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Violences urbaines

Le gouvernement français unanime sur la fermeté

Réunion gouvernementale du 3 novembre sur les zones urbaines sensibles.(Photo: Benoît Granier/Matignon)
Réunion gouvernementale du 3 novembre sur les zones urbaines sensibles.
(Photo: Benoît Granier/Matignon)
«Détermination et fermeté», deux mots qui reviennent en leitmotiv depuis dix jours dans la bouche des responsables du gouvernement, tandis que les appels à un «retour au calme» se multiplient. Pourtant, les violences urbaines ne cessent de prendre de l’ampleur. Face à la flambée exponentielle, le gouvernement se serre les coudes et s’organise. L’opinion publique se rallie à cette politique de fermeté, d’après un sondage paru dans le quotidien le Parisien.

La ministre déléguée à la Cohésion sociale et à la Parité, Catherine Vautrin, a déclaré samedi soir sur LCI que le gouvernement était «totalement mobilisé» pour «rétablir l'ordre public» dans les banlieues après neuf nuits consécutives de violences urbaines. «Ce soir, nous avons un gouvernement totalement mobilisé, en lien direct avec l'Elysée, avec deux ministres particulièrement en première ligne, Nicolas Sarkozy (ministre de l'Intérieur) et Jean-Louis Borloo (ministre de l'Emploi et de la Cohésion sociale): justice et fermeté», a-t-elle affirmé.

La nuit de samedi à dimanche a atteint des records avec près de 1 300 voitures brûlées, et plusieurs personnes blessées lors des incidents dans les banlieues qui ceinturent Paris, mais aussi dans le quartier République (à Paris intra-muros), et en province. Face à cette inquiétante contagion des violences urbaines, le gouvernement garde son cap de manière unanime. Nicolas Sarkozy martèle: «La violence pénalise ceux qui vivent le plus durement et le plus modestement. La violence ce n'est pas acceptable. Face aux violences dans les banlieues, le gouvernement est unanime sur la fermeté». Le Premier ministre Dominique de Villepin tient le même discours: «La violence n'est pas une solution, l'Etat républicain ne peut pas accepter la violence». Le chef de l'Etat Jacques Chirac, qui n’a pas encore pris publiquement la parole sur le dossier, affirme au conseil des ministres: «Il faut que la loi s'applique fermement et dans un esprit de dialogue et de respect.(…) prévenons tout amalgame entre une minorité qui sème le désordre et l'immense majorité des jeunes qui souhaitent s'intégrer dans la société et réussir dans la vie».

«Les Français attendent les paroles du chef de l'Etat.»
Nicolas Dupont-Aignan
Député UMP de l'Essonne  [06/11/2005] 01 min 00 sec
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«Un cordon de personnes âgées respectables et de religieux»

Par ailleurs, tandis que la conférence des évêques de France appelle au calme, le recteur de la mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, le plus haut représentant de l'islam en France, relaie des messages apaisants. Après avoir réclamé du gouvernement des «paroles de paix» et être reçu par Dominique de Villepin, samedi, Dalil Boubakeur rassure la communauté musulmane: «Le Premier ministre a voulu exprimer à la communauté musulmane tout entière son estime, son respect et m'a dit que, dans son coeur, elle est à égalité avec tous les cultes de France». Dans les mosquées, les prêches appellent également au calme: «J’ai dit aux fidèles qu’il fallait chercher les causes réelles des incidents. J’ai mis en garde contre la tentation de la violence. J’ai insisté sur le fait qu’il ne fallait pas creuser davantage la fracture sociale. Enfin j’ai invité les parents à prendre au sérieux leur rôle d’éducateurs et à bien encadrer leurs enfants», déclare le recteur de la mosquée Adda’wa rue de Tanger à Paris, Larbi Kechat.

Les maires, les associations et les mères des quartiers sensibles multiplient les initiatives pour mettre en place un dialogue et faire entendre leur réprobation de la violence. Samedi, c’est le maire d’Aulnay-sous-Bois qui organise une marche silencieuse. Ce sont aussi les parents de Bouna et Zyed, les deux adolescents électrocutés le 27 octobre à Clichy-sous-Bois, qui déclarent: «Nous appelons à l’apaisement et au retour au calme, à l’arrêt de toute violence et au sens civique de chacun, car la France ne mérite pas ça». L’imam de Mantes, dans un entretien accordé au journal le Monde, va même jusqu’à imaginer de remplacer les «cordons de CRS par un cordon de personnes âgées respectables et de religieux. Cela s’est fait une fois, aux Mureaux (Yvelines). Il y avait eu une émeute. Le sous-préfet a appelé les responsables des mosquées de la ville. Ils sont sortis dans le rue. Ils ont réussi à établir le dialogue. Les jeunes sont rentrés chez eux ». Et l’imam d’Aulnay-sous-Bois d’insister: «Il faut cesser la violence. Allez le dire autour de vous ! Nous avons plus de droits ici que dans nos pays d’origine ! ».

Les incendiaires changent de stratégie

Pourtant rien n’y fait et les incendiaires continuent de plus belle: destructions de gymnases, de crèches, d’écoles, de restaurants, de grandes surfaces. Usage de voitures béliers, de projectiles de toutes sortes, y compris de batte de base-ball -faisant un nombre indéterminé de blessés à Evreux (Ouest). Jusque-là, les responsables policiers n'avaient évoqué «aucun élément» accréditant une organisation des violences en banlieue. Mais une semaine d'affrontements a aguerri les jeunes, qui se sont adaptés à la réponse des forces de l'ordre. Le procureur général de Paris Yves Bot constate désormais une coordination des émeutiers: «D'ailleurs, souligne-t-il, on peut lire sur certains sites des blogs qui incitent d'autres villes à se joindre au mouvement de la région parisienne». La stratégie mise en place par les bandes répondrait maintenant à «une véritable tactique mobile. (…). Des unités mobiles de jeunes -ou de moins jeunes puisqu'ils sont masqués- arrivent sur des scooters, balancent une bouteille enflammée sur un véhicule puis repartent. Il est extrêmement difficile de les interpeller.».

Les dispositifs de lutte contre les exactions montent en puissance

Face aux escarmouches, les CRS jouent la mobilité aussi, et multiplient les arrestations (quelque 300 personnes dans la nuit de dimanche). Côté logistique, plus de 2 300 policiers ont été mobilisés dans la banlieue parisienne pour venir en renfort aux effectifs locaux habituels; la préfecture de police et la gendarmerie déploient en outre des hélicoptères équipés de vidéos et de projecteurs pour mieux repérer qui sont les émeutiers. Au total, sept appareils ont été employés sur l’ensemble du territoire dans la nuit de samedi à dimanche. Une quinzaine de jeunes, qui jetaient des projectiles depuis le toit d’un immeuble sur les forces de l’ordre, ont pu ainsi être interpellés grâce à l’intervention d’un autre hélicoptère, celui de la gendarmerie. La DST a été également sollicitée pour ses capacités à décrypter les messages sur internet.

«Démissionner serait céder»

«Si le maintien de l'ordre est la priorité, il ne peut être obtenu par une simple action des forces de police, d'autant que la crédibilité du ministre de l'Intérieur est largement entamée», a indiqué Julien Dray, porte-parole du PS, rallié à la partie de la gauche qui, avec le Parti communiste français et le député vert Noël Mamère, réclame la démission du ministre de l'Intérieur. Nicolas Sarkozy, qui a effectué samedi peu avant 1h00 du matin une courte visite-surprise à la direction départementale de la sécurité publique des Yvelines, démissionnera-t-il pour autant ? «Démissionner serait céder. Et donner raison aux voyous, aux casseurs», affirme-t-il, solidement déterminé à mener sa contre-offensive et solidement soutenu par le Premier ministre.

«Le gouvernement doit présenter ses solutions devant la représentation nationale.»
Julien Dray
Député PS de l'Essonne  [04/11/2005] 01 min 00 sec
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Un sondage est paru dans le Parisien, établi sur un échantillon national de 1 002 personnes, et  représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas. D’après les résultats du sondage: 57% des Français ont une bonne image de Nicolas Sarkozy comme ministre de l'Intérieur. Si près des deux tiers des Français (63%) pensent que Nicolas Sarkozy utilise parfois des termes «choquants» pour un ministre, 73% des personnes interrogées jugent aussi que ses interventions sont trop médiatiques dans le contexte actuel de violences urbaines. Toutefois, 62% des Français pensent que le ministre de l'Intérieur a le souci de résoudre les problèmes des Français.



par Dominique Raizon

Article publié le 06/11/2005 Dernière mise à jour le 06/11/2005 à 16:14 TU

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