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Pays-Bas

Immigration : le défi de l'intégration

Deux membres du mouvement islamique radical de l'assassin de Theo van Gogh se cachent avant de se rendre au procès le 27 juillet 2005.Photo : AFP
Deux membres du mouvement islamique radical de l'assassin de Theo van Gogh se cachent avant de se rendre au procès le 27 juillet 2005.
Photo : AFP
Le premier anniversaire de la mort du cinéaste Theo van Gogh est vécu comme un événement national. Un an après l'assassinat, perpétré le 2 novembre 2004 à Amsterdam par un jeune islamiste d’origine marocaine, le pays s’interroge toujours sur l’échec de son modèle d’intégration.

De notre correspondante aux Pays-Bas

«Tant que des personnalités politiques comme Geert Wilders et Ayaan Hirsi Ali ne pourront pas sortir leur poubelle sans quatre gardes du corps, la situation dans notre pays pourra être considérée comme très grave». Beaucoup, aux Pays-Bas, partagent l’avis de Maxime Verhagen, chef du groupe parlementaire des démocrates chrétiens (CDA, au pouvoir). Un an après l'assassinat de Theo van Gogh, plusieurs personnalités politiques vivent toujours sous haute protection, en raison des menaces de mort qui leur seraient adressées par des groupuscules islamistes. Pour les Néerlandais, cette anomalie ne fait que prolonger le traumatisme provoqué par le premier acte de terrorisme jamais commis sur leur sol.

Connu pour ses talk-shows houleux et son ton provocateur, Theo van Gogh a été abattu et égorgé le matin du 2 novembre 2004, sur une avenue d’Amsterdam. Trois mois auparavant, Soumission, son dernier film, était diffusé à la télévision. Cette fiction dénonçait sans nuances le sort des femmes musulmanes, présentées comme des victimes de la violence domestique.

Sur le corps du réalisateur, un document de cinq pages a été retrouvé, transpercé d’un poignard : une longue menace de mort à l’encontre de Aayan Hirsi Ali, députée du Parti conservateur (VVD), auteur du scénario de Soumission. D’origine somalienne, arrivée en 1993 aux Pays-Bas pour fuir un mariage arrangé par sa famille, cette jeune femme est partie en croisade contre l’islam, sa religion, qu’elle a reniée après les attentats du 11 septembre. Pendant deux mois, après la mort de Theo van Gogh, elle a vécu en clandestinité aux Etats-Unis, sous l’aile des services secrets. A son retour, elle n’a pas renoncé à son combat.

Suppression de la double nationalité

«L’islam puritain est au coeur du terrorisme», a-t-elle répété le 29 octobre, quitte à déranger encore et toujours dans un pays où la religion compte et où l’intégration ne fait débat que depuis peu. Ce n’est qu’à partir de 2000, avec l’essor du mouvement de droite populiste de Pim Fortuyn, que les tabous imposés par le politiquement correct ont été levés. Critique féroce du modèle multiculturel, Pim Fortuyn a été assassiné le 5 mai 2002 par un Néerlandais de gauche, défenseur de la cause animale.

L’immigration n’en est pas moins restée la grande question nationale. Au gouvernement de centre-droit élu en 2003, elle a inspiré une politique de fermeté qui plaît. Rita Verdonk, ministre à poigne de l’Intégration, est devenue le leader le plus populaire du gouvernement. Parmi ses dernières mesures figurent la suppression de la double nationalité pour les Turcs et les Marocains, ainsi que des tests de langue et de culture néerlandaises obligatoires pour les nouveaux arrivants, mais aussi pour tous les étrangers qui résident aux Pays-Bas depuis 1975.

L’opposition de gauche, de son côté, prône une approche moins répressive. Ses positions, cependant, reviennent souvent à défendre le système «multiculturel» des années 1980, qui voulait voir coexister les communautés en leur laissant gérer leurs propres écoles, leurs lieux de culte et leurs chaînes de télévision. Un modèle dont l’échec est désormais incarné par Mohammed Bouyeri, le Néerlandais d’origine marocaine de 26 ans qui a tué Theo van Gogh l’an dernier.


par Sabine  Cessou

Article publié le 02/11/2005 Dernière mise à jour le 02/11/2005 à 08:29 TU