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Indonésie

Un nouvel espoir de paix pour Aceh

De gauche à droite : le ministre indonésien de la Justice et des Droits de l'Homme Hamid Awaludin, le responsable finlandais de la médiation, Martti Ahtisaari, et le chef du Mouvement Aceh libre (GAM) Malik Mahmud après la signature de l'accord de paix d'Helsinki.(Photo: AFP)
De gauche à droite : le ministre indonésien de la Justice et des Droits de l'Homme Hamid Awaludin, le responsable finlandais de la médiation, Martti Ahtisaari, et le chef du Mouvement Aceh libre (GAM) Malik Mahmud après la signature de l'accord de paix d'Helsinki.
(Photo: AFP)
Le Gouvernement indonésien et les séparatistes d´Aceh ont signé un accord à Helsinki pour mettre fin au conflit qui agite depuis 1976 la région dévastée par le tsunami du 26 décembre 2004.

De notre coorespondant à Djakarta

Le compromis d´Oslo est le suivant : les séparatistes achénais renoncent à l'indépendance d'Aceh et obtiennent en contrepartie la création d'un «autogouvernement local». Cette nouvelle institution sera dotée de pouvoirs plus étendus que «l'autonomie spéciale» accordée unilatéralement par Jakarta en 2001. Celle-ci confiait aux autorités locales la gestion des systèmes éducatif et religieux et promettait une meilleure redistribution des revenus tirés du pétrole, dont la province est richement dotée.

L´accord d´Helsinki, signé par le gouvernement indonésien et le Mouvement Aceh Libre (GAM), qui a déclenché une insurrection indépendantiste en 1976 dans la région la plus au nord de l´île de Sumatra, semble plus équilibré que les tentatives de paix précédentes. L´Indonésie préserve l´essentiel, sa souveraineté sur Aceh tandis que le GAM, en participant à la vie politique locale, pourra peser effectivement sur les affaires de la province. L´autre nouveauté d´Helsinki, c´est le déploiement de trois cents cinquante observateurs internationaux, deux cents de l´Union européenne et cent cinquante de l´Association des Nations d´Asie du Sud-est. Ils veilleront à l´application du cessez-le-feu et encadreront le désarmement des combattants du GAM, qui conditionnera le retrait des deux-tiers des cinquante mille soldats indonésiens. La communauté internationale a besoin de stabilité et de sécurité à Aceh alors qu´elle s´est engagée à dépenser cinq milliards d´euros pour la reconstruction des zones dévastées par le tsunami du 26 décembre.

La méfiance

«Le plus dur reste à faire», redoute cependant Yon, un journaliste local. «La confiance sera dure à instaurer. Les séparatistes craignent les représailles des militaires tandis qu´eux-mêmes suspecteront pendant longtemps le GAM de maintenir des caches d´armes dans la jungle», poursuit l´homme originaire de Java, le cœur politique et démographique de l´immense archipel indonésien. Ici, comme ailleurs dans le pays, la population oscille entre espoir et prudence. Le souvenir de l´accord de Genève, signé en décembre 2002, est encore dans toutes les mémoires. L´accord n´avait duré que six mois. L´Etat major indonésien y était opposé et avait poursuivit ses opérations militaires en accusant les séparatistes de profiter du cessez-le-feu pour se réorganiser. L´actuel président, Susilo Bambang Yudhoyono, était alors ministre de la Sécurité, mais son engagement sincère pour un règlement négocié du conflit n´avait pas suffi à faire plier les durs de l´institution militaire. «Il y a toujours eu une lutte de pouvoirs entre l´armée indonésienne et le gouvernement central», explique une enseignante en relations internationales de l´université de Jakarta. «Mais je pense que les pressions politiques exercées actuellement sur l´armée par le gouvernement seront plus efficaces qu´auparavant car le gouvernement est lui-même soumis aux pressions cumulées de la communauté internationale et de la société civile indonésienne», ajoute, optimiste, la jeune femme.

La population achénaise, principale victime de ce conflit qui a fait près de quinze milles morts en trente ans, est moins confiante. «L´accord organise le désarmement du Gam mais rien n´est prévu pour le désarmement des milices paramilitaires indonésiennes», s´inquiète un militant des droits de l´Homme local. «Or, jusqu´à présent, ce sont ces miliciens qui s´occupaient des basses besognes de l´armée», ajoute l´homme qui a passé plusieurs mois en prison dans le passé. Du coté des personnels étrangers déployés pour la reconstruction de la province, on s´inquiète davantage des milices islamistes arrivées par avions militaires dans les semaines qui ont suivi le Tsunami. «Ils nous évitent mais nous savons qu´ils exercent de fortes pressions sur les religieux locaux pour nous discréditer», affirme le responsable d´une Ong anglo-saxonne. Militaires contestataires et islamistes radicaux forment un duo au potentiel de nuisance considérable. Les milices qui ont ravagé le Timor oriental en 1999 ou les islamistes javanais qui ont combattu les indépendantistes chrétiens aux îles Moluques l´année suivante, en offrent un sinistre aperçu. Que des islamistes indonésiens s´en prennent aux occidentaux à Aceh et l´instabilité s´installera dans la province. L´accord d´Helsinki en serait alors la première victime.


par Jocelyn  Grange

Article publié le 15/08/2005 Dernière mise à jour le 15/08/2005 à 17:45 TU