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Pays-Bas - Belgique

Désaccord sur les mariages « importés »

Le ministre belge de l'Intérieur, Patrick Dewael, juge très «sévère» la politique des Pays-Bas vis-à-vis des mariages au sein des communautés étrangères.(Photo : AFP)
Le ministre belge de l'Intérieur, Patrick Dewael, juge très «sévère» la politique des Pays-Bas vis-à-vis des mariages au sein des communautés étrangères.
(Photo : AFP)
A l’issue de la réunion des ministres européens de l’Intérieur, ce week-end en Autriche, La Haye et Bruxelles sont convenus de coopérer sur la question des « mariages importés », qui verraient de plus en plus d’immigrés des Pays-Bas séjourner quelques mois en Belgique, le temps de faire venir leur conjoint. Avant cette réunion, la fermeté des Pays-Bas sur le regroupement familial avait été vivement critiquée par Patrick Dewael, le ministre belge de l’Intérieur.

De notre correspondante aux Pays-Bas

« Les Pays-Bas sont trop sévères », a affirmé le 7 janvier Patrick Dewael, le ministre de l’Intérieur belge, dans les colonnes de La Gazette d’Anvers. Dans l’application de la directive européenne sur le regroupement familial, « les Pays-Bas ne sont pas au rythme européen », a dénoncé le ministre belge, à quelques jours de la réunion ministérielle qui s’est tenue les 13 et 14 février à Vienne, en Autriche. Rita Verdonk, la ministre néerlandaise de l’Intégration, n’a pas fait grand cas de ces critiques belges. Connue pour sa fermeté, qui lui a valu le surnom de « Rita de fer », elle a plutôt cherché à aplanir le différend. Et signé avec Patrick Dewael un communiqué conjoint dans lequel les deux pays ont déclaré leur intention de coopérer sur le dossier des « mariages importés ».

Selon La Haye, de plus en plus de Turcs et de Marocains, qu’ils soient naturalisés ou pas, déménagent pour trois mois en Belgique ou en Allemagne, le temps de se marier, avant de rentrer aux Pays-Bas. Une manoeuvre qui n’aurait d’autre but que de contourner les lois néerlandaises sur le regroupement familial. Ces dernières imposent un âge minimum de 21 ans et des revenus équivalent à 120 % du Smic (plus de 1 300 euros par mois), pour pouvoir faire venir un conjoint de l’étranger. En outre, un test obligatoire, et payant, de langue et de culture néerlandaises a été instauré l’an dernier aux ressortissants de certains pays, comme les Marocains, avant l’octroi d’un visa.

Or, en Belgique, de tels obstacles n’existent pas. Il suffit d'avoir 18 ans et de gagner au moins 800 euros mensuels pour faire venir un conjoint de l’étranger et se marier. Aux Pays-Bas, les tribunaux de Haarlem et Amsterdam ont jugé trop restrictive, dans deux affaires jugées l’an dernier, l’interprétation que fait le gouvernement de la directive européenne sur le regroupement familial. « Les Pays-Bas sont plus stricts pour leurs propres résidents que pour d’autres citoyens européens », a déclaré Patrick Dewael, « en violation des lois européennes », a-t-il précisé.

L’endogamie est perçue comme un refus de s’intégrer

S’il n'y a pas de chiffres sur ce que le Parlement néerlandais appelle désormais la « route belge », les statistiques officielles sur l’immigration, elles, sont parlantes. L’immigration « traditionnelle » a tellement baissé ces dernières années que les Chinois ont été, pour la première fois en 2005, plus nombreux à s’installer au pays des polders (3 155 personnes) que les Turcs (3 000) et les Marocains (1 800).

Il n’empêche. Au royaume batave, l’endogamie pratiquée par les Turcs et les Marocains est perçue comme un refus de s’intégrer. Le gouvernement s’inquiète de voir 90 % des Turcs et des Marocains se marier au sein de leur propre communauté. En moyenne, 60 % de leurs conjoints viennent directement de leur pays d’origine. Les mariages avec un partenaire néerlandais s’avèrent beaucoup plus fréquents chez les Surinamais (329 000 personnes) et les Antillais (130 000), qui forment les communautés étrangères les plus importantes du pays, avec les Turcs (320 000) et les Marocains (285 000). Rita Verdonk, la ministre la plus populaire des Pays-Bas, n’a pas fléchi à Vienne. Voyant dans le « principe de libre circulation au sein de l’Union européenne » la source du problème des « mariages importés », elle a obtenu ce qu’elle voulait : une amorce de coopération bilatérale avec la Belgique, pour empêcher les abus et échanger des informations.


par Sabine  Cessou

Article publié le 16/01/2006 Dernière mise à jour le 16/01/2006 à 16:40 TU