France
Extension des violences urbaines
(Photo: AFP)
|
Les forces de l'ordre ont comptabilisé, ce samedi à 05H30 (04H30 GMT), 754 véhicules incendiés et procédé à 203 interpellations. Selon les chiffres du ministère de l'Intérieur, un quart des exactions ont eu lieu en province, soit environ 190 véhicules détruits par les flammes. L'incident le plus grave s'est produit en Seine-Maritime où des inconnus ont incendié, à Cléon, un autobus des Transports de l'agglomération d'Elbeuf (TAE). Tous les passagers ont pu sortir sains et saufs du véhicule qui a été totalement détruit. Selon les premiers témoignages, un groupe d'une dizaine de jeunes est monté à bord du bus lors d'un arrêt dans un quartier sensible, puis ils ont lancé des bouteilles incendiaires à l'intérieur du véhicule avant de s'enfuir.
Dans les banlieues de Lille (Nord) et à Arras ou encore à Calais (Pas-de-Calais), des bandes de jeunes ont allumé des feux de poubelles et incendié plusieurs voitures. Au sud, les villes de Bordeaux (Gironde), Pau (Pyrénées-Atlantiques), et Toulouse (Haute-Garonne) ont connu les mêmes harcèlements. A Toulouse, les incidents les plus importants se sont déroulés dans le quartier du Mirail, en bordure du périphérique: dans ce quartier qualifié de «sensible» les émeutiers ont lancé une voiture bélier sur le bâtiment d'une concession automobile Renault. Dans l’est de la France, dans les villes de Strasbourg (Bas-Rhin), et Dijon (Côte d'Or), les services de secours sont intervenus jusqu'à 4h du matin samedi pour éteindre de multiples feux de poubelles et d’incendies de voitures. A l’ouest, Rennes et Rouen ont été touchées par de semblables dégradations.
Les émeutiers changent de tactique, les interpellations augmentent
L’embrasement des banlieues tout autour de Paris et les récents débordements en province témoignent d’un effet tache d’huile. Comme les nuits précédentes, des institutions publiques (établissements scolaires, mairies, commissariats, camions de pompiers) et des intérêts privés (commerces, entrepôts...) ont été pris pour cibles. Toutefois, d’après des sources policières, les émeutiers ont changé de tactique: lorsque les hostilités ont commencé, ils allaient à l'affrontement direct avec les forces de police; maintenant, semblant davantage opter pour le harcèlement, ils commettent leur forfait puis attendent les pompiers ou les policiers avant de se retirer sur un terrain qu'ils connaissent mieux que personne.
|
De leur côté, les forces de l’ordre modifient aussi leur approche de la situation: Un hélicoptère muni d'un projecteur-caméra a même été dépêché sur place. Aucun affrontement n'a en revanche été relevé, ce qui confirme la stratégie d'évitement de la confrontation avec les forces de l'ordre adoptée depuis la nuit précédente par les fauteurs de troubles. Résultat: plus de 200 personnes ont été interpellées, un chiffre en forte hausse, a-t-on appris de source policière : «C'est le résultat d'une action policière qui porte ses fruits», selon le directeur général de la police nationale (DGPN), Michel Gaudin.
Une population exaspérée
Le Premier ministre Dominique de Villepin et son gouvernement, les autorités municipales et les responsables des réseaux associatifs multiplient les rencontres. Ils débattent et réfléchissent sur les moyens à mettre en œuvre pour enrayer la spirale. Les habitants des banlieues touchées se disent, quant à eux, «exaspérés par cette guérilla», surtout ceux qui ont vu leurs locaux de travail incendiés. En réponse à ces violences qui ne cessent d’essaimer, le maire UMP d'Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), Gérard Gaudron, a pour sa part appelé à une marche silencieuse samedi dans sa ville.
|
Entre 2 000 et 3 000 personnes ont défilé pendant environ une heure dans les rues de la ville jonchée de carcasses de voitures calcinées. «Non à la violence, oui au dialogue», pouvait-on lire sur la banderole déployée en tête du cortège, parti vers 11h00 de la caserne de pompiers de la ville de 80 000 habitants. «C'est le signe que la loi républicaine s'applique à tous et qu'on ne va pas céder à la violence», a déclaré Gérard Gaudron. «C'est un signe fort pour montrer à ceux qui font ces émeutes que maintenant, ça suffit.». Les manifestants, de tous âges et de toutes origines, ont applaudi au passage d'un camion de pompiers au pare-brise cassé : «Nos pompiers risquent leur vie ici toutes les nuits, nous devons les soutenir», a dit un manifestant. «Nous sommes tous opposés à ce qui se passe ici», a déclaré un homme originaire d'Afrique du Nord.
par Dominique Raizon
Article publié le 05/11/2005 Dernière mise à jour le 05/11/2005 à 16:37 TU