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Indonésie

Aceh : premiers accrocs à la paix

La direction militaire indonésienne d'Aceh accuse le GAM d'avoir violé l'accord de paix.(Photo: AFP)
La direction militaire indonésienne d'Aceh accuse le GAM d'avoir violé l'accord de paix.
(Photo: AFP)
La province d’Aceh, dans l’île indonésienne de Sumatra, a connu un week-end de violences malgré la signature récente d’un accord de paix entre le gouvernement indonésien et le mouvement séparatiste achénais.

De notre correspondant en Indonésie

Deux cadavres mutilés ont été retrouvés dans la province d’Aceh. Les deux hommes ont été torturés avant d’être exécutés. Ils portaient la trace d’une corde autour du cou et des blessures à l'arme blanche sur le torse. Retrouvés lundi matin à l’aube, ils gisaient sous un pont et sont maintenant en cours d’identification. La veille, un  accrochage a opposé des militaires indonésiens à un groupe de séparatistes du Mouvement Aceh Libre (GAM). L’armée affirme que les rebelles ont tiré les premiers, ce qu’a démenti quelques heures plus tard un porte-parole du GAM.

Ces deux incidents interviennent deux semaines seulement après la signature de l’accord d’Helsinki par lequel Djakarta et le GAM se sont engagés à mettre fin au conflit qui agite la région la plus au nord de l’île de Sumatra depuis 1976. Soumis à de très fortes pressions de la communauté internationale, qui s’est engagée à investir cinq milliards d’euros dans la reconstruction des zones dévastées par le tsunami du 26 décembre, le gouvernement indonésien a octroyé un «auto-gouvernement local» à la province. En échange, les séparatistes ont renoncé à l’indépendance et accepté de déposer les armes. Mais le cessez-le-feu sera dur à établir et les violences de ce week-end le confirment.

Dans chaque camps, la trêve ne fait pas l’unanimité. Une partie de l’état-major indonésien estime que la destruction totale du GAM, très affaibli par la grande offensive indonésienne déclenchée en mai 2003, était à sa portée. Du côté séparatiste, c’est le désarmement, négocié par la direction politique du mouvement avec laquelle la branche militaire n’est pas toujours en symbiose, que l’on accepte avec difficulté. Certains commandants s’inquiètent en effet pour leur vie et celle de leurs hommes malgré la présence des trois cents cinquante observateurs internationaux chargés d’encadrer le cessez-le-feu. A Djakarta, on semble pourtant vouloir garder le cap de la paix. «Ces incidents ne remettent pas en question le décret d’amnistie des militants du Gam», a ainsi déclaré le ministre indonésien de la Justice.

Poursuite du retrait militaire

L’amnistie qui doit être promulguée avant le 30 août, et qui bénéficiera aux mille cinq cents prisonniers et  trois milles combattants séparatistes, vient de recevoir l’approbation du Parlement où les opposants à l’accord d’Helsinki demeurent nombreux. Certains craignent qu'un changement de statut à Aceh incite les autres mouvements indépendantistes de l'archipel, aux îles Moluques ou en Papouasie occidentale, à intensifier leur lutte. D'autres voient menacer les différents trafics rendus possibles par l'instabilité dans la province : drogues, coupes illégales du bois ou protections monnayées des raffineries pétrolières.

Mais le Président Susilo Bambang Yudhoyono s’appuie sur une forte légitimité populaire. il a été élu au suffrage direct en septembre 2004 avec 60% des voix, pour imposer un processus dans lequel il joue une grande partie de sa crédibilité nationale et internationale. Il a ainsi ordonné un premier retrait militaire d’Aceh le 22 août dernier malgré les réticences de son état-major. Mille trois cents militaires ont regagné par bateau leur caserne de Java-ouest. Le retrait, progressif et conditionné au désarmement du GAM, devra être achevé avant la tenue des élections municipales prévues en mars 2006. A ce terme, les deux tiers des cinquante mille soldats engagés dans le conflit devront avoir quitté la province. Ne resteront alors que des forces de sécurité locales, soient 7 000 policiers et 14 000 militaires.


par Jocelyn  Grange

Article publié le 29/08/2005 Dernière mise à jour le 29/08/2005 à 12:18 TU