fouiller tout véhicule suspect, et prévenir toute attaque du réseau terroriste al-Qaïda, particulièrement actif dans le royaume, depuis mai 2003.

Malgré l’ampleur donnée à l’événement, les Saoudiens ont dit un dernier au revoir à leur roi, dans le calme, comme le prescrit la doctrine wahhabite, qui proscrit toute forme d’idolâtrie. Plusieurs milliers de fidèles ont tout de même assisté à la prière à l'intérieur et à l'extérieur de la grande mosquée. Ailleurs dans le royaume, aucun drapeau n’a été mis en berne : ce serait blasphématoire de cacher la mention « Il n’a a pas d’autre dieu qu’Allah » inscrite sur chaque bannière. Comme à l’accoutumée, les bureaux et les commerces sont restés ouverts, le royaume n’ayant pas décrété de deuil national. Dès demain, les Saoudiens seront appelés à tourner définitivement la page des 23 ans de règne de Fahd pour prêter allégeance au nouveau roi Abdallah.


par Julie  Connan

Article publié le 02/08/2005 Dernière mise à jour le 03/08/2005 à 10:16 TU