RDC
Tshisekedi ne veut pas rater le train électoral
(photo : AFP)
«L'UDPS entend conduire le peuple congolais, épris de paix et de changement, à la victoire finale lors des prochaines élections», proclame Etienne Tshisekedi dans ses vœux de nouvel an. Mais pour ce faire, il va d’abord falloir que la Commission électorale indépendante (CEI) rouvre ses listes d'inscription électorale. Partisan du boycott du recensement électoral organisé entre juin et décembre 2005, Etienne Tshisekedi ne s’est pas fait enregistrer. Or pour être éligible, il faut être électeur. Reste que de nombreux autres Congolais en droit de voter ont été involontairement omis de la liste finale des 25 millions d’électeurs. Ils habitent des terroirs reculés, voire des zones grises où sévit toujours l’insécurité. Mais la CEI peut tirer argument de ces électeurs spoliés pour ouvrir la lice présidentielle à Tshisekedi, sans créer un cas d’espèce.
L’UDPS veut entrer dans la commission électorale
D’ici le 30 juin 2006, la transition cooptée doit passer la main, via des élections présidentielle, législatives, provinciales, sénatoriales et locales. «Pour éviter que les prochains scrutins ne soient la répétition de ce qu'a été le référendum, à savoir une formalité pour la légitimation du pouvoir en place, l'UDPS exige que le processus électoral actuel lui donne l'assurance de sa crédibilité et de son équité», annonce Tshisekedi. En clair, il demande l’entrée de son parti dans la CEI, mais aussi dans l’organe de contrôle des médias. Au passage, il ne renie en rien ses positions précédentes et salue «les manifestations populaires, spontanées, constatées dès janvier 2005 et qui ont culminé le 30 juin 2005 pour s’opposer à la violation de la Constitution par la prolongation de la période de transition».
Déjà en campagne électorale, Etienne Tshisekedi ne change ni de discours ni d’adversaire. «La course effrénée à l’enrichissement personnel à laquelle se livrent les gouvernants actuels demeure, hélas, la seule raison pour laquelle ils ont mis le pays à feu et à sang; ils cherchent désespérément à confisquer la souveraineté du Peuple congolais, à travers un processus électoral conçu pour leur légitimation», dit-il, tout en rendant hommage à l’Onu, avec une «gratitude» toute neuve. «Le processus politique et électoral en cours est piloté et financé avec son appui actif», rappelle-t-il. Visiblement, le chef de l’UDPS compte sur l’entregent onusien pour favoriser sa participation à la préparation des élections. Il s’en est déjà entretenu, le 5 novembre dernier, dit-il, avec «une délégation du Conseil de sécurité de l’Onu». Il en a aussi parlé avec les délégués du Comité international d’accompagnement de la transition (Ciat), «lors des discussions exploratoires au début du mois de décembre 2005».
Dans la balance d’un nouvel équilibre des forces politiques dans lequel il entend s’insérer, le chef historique de l’opposition met «la paix sociale [qui] demeure précaire et fragile», sous une présidence Kabila qui menace selon lui de tourner en «dictature» avec un agrément occidental et en particulier européen que ses partisans ne cessent de dénoncer. Ils en veulent pour preuve le soutien réservé au jeune Joseph Kabila après l’assassinat de son père aventureux, Laurent-Désiré. Mais du côté d’Etienne Tshisekedi, l’heure est plutôt aux sous-entendus.
Tshisekedi demande l’instauration d’un Tribunal pénal international
Dans son message de vœux, le chef de l’UDPS prend à témoin la justice internationale qu’il remercie pour les jugements rendus en matière de violation de la souveraineté nationale congolaise, de pillages et d’exactions commises sur le sol congolais. Il note en effet que ces infractions, imprescriptibles et passibles d’une justice universelle, ont été commises sous «la responsabilité première de certains acteurs politiques congolais», ceux-là même qui se sont partagés le pouvoir dans la transition. Etienne Tshisekedi demande «l’institution d’un Tribunal pénal international pour la République démocratique du Congo».
Après avoir refusé de monter dans le train d’une transition qui lui refusait l’accès à la locomotive, l’UDPS entend jouer de sa différence et «prendre part aux prochains scrutins, à tous les niveaux». De fait, dans un Congo balkanisé par deux guerres et conduit par un attelage protéiforme, aucun de ceux qui mènent actuellement le jeu politique ne peut vraiment rêver d’un grand Chelem. Le retour en lice de l’UDPS de Tshisekedi contrarie également les plans des seconds couteaux, dont l’appétit s’aiguisait déjà à la vue du vide concédé par le boycott. Reste que le maintien à l’écart de Tshisekedi serait de mauvais augure pour le scrutin crucial qui s’annonce. D’un point de vue international, il serait en tout cas plus facile de déclarer un Tshisekedi vaincu plutôt qu’exclu.
par Monique Mas
Article publié le 05/01/2006 Dernière mise à jour le 05/01/2006 à 16:16 TU