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Sénégal

Le sort d’Habré plus incertain que jamais

L'ancien président tchadien Hissène Habré à sa sortie de la Cour d'appel de Dakar, le 15 novembre 2005.(Photo : AFP)
L'ancien président tchadien Hissène Habré à sa sortie de la Cour d'appel de Dakar, le 15 novembre 2005.
(Photo : AFP)
Extradition ou non ? C’est de nouveau le suspense au Sénégal dans l’affaire Hissène Habré. A Dakar, la chambre d’accusation devait se prononcer mardi matin. Finalement, les juges rendront leur avis vendredi. Alors qu’en début de semaine, les pronostics étaient très largement contre une extradition, c’est maintenant la confusion sur le sort qui va être réservé à l’ancien dictateur tchadien.

De notre correspondant à Dakar

Dix heures locales mardi matin, la cour du palais de justice de Dakar est bondée. Il y a là des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes, des avocats, des curieux, mais aussi beaucoup de Tchadiens, qu'ils soient partisans d’Hissène Habré ou qu'ils militent en faveur de son extradition. Tous attendent avec impatience la décision de la chambre d’accusation. Mais après un retard de plus de deux heures, on apprend finalement qu’elle ne sera connue que vendredi.

Aucune explication officielle à ce retard. Mais à la sortie, Doudou Ndoye, l’un des défenseurs d’Hissène Habré s’emporte. «Ca c’est passé dans le bureau d’un magistrat, après des explications qui n’ont absolument rien à voir avec le dossier», affirme l’avocat, en laissant entendre que ce report pourrait être dû à des pressions politiques. Et il menace : «Je ne peux pas envisager qu’il y ait une extradition ! Si cela se faisait, cette robe d’avocat je ne la porterais plus au Sénégal.»

«C’est donc que le dossier n’est pas réglé»

Que s’est-il passé donc passé dans le bureau de juge ? Selon plusieurs sources, ce nouveau délai s’explique par les pressions contradictoires, plus fortes que jamais, sur le chef de l’Etat sénégalais Abdoulaye Wade. Et de fait, avec ce dossier Habré, le Sénégal est pris entre deux feux. Il y a les «anti-extradition», nombreux au Sénégal, mais aussi les chefs d’Etats africains qui craignent un effet domino sur le continent. D’où, sans doute, la décision du président Wade de demander l’avis de l’Union africaine (UA).

Cela dit, l’UA n’est pas aussi monolithique qu’on le dit. Ainsi, le président de la Commission de l'Union africaine, Alpha Oumar Konaré, est favorable à l’extradition. Et certains autres dirigeants n’y sont pas hostiles non plus, tel le guide de la révolution libyenne Kadhafi, qui a un vieux contentieux avec Hissène Habré.

En outre, hors d'Afrique, les pressions sont nombreuses, du secrétaire général de l’ONU Kofi Annan, au Haut commissaire aux droits de l’homme Louise Harbour, et jusqu’à certains pays européens.

Cela veut-il dire pour autant que l’ancien dictateur va finalement être livré à la Belgique ? Les organisations de défense des droits de l’homme ne vont pas jusque-là.  Mais pour Demba Ciré Bathily, président d’Amnesty International, c’est tout de même un signe important : «Selon nos informations, le procureur a requis contre l’extradition, les avocats aussi, bien sûr. Et malgré cela, on reporte. C’est donc que le dossier n’est pas réglé…»

Le doute s’installe donc à nouveau dans le dossier Habré, alors que mardi matin, de la presse à l’entourage du président Wade, on laissait entendre que l’affaire était entendue. En clair, qu’il n’allait pas être extradé.


par Christophe  Champin

Article publié le 23/11/2005 Dernière mise à jour le 23/11/2005 à 12:18 TU